(Hossegor (France)) « Belge ? »

– Non

– Suisse ?

Néééon… Je vous laisse une dernière chance.

Ses yeux se sont allumés sous son béret : « Québécois ! »

La préposée au hachoir du jambon de Bayonne était fière de sa réussite. Laissé en plan dans le Pays basque espagnol, l’estomac du suiveur était attendu de pied ferme dans le Pays basque français.

Morceaux choisis du menu à la salle de presse : axoa de veau aux piments d’Espelette, couscous au pamplemousse, fromage de brebis Manech tête noire et, donc, le fameux jambon, élaboré dans cette seule région selon une recette précise. Moelleux à souhait, relevé d’une pincée de sel blanc de Salies-de-Béarn, agrémenté d’un petit coup de rouge : les Bayonnais savent faire.

Même les dents sucrées – je vous laisse deviner si tel est mon cas – ont pu se régaler du traditionnel gâteau basque et du chocolat local. Bayonne en est la capitale française et a lancé sa technique de fabrication qui s’est étendue dans tout le pays.

Le buffet était parfait pour cette première étape un peu ronflante dévolue aux sprinteurs.

Le maillot à pois Neilson Powless a accru son avance au classement de la montagne en engloutissant les quatre courtes ascensions répertoriées.

PHOTO DANIEL COLE, ASSOCIATED PRESS

Laurent Pichon et Neilson Powless

Après avoir salué les Basques en haut de la dernière, l’Américain d’EF Education a laissé partir Laurent Pichon, son unique compagnon d’échappée. Le Français d’Arkea a été croqué et digéré par le peloton passé Saint-Jean-de-Luz, une quarantaine de kilomètres plus loin.

On a admiré les montagnes luxuriantes du Pays basque espagnol une dernière fois en empruntant l’itinéraire hors course. Les cyclistes ont longé la côte comme la caravane publicitaire, qu’on n’était pas fâché de voir décoller avant notre arrivée à la ville-départ d’Amorebieta.

Irún est la dernière ville espagnole que le Tour a traversée. Luis Mariano y est né, ce qui a inspiré le journaliste-historien de France Télévisions à fredonner les plus grands succès du chanteur d’opérette basque jusqu’à Bayonne, a-t-on appris pendant la diffusion de l’épreuve.

J’en connais un qui se serait garroché en bas de l’auto en marche.

On a tout de suite compris qu’on était arrivés en France quand le taxi derrière nous s’est mis à klaxonner au péage, jugeant que l’attente d’un reçu n’était pas un motif valable. Du coup, on lui a cédé le passage, pour se caler entre les bus d’Intermarché et d’Israel-Premier Tech, piloté par le sympathique Polonais Mirek Ratajczyk.

On couche dans les Landes ce soir, face au lac marin d’Hossegor.

La réceptionniste m’a prévenu de bien faire attention aux zones de culture d’huîtres face à l’hôtel. Avant le sprint d’écriture final, j’ai piqué une tête, comme ils disent ici.

En goûtant l’eau salée, j’ai compris ce que voulait dire un lac marin, soit que l’eau de mer entre et sort avec les marées. Son alimentation provient de l’Atlantique, qu’on entend gronder au loin, à partir d’un canal percé par l’homme.

Paraît qu’à marée basse, demain matin, je verrai les huîtres apparaître. Elle n’a pas dit si on en aurait pour déjeuner.