Sans frémir ni flancher, un homme de 105 ans, le Français Robert Marchand, a parcouru 22,547 km en une heure mercredi dans un vélodrome de la région parisienne, un exploit qui doit encore être homologué par les instances internationales.

«Non, je ne suis pas fatigué, je n'ai pas eu mal aux jambes, j'ai mal aux bras. Enfin, faut bien avoir mal quelque part !», a-t-il plaisanté après 92 tours de piste, entouré par une nuée de journalistes, se disant surpris d'être déjà arrivé. 

«Je croyais que j'avais encore des kilomètres à parcourir, j'aurais pu aller plus vite», a lancé avec une pointe de regret le centenaire, qui avait sensiblement pris de la vitesse dans les derniers tours.

«Maintenant j'attends mon adversaire», celui qui parviendra à battre son record, dans la toute nouvelle catégorie du record de l'heure des plus de 105 ans, a-t-il rigolé. 

Sa performance, pour être homologuée par l'Union cycliste internationale (UCI), doit passer le cap des tests antidopage, qui - si le cycliste de 1,50 m est fidèle à son hygiène de vie - devraient être une formalité.

La distance parcourue a beau se situer loin derrière le record du Britannique Bradley Wiggins (54,526 km), né lui en 1980, elle n'en soulève pas moins l'admiration. 

Coach technique du centenaire, Jean-Michel Richefort est «vraiment ému» par son exploit.

«Il est parti très vite, j'ai craint qu'il puisse avoir des crampes. Mais il a toujours été lucide, très concentré, avec une trajectoire parfaite», a-t-il salué.

Maillot jaune et violet aux couleurs de L'Ardéchoise - populaire course qui organisait l'événement avec la Fédération française de cyclisme -, vélo sur mesure : Robert Marchand a enchaîné les tours de piste sous les encouragements de plusieurs centaines de personnes.

Imperturbable. «Il a un avantage, c'est qu'il est sourd, il est dans son truc et il veut tourner», analyse Roland, 80 ans.

«Encore de belles années»

Les partisans les plus enthousiastes s'étaient levés avant l'aube pour être présents. «C'est un spécimen», qui distille «du bonheur», loue Marcel sous son chapeau jaune canari. «On espère devenir vieux comme lui».

«À l'âge qu'il a, c'est incroyable», s'enthousiasme également Liliane, jeune retraitée venue avec son mari. «Ça nous encourage, ça veut dire qu'on a encore de belles années devant nous.»

Sapeur-pompier, planteur de canne à sucre, marchand de vin ou maraîcher... Robert Marchand, né le 26 novembre 1911 à Amiens, a travaillé jusqu'à un âge avancé et vit désormais dans un modeste appartement de banlieue parisienne, après une vie marquée par les deux conflits mondiaux, la guerre froide et des années à bourlinguer au Venezuela et au Canada.

Il est aussi engagé - de longue date, forcément - au Parti communiste et à la CGT, premier syndicat français.

Lors de ses voeux à la presse, le numéro un de la centrale syndicale Philippe Martinez a ainsi glissé que le centenaire avait «un autre record qui est moins médiatisé: ça fait 90 ans qu'il est à la CGT, vous constaterez que la CGT, ça conserve !»

Après sa performance, la centrale a adressé «toutes ses félicitations à son fidèle camarade».

Il y a trois ans, le 31 janvier 2014, Robert Marchand avait battu son propre record dans ce même vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines en parcourant 26,927 km en une heure. Il avait alors largement amélioré sa performance de 2012, quand il avait établi, avec 24,251 km, le record des plus de 100 ans, une catégorie créée pour lui.

Ses records ont des chances d'être battus, a estimé auprès de l'AFP le professeur Jean-François Toussaint, directeur de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (IRMES) : «Les maxima (records) pour les centenaires ne sont pas encore atteints», a-t-il déclaré, tout en saluant une performance «exceptionnelle».

Et Robert Marchand, serait-il prêt à s'attaquer au record des plus de 110 ans ? «C'est un peu lointain, on en recausera !»