La victoire de Gilles Villeneuve au premier Grand Prix de Montréal. Le but de Cameron Porter pour l’Impact. Les 53 arrêts de Jaroslav Halak. Tous les combats de Stéphane Ouellet contre les Hilton. Le but d’Artturi Lehkonen à la Saint-Jean. Le premier match au Stade olympique de l’Impact en MLS. Le dernier match et le dernier coup sûr de Gary Carter avec les Expos.

Qu’ont en commun tous ces évènements marquants du sport à Montréal ?

La présence de Pierre Mailhot.

« Plus j’en mentionne, plus j’ai l’impression d’être le Forrest Gump du sport montréalais ! », dit en rigolant l’homme de 59 ans, en entrevue avec La Presse.

Pierre, c’est probablement l’un des plus grands partisans de sport de la métropole. Nommez un évènement sportif ayant eu lieu dans la région au cours des 40 dernières années, et les probabilités sont grandes que le bon « Sambapete » – tel est son pseudonyme sur X – rôdait dans les parages.

En voulez-vous d’autres ?

Il était là pour les trois championnats de l’Impact, en 1994, en 2004 et en 2009. Il a assisté au « Montreal Screwjob » de la Survivor Series au Centre Molson, en 1997. Il a accueilli Didier Drogba à l’aéroport de Dorval en 2015, puis a été témoin de son tour du chapeau au stade Saputo quelques semaines plus tard. Le match des Étoiles du baseball majeur à Montréal en 1982 ? Vous l’aurez deviné : il y était.

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Le programme et un billet du match des Étoiles du baseball majeur à Montréal en 1982

Mais lorsqu’il a reçu notre demande d’entrevue, Pierre Mailhot n’a pas accepté sur-le-champ. Il a voulu y penser.

« Parce que l’important, ce n’est pas moi le partisan, dit-il. Ce sont les matchs, les évènements, les équipes, les athlètes que j’ai vu jouer. Le projecteur devrait être sur eux, et pas sur moi. Je suis seulement privilégié d’avoir eu la passion et les moyens financiers d’être présent à de si nombreuses occasions. »

Pour « l’esprit de communion »

On se rencontre finalement dans un café de Côte-des-Neiges, à la mi-novembre. Dehors, une fine neige vient mouiller l’asphalte froid. Deux jours plus tôt, les Alouettes ont remporté une première Coupe Grey en 13 ans. Sur la tête de notre interlocuteur, une casquette de ses Moineaux, lui qui en est un abonné de saison depuis le milieu des années 1990.

Pour l’anecdote, après le défilé des Alouettes au centre-ville au lendemain de notre entretien, il a pu toucher à la Coupe Grey. Il s’est tenu près de la scène installée à la place des Festivals où sont montés tous les membres de l’organisation, accompagnés du précieux trophée.

Presque exceptionnellement, santé oblige, il n’était pas à Hamilton pour voir Cody Fajardo lancer une passe de touché victorieuse à Tyson Philpot avec 13 secondes à faire au cadran. Mais pour lui, ce genre de moment où retentit « l’esprit de communion » dans une enceinte sportive vaut à lui seul tous ces prix d’entrée.

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Un chandail du Manic, l’ancienne équipe de soccer de Montréal, appartenant à Pierre Mailhot

À ce titre, quelle est la meilleure ambiance qu’il a vécue ? La performance de Jaroslav Halak lors du sixième match de la série contre les Capitals de Washington, en 2010.

C’est probablement le meilleur match d’un gardien de but que j’ai vu, en vrai ou à la télé. Je regarde encore parfois des vidéos de la présentation des trois étoiles. Ils présentent la troisième, la deuxième… et la foule est déjà en train de crier “Halak ! Halak !”.

Pierre Mailhot

Il mentionne aussi le but de Cameron Porter faisant passer l’Impact en demi-finale de la Ligue des champions, en 2015. « Frédéric Lord l’a bien dit quand tu écoutes la description : le Stade a explosé. »

« J’ai assisté à tous les Grands Prix de Montréal »

En plus des Alouettes, Sambapete a un abonnement de saison du CF Montréal, depuis 2008. Du Canadien, depuis 2004. Il s’est abonné à l’Alliance en vue de la saison prochaine. « Quand tu te rends compte que t’as vu huit matchs sur dix à la maison… »

Il a même déjà été abonné au Royal de Montréal, l’équipe d’Ultimate Frisbee !

Mais son sport, c’est la Formule 1. « J’ai assisté à tous les Grands Prix de Montréal », affirme-t-il.

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Un autographe d’Ayrton Senna obtenu par Pierre Mailhot

Gilles Villeneuve, c’est sa première idole de jeunesse. Sa piqûre, l’informaticien montréalais l’a eue en 1978, alors qu’il avait 14 ans.

« J’étais au Grand Prix quand Gilles a gagné sa première course. J’avais un billet d’admission générale : 10 $. Je l’ai encore à la maison. »

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Un billet et le programme du Grand Prix du Canada de Formule 1 de 1978

Vraiment, tous les Grands Prix à Montréal, sans exception ?

« [En 1995], je travaillais pour Ericsson et j’étais en Suède. Samedi matin, je suis arrivé sur le décalage horaire, mais ça m’a permis de voir la seule victoire de Jean Alesi en Formule 1, avec le numéro 27 à Montréal. »

La meilleure course à laquelle il a assisté ? « La victoire de Jenson Button à Montréal. Il a fait cinq arrêts. Il était derrière Vettel. Vettel l’a échappé dans un virage au dernier tour et [Button] est passé. Ça n’avait aucun sens. »

« C’était un beau geste »

Sambapete est très actif sur X, anciennement Twitter. Certains internautes qu’il a croisés à des évènements sportifs le considèrent même comme une « légende du sport montréalais », dit-il, d’un ton humble qui laisse présager un scepticisme à cet égard.

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Des billets pour les matchs de l’Impact et du Canadien à Vancouver… le même jour !

Si la F1 est son dada, l’Impact est le club qu’il suit le plus assidûment et dont il parle le plus sur ses réseaux sociaux. Il a d’ailleurs fait plusieurs voyages, notamment avec les Ultras, pour suivre l’équipe sur la route.

L’an dernier, il a même reçu une belle invitation des 1642 MTL, groupe de partisans du CF Montréal, pour aller sonner la cloche au stade Saputo.

« J’étais un peu gêné, raconte-t-il. Sur Twitter, tout le monde semblait dire que c’était une méchante bonne idée. [Le président du CFM] Gabriel Gervais est venu me parler, et quelqu’un du club est venu me porter un maillot avec mon nom dans le dos et le numéro 30 [comme pour les 30 ans du club]. C’était un beau geste. »

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Le maillot du CF Montréal de Pierre Mailhot en son honneur

Il s’est rendu à Vancouver pour le premier match du club en MLS, en 2012. Heureux hasard : le Canadien joue à Vancouver le même soir. Évidemment, il assiste aux deux évènements. « Si tu savais les démarches que j’ai faites pour avoir un billet du match du CH ce soir-là… »

« Je n’aurais jamais cru voir ça »

Pierre Mailhot partage aussi sur X ses états d’âme, ainsi que certains de ses problèmes de santé. En entrevue, il assure que ce n’est « rien de grave ».

Mais récemment, l’inédit : malade, il a « oublié » qu’il y avait un match du Canadien au Centre Bell.

La même semaine, il a raté le match des Canadiennes contre les Brésiliennes au stade Saputo, puis celui des Alouettes le même jour. Quelques jours plus tard, il a dû annuler sa présence au Rocket de Laval.

J’ai passé quatre évènements sans y aller. Je n’aurais jamais cru voir ça.

Pierre Mailhot

Ne vous inquiétez pas, il s’en est remis depuis : quelques jours après notre entretien, il allait passer la fin de semaine à la Place Bell pour la Classique du Nord du basketball de la NCAA.

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Le chandail d’Alex Kovalev lors du match des Étoiles de la LNH à Montréal en 2009

Là, beau temps, mauvais temps

Des anecdotes, vous aurez compris que notre interlocuteur en a. Et bien au-delà de ce qu’il nous raconte pendant l’heure et demie que durera notre entretien.

« Je pourrais sûrement faire des efforts pour trouver une anecdote par année depuis 1977, minimum », lance celui qui est né à Ville-Émard en 1964.

Pierre Mailhot vit seul, sans enfants. Mais il a la compagnie de ses équipes locales, qu’il soutient « quand il pleut et quand il fait soleil », illustre-t-il.

Pendant longtemps, il n’a pas possédé de télévision HD. Une amie se demandait bien pourquoi. Sa réponse ?

« Parce que je suis là en 3D ! »