(Ottawa) Changement des règles du jeu pour les fédérations sportives : la ministre Pascale St-Onge a dévoilé jeudi les contours de sa réforme visant à transformer la culture « toxique » révélée au grand jour par une série de scandales ayant secoué plusieurs organisations. Tout ça, en s’engageant formellement à déclencher une enquête publique.

Plus de pouvoir aux athlètes, plus de diversité au sein des instances, plus de reddition de comptes : le plan de match s’articule autour de huit grands axes, et il s’appuie en bonne partie sur une enveloppe de 13 millions annoncée dans le budget d’avril dernier.

Pour moi, l’objectif, c’est d’amener plus d’imputabilité, d’amener plus de transparence, d’amener la voix des athlètes au centre de tout ce qui est fait, et améliorer la protection des athlètes dans le système sportif canadien.

Pascale St-Onge, ministre fédérale des Sports

Et si le plan propose « de nouvelles politiques, de nouveaux objectifs » aux organisations sportives, ultimement, tous ceux qui gravitent dans l’univers du sport canadien « doivent au quotidien changer leur façon de faire », plaide-t-elle dans un entretien accordé en amont de l’annonce de jeudi.

Pour les organisations, il en va de la pérennité de leur financement fédéral : si elles veulent continuer à le toucher, elles devront adopter le Code de gouvernance du sport canadien d’ici avril 2025. À l’heure actuelle, environ le tiers des organisations ont commencé à l’implanter ou l’ont déjà fait, selon la ministre.

Ce code adopté en 2021 fixe à un maximum de 60 % le nombre de membres qui sont du même genre au sein d’un conseil d’administration et à 40 %, au minimum, le nombre de membres indépendants. Les athlètes devront aussi y être représentés.

Une unité spéciale de vérification sera mise sur pied chez Sport Canada d’ici avril 2024 afin de s’assurer du respect des conditions du Code. Si l’unité de conformité constate qu’il n’y a pas d’améliorations ou que les exigences ne sont pas suivies, il y aura des conséquences, par exemple financières.

C’est à cette division de vérification qu’ira la part du lion de l’enveloppe de 13 millions.

Promesse de la tenue d’une enquête

Il y a près d’un an, le réseau sportif TSN a révélé qu’une jeune femme avait allégué avoir été violée par un groupe de joueurs d’Équipe Canada junior. L’affaire a fait grand bruit, et les parlementaires à Ottawa s’en sont saisis.

Au fil des rencontres d’un comité des Communes, des récits d’abus ou d’injustices – au hockey, au soccer, en gymnastique, en escrime, en boxe, etc. – ont été entendus. On a aussi entendu, abondamment, les athlètes réclamer une enquête.

La ministre St-Onge se dit ouverte à l’idée de déclencher tel exercice. « Je suis toujours aussi déterminée à répondre à la demande des athlètes », assure celle qui a été nageuse de compétition et volleyeuse dans une ligue universitaire.

« On travaille là-dessus, et dès que je serai prête à annoncer quelle forme ça va prendre, je vais le faire avec beaucoup d’enthousiasme et d’empressement, parce que je sais que c’est une demande qui est justifiée, et justifiable », indique-t-elle.

PHOTO SPENCER COLBY, LA PRESSE CANADIENNE

La ministre Pascale St-Onge a fait son annonce de manière virtuelle puisqu’elle a reçu un résultat positif à un test de la COVID-19.

Registre public et accords de non-divulgation

Parmi le bouquet de mesures figure également la création, d’ici un an, d’un registre de personnes sanctionnées en vertu du Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport (CCUMS), dont « l’admissibilité à des activités sportives a été restreinte d’une manière ou d’une autre ».

La réforme St-Onge interdira aussi tout accord de non-divulgation qui empêche athlètes et autres participants sportifs « de dénoncer la maltraitance qu’ils ont subie ou dont ils ont été témoins » ; 250 000 $ seront par ailleurs alloués à l’Association canadienne des entraîneurs, afin que celle-ci surveille les coachs.

Bien loin de constituer « une finalité », l’implantation de ces mesures représente plutôt « un point de départ nécessaire pour entamer un changement de culture dans le sport », a insisté la ministre, qui a fait son annonce de manière virtuelle puisqu’elle a reçu un résultat positif à un test de dépistage de la COVID-19.