(Paris) D’une allure royale, la mannequin espagnole Nieves Alvarez avance en robe de mariée, telle une ménine de Vélasquez : le couturier français Stéphane Rolland s’évade vers l’âge d’or de l’Espagne.

Ce pays « occupe mon cœur et mon esprit depuis très longtemps […] Je voulais faire une collection inspirée par les années d’or de l’Espagne, c’est tellement riche d’histoire », déclare le créateur à l’AFP lors du tournage d’un film destiné à présenter sa collection haute couture.

La robe de mariée est traditionnellement le look de la fin de chaque défilé haute couture, un évènement exclusivement parisien qui met en lumière des savoir-faire uniques.

Mais on en voit peu dans les présentations faites en ligne par les maisons, alors que pour la deuxième fois la Fashion week haute couture est contrainte de se tenir entièrement en numérique.

« Part de rêve »

PHOTO STÉPHANE DE SAKUTIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

D’une allure royale, la mannequin espagnole Nieves Alvarez avance en robe de mariée, telle une ménine de Vélasquez.

« Dans une période comme celle-ci, il est important de ne jamais oublier cette part de rêve et de transporter des gens vers un univers beau, riche en histoire et en innovation aussi », souligne Stéphane Rolland.

Pour le couturier, cette collection est partie de la relation entre Les Ménines — connu aussi sous le nom de La famille de Philippe IV, tableau le plus célèbre de Diego Vélasquez, peint en 1656 — et les sculptures modernes de l’Espagnol Manolo Valdes qui en sont inspirées.

« J’avais vu l’exposition des Ménines de Valdes dans les jardins du Palais Royal et j’étais fasciné par la pureté, la force et la modernité de ses sculptures », raconte-t-il.

Ce sont les arches du théâtre de la Villette à Paris, ce décor de scène épuré et majestueux où est tourné le film, qui ont servi de déclic.

« On a travaillé les cuirs comme des cuirs de Cordoue, le côté ethnique, la richesse, l’or, des broderies comme des trésors, des flots de chaînes qui tombent sur le corps, la fluidité et la majesté pour amener les spectateurs et les clientes vers un imaginaire un peu plus festif, beau et magique », explique Stéphane Rolland.

Il dit construire ses vêtements à partir « du rond et du carré » et « les ménines » représentent pour lui « cette perfection linéaire : la rondeur qui est toute en féminité, mais en force également ».

« La mode est intimement liée à l’art, car elle a à voir avec les formes et les volumes », déclare à l’AFP le sculpteur Manolo Valdés.

« Certaines tenues sont comme des sculptures, le dessin se transfère sur les matériaux, pas en bronze ou en bois, mais en tissu », ajoute-t-il.

Homewear chic

PHOTO STÉPHANE DE SAKUTIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Ce sont les arches du théâtre de la Villette à Paris, ce décor de scène épuré et majestueux où est tourné le film, qui ont servi de déclic.

C’est la muse de Stéphane Rolland, Nieves Alvarez avec son port de tête et sa démarche inimitables, qui incarne son imaginaire : « Si on parle de l’âge d’or d’Espagne, qui d’autre que Nieves peut l’interpréter ? C’est Blanche de Castille, une reine d’Espagne » !

« La période est difficile pour moi comme pour tout le mode […] C’est un vrai privilège d’être ici », dit la mannequin à l’AFP, depuis les coulisses où elle change de robe.

Stéphane Rolland, qui a beaucoup de clientes en Moyen-Orient, se dit heureux de s’exprimer avec des films, ce qu’il avait toujours rêvé de faire.

« La difficulté nous amène à nous dépasser. Aujourd’hui c’est une nouvelle guerre et on va y faire face ».

Parallèlement aux robes haute couture, il a dessiné une collection de caftans et de djellabas, un « homewear » chic qui correspond à l’esprit du moment. C’est une « demi-couture à des prix plus abordables » — malgré tout entre 6000 et 12 000 euros (9200 $ et 18 500 $), contre 45 000 (70 000 $) pour une robe de soir.

« Dans les années 60-70, les femmes recevaient chez elles en caftan. J’ai toujours trouvé ça d’un chic absolu », souligne Stéphane Rolland.