Produits de l'infiniment petit, les nanoparticules, souvent citées pour leurs débouchés en électronique ou chimie, suscitent aussi l'espoir de la médecine, en premier lieu pour combattre les cancers.

Depuis quelques mois, une start-up française, Nanobiotix, mène un essai prometteur sur des patients souffrant de sarcomes, tumeurs rares s'attaquant notamment aux muscles des membres, en leur injectant des particules un million de fois plus petites qu'un cheveu dont le but est de décupler l'effet des radiothérapies.

Cette première phase d'essai clinique avec un total de 27 patients vise d'abord à vérifier l'innocuité de l'oxyde de hafnium (HfO2), une nanoparticule qui, une fois dans la tumeur, devrait booster l'effet tueur des rayons X émis lors des radiothérapies, explique le président fondateur de Nanobiotix, Laurent Levy.

«On a ensuite prévu une deuxième phase sur beaucoup plus de patients pour démontrer l'efficacité» de ce procédé déjà testé avec succès sur des souris, explique M. Levy, espérant de premiers débouchés commerciaux «d'ici à 2015».

«Il y a eu une expérimentation in vivo sur l'animal très solide et on ne voit pas pourquoi ce modèle valable chez l'animal ne serait pas transposable chez l'homme», explique le radiothérapeute Jean-Michel Vannetzel de la clinique Hartmann à Neuilly-sur-Seine, en banlieue parisienne.

«C'est très excitant et si cela marche ce serait une vraie révolution thérapeutique», s'enthousiasme cet oncologue, citant comme débouché «tout un champ de tumeurs non opérables et difficiles à guérir par radiothérapie en raison de la présence d'organes autour».

Ce serait le cas pour des cancers de la prostate, du foie, du pancréas, du rectum, de l'oesophage ou même des tumeurs cérébrales, selon lui.

Toute tumeur peut être tuée par des rayons, mais c'est avant tout une question d'intensité du rayonnement.

Des applications multiples en cancérologie

La présence d'organes à proximité limite le plus souvent la dose que les radiothérapeutes peuvent délivrer sur les cellules cancéreuses à «neutraliser».

«Beaucoup de progrès ont été réalisés ces 20 dernières années pour cibler au mieux les volumes à irradier et contrôler les doses, notamment grâce à l'usage de l'imagerie par scanneur», tempère le radiologue Bruno Cutuli de la Polyclinique de Courlancy à Reims (nord-est de la France).

Mais l'idée de pouvoir décupler l'efficacité des rayons sans accroître la dose «serait une nouvelle fantastique» pour le monde de la radiothérapie, une technique qui «permet déjà à elle seule de guérir un nombre important de cancers», souligne M. Vannetzel.

De manière plus générale, «les applications des nanotechnologies en cancérologie sont multiples» et «devraient permettre un meilleur ciblage des traitements anticancéreux», soulignait l'hépatologue Pierre Attali, lors d'une première «Journée scientifique de la nanomédecine» organisée fin 2011 à Paris.

En plus de la radiothérapie, les nanotechnologies pourraient être utilisées en chimiothérapie, en créant des mécanismes pour que les traitements ne ciblent que les seules cellules cancéreuses, sans effet nocif pour le reste de l'organisme.

«Les nanotechnologies peuvent apporter une réponse forte. Plusieurs molécules anticancéreuses efficaces n'ont jamais été mises sur le marché à cause de leur caractère nocif. Avec ces nanotechnologies, nous pourrons désormais les utiliser», résumait récemment, dans l'hebdomadaire français Le Point, le professeur au collège de France et biopharmacien Patrick Couvreur.