Le Comité international de bioéthique de l'UNESCO a appelé lundi à un moratoire sur les techniques d'«édition» de l'ADN des cellules reproductrices humaines afin d'éviter une modification «contraire à l'éthique» des caractères héréditaires des individus, qui pourrait faire resurgir l'eugénisme.

Composé de scientifiques, de philosophes, de juristes et de ministres, ce comité de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), qui s'est réuni à Paris, a publié un rapport mettant à jour sa «réflexion sur le génome humain et les droits de l'homme».

Il appelle de ses voeux un vaste débat public sur les modifications génétiques de l'ADN humain.

Depuis 2012, des chercheurs ont notamment développé une technique baptisée «CRISPR-Cas9» qui permet aux chercheurs «d'insérer, de retirer et de corriger l'ADN de façon simple et efficace», souligne l'UNESCO dans un communiqué.

Cette technique révolutionnaire a le vent en poupe dans les laboratoires. La Française Emmanuelle Charpentier et l'Américaine Jennifer Doudna qui ont mis au point le CRISPR-Cas9 apparaissent comme des lauréates possibles du prix Nobel de Chimie.

Le Comité de bioéthique de l'UNESCO relève que cette «ingénierie du génome» est extrêmement «prometteuse» pour le bien de l'humanité.

Mais ce développement semble «nécessiter des précautions particulières et soulève de sérieuses inquiétudes, particulièrement si cette édition du génome humain devait s'appliquer» aux cellules reproductrices et «introduire des modifications héréditaires qui seraient transmises aux générations futures», ajoute-t-il.

La technique CRISPR-Cas9 «ouvre des perspectives pour traiter voire guérir certaines maladies de façon simple et efficace» comme la drépanocytose (ndlr: une maladie héréditaire des globules rouges), la mucoviscidose et certains cancers», souligne l'organisation.

Mais elle peut aussi rendre plus facile la possibilité de modifier l'ADN humain afin, par exemple, de «déterminer la couleur des yeux des bébés», pour certains chercheurs qui travaillent sur les embryons, les ovules ou le sperme, ajoute l'UNESCO.

«Les interventions sur le génome humain devraient être autorisées uniquement pour des raisons de prévention, de diagnostic et de thérapeutique et sans que cela entraîne des modifications pour la descendance», estime le comité. Sinon, cela risque de menacer l'égalité et la dignité de tous les êtres humains et de faire renaître l'eugénisme».

Le Comité international de bioéthique de l'UNESCO, créé en 1993, est composé de 36 experts indépendants qui encadrent les progrès des recherches dans les sciences de la vie et leurs applications «en veillant au respect des principes de dignité et de liberté de la personne humaine».