Comment éviter une collision entre la Terre et un astéroïde? Chacun de leur côté, Européens, Russes et Américains cherchent le meilleur moyen de dévier tout corps céleste qui menacerait notre planète, à l'instar de celui qui aurait anéanti les dinosaures.

«Personne ne cherche à exploser un astéroïde, ce n'est pas Hollywood, et le remède pourrait être pire que le mal en multipliant les risques» par la fragmentation de l'objet, explique dans un entretien à l'AFP Erwan Kervendal, le responsable du dossier chez Astrium (groupe EADS), numéro un européen de l'espace.

Alors qu'un astéroïde de 45 mètres de diamètre s'apprête à frôler la Terre le 15 février -à près de 30 000 km de distance tout de même-, «trois options sont à l'étude pour dévier un objet menaçant la terre», selon M. Kervendal.

Scénario 1

La première consiste à «aller percuter l'objet céleste ou géocroiseur à très grande vitesse, une trentaine de milliers de km/h, près de son centre de gravité, au mètre près, sous un angle particulier pour le faire dévier».

C'est sur ce scénario que travaillent les Européens, dont M. Kervendal, chef du projet «d'impacteur cinétique» chez le maître d'oeuvre Astrium.

Scénario 2

Les Américains travaillent de leur côté sur l'attraction que pourrait exercer un véhicule spatial placé longtemps à proximité de l'astéroïde et qui ferait ainsi fonction de «tracteur gravitationnel», d'après Astrium.

Scénario 3

Les Russes étudient la troisième option, une déviation de trajectoire par l'effet de souffle lié à une explosion à proximité de l'astéroïde.

Scientifiques et industriels vont faire le point de leurs recherches en mars à Bruxelles.

Collaboration scientifique

Ce sera «le premier bilan annuel du programme de l'Union européenne NEO-Shield (Bouclier contre les Near Earth Objects, ou géocroiseurs) lancé pour trois ans début 2012», indique M. Kervendal.

«Chacun travaille sur un axe mais nous allons mettre en commun nos savoirs et nos outils mathématiques, il n'y a pas de compétition mais une collaboration entre les équipes», souligne le scientifique français.

Une fois choisi le concept «le plus efficace et réalisable industriellement» à la mi-2015, il faudra encore de longues années pour avoir une solution opérationnelle, précise-t-il.

«Si l'UE accepte la proposition, on devrait lancer à l'horizon 2020 un démonstrateur, pour valider l'option retenue et montrer qu'on sait viser un objet, probablement au-delà de 36 000 km d'altitude, où tournent les satellites de télécommunications».

«En fonction de l'intérêt de nos dirigeants et une fois montré que cela marche, on passera au financement du développement de la technologie opérationnelle», ajoute le responsable d'Astrium.

M. Kervendal estime prématuré de donner plus de détails sur l'étude et les délais mais souligne «qu'on n'est pas pris par le temps, car il ne devrait pas y avoir de véritable menace de collision avant un siècle», celle en 2036 d'une collision avec l'astéroïde en fer Apophis ayant été écartée.

Astrium est «très confiant» sur sa capacité à réaliser sa mission.

«Les lanceurs existent, nous savons lancer des sondes interplanétaires, nous avons l'expérience des rendez-vous du vaisseau cargo ATV avec la station internationale ISS, à haute vitesse au centimètre près», explique-t-il. «Il faudra avoir l'intelligence artificielle qui va bien à bord pour se contrôler et taper l'astéroïde avec précision», ajoute-t-il.

L'astéroïde «2012 DA14», qui va frôler la Terre vendredi, produirait en s'écrasant des dommages comparables à celui qui avait détruit la forêt sibérienne dans un rayon de 20 km en 1908 à Toungouska par une onde de choc équivalant à plusieurs centaines de fois la bombe d'Hiroshima.

La météorite qui s'est abattue sur le Yucatan il y a 66 millions d'années et qui serait responsable de l'extinction des dinosaures mesurait 10 km de diamètre.