Le site mégalithique de Stonehenge, situé dans le sud de l'Angleterre et dont les origines sont mystérieuses, serait né d'une illusion sonore, selon une nouvelle théorie avancée jeudi par un chercheur américain indépendant lors d'un forum scientifique au Canada.

Pour Steve Waller, l'architecture et l'art ne sont pas seulement inspirés par ce que l'on voit, mais aussi par ce que l'on entend.

Il a été intrigué par des interactions entre deux sons de même longueur d'onde qui peuvent s'annuler selon l'endroit où l'on se trouve.

Et ce phénomène de zone sonore morte, bien connu en acoustique, peut aisément tromper le cerveau.

Les personnes ayant cette illusion pensent qu'il y a une construction invisible empêchant soudainement le son de se propager, a expliqué ce chercheur au premier jour de la conférence annuelle de l'Association américaine pour l'avancement de la science (AAAS) qui réunit 8000 chercheurs à Vancouver depuis jeudi et jusqu'à lundi.

«En visitant Stonehenge, j'ai été frappé par la manière dont les sons se propagent entre ces blocs de pierre monolithiques dont la disposition paraît créer cette illusion sonore», a-t-il expliqué à la presse.

Pour démontrer cette théorie, il a demandé à des volontaires de se prêter à une expérience: on leur a posé un bandeau sur les yeux et ils ont été placés en cercle autour de deux haut-parleurs émettant certains sons.

Les participants se sont ensuite retournés et ont enlevé leur bandeau. Steve Waller leur a alors demandé de dessiner ce qu'ils pensaient qui se trouvait entre la source des sons et eux-mêmes.

Certains ont dessiné un cercle de piliers, d'autres des objets solides comme des roches, d'autres des ouvertures ou des arches, ce qui selon lui ressemble beaucoup à Stonehenge.

«Je pense que cette même illusion s'est produite il y a 5000 ans, comme on peut le démontrer aujourd'hui», a estimé le scientifique.

Ainsi, si des gens à cette époque-là dansaient en cercle autour de deux personnes jouant de la flûte, ils avaient la même expérience, passant d'une zone où le son était fort à une autre où il disparaissait, leur laissant penser que des objets invisibles se trouvaient dans le cercle, poursuit-il.

«Une telle expérience devait terriblement les perturber et dans le passé tout ce qui était mystérieux était considéré comme magique ou surnaturel».

«Et je pense que cela a motivé les bâtisseurs de Stonehenge pour reproduire la structure recréant la même illusion... comme une vision qu'ils avaient eue d'un autre monde», a précisé le chercheur.

D'anciens mythes du monde entier évoquent des croyances populaires selon lesquelles l'écho de la voix était la réponse des esprits, a-t-il expliqué.

L'acoustique paraît avoir été utilisée par des civilisations anciennes pour créer de puissants espaces spirituels.

Une étude conduite par Miriam Kolar de l'université Stanford, située en Californie, également présentée jeudi à la conférence de l'AAAS, révèle que les créateurs du centre cérémonial de Chavin de Huantar au Pérou, vieux de 3000 ans, avaient des connaissances acoustiques.

Selon cette étude, le labyrinthe de galeries se trouvant sous le complexe reproduit des sons étranges en écho de la voix humaine ou d'instruments de musique fait en coquillage. Cela laisse penser que les oracles devaient s'exprimer de cette manière, selon Miriam Kolar.

Les Mayas «utilisaient aussi l'acoustique pour manipuler les esprits», a expliqué David Lubman, un expert de l'Institut d'ingénierie de contrôle du bruit à Westminster (Californie), qui a mené des études sur le site de Chichen Itza au Mexique. À la pyramide de Kukulkan, l'écho d'un applaudissement évoque le chant du quetzal, l'oiseau sacré des Mayas considéré comme un messager de dieu, a-t-il estimé.