Tablant sur des découvertes majeures dans les mois qui viennent, les physiciens de l'accélérateur de particules le plus puissant au monde rêvent déjà d'une machine plus puissante qui les aidera à percer les secrets de l'univers dont le mystérieux boson de Higgs ou «particule de Dieu».

La 35e Conférence internationale sur la physique des hautes énergie (Ichep) à Paris revêtait une importance particulière cette année car y étaient présentés les premiers résultats du fameux Grand collisionneur de hadrons (LHC), près de Genève, un projet international pharaonique de 3,9 milliards d'euros.

Les performances enregistrées par le LHC ont été «plus rapides que prévues», s'est réjoui lors d'une conférence de presse, Rolf Heuer, directeur général du Cern (Centre européen de recherche nucléaire), qui l'exploite.

En quatre mois, le taux de collision y a été multiplié par un facteur 1000. Les détecteurs qui enregistrent les données (trajectoire des particules après leur collision, leur nature et leur masse) ont également dépassé les attentes.

«Si la nature est coopérative, on peut faire des découvertes l'an prochain. Sinon, ça peut prendre jusqu'à 2015», a précisé à l'AFP M. Heuer.

«Ce qui est excitant, c'est le potentiel de découvertes, d'ici deux mois à quatre ans», explique Guy Wormser, qui préside la conférence.

Tablant sur des percées majeures, les physiciens pensent déjà à la suite, la machine qui permettra d'observer en détails les nouvelles particules qu'aura découvert le LHC.

«On doit anticiper car cela prend 20 ans à construire et cela coûte 10 milliards d'euros. On ne peut pas laisser un trou de vingt ans, pendant lequel les gens s'en vont et on perd la compétence», a expliqué M. Wormser.

Un des projets est le Collisionneur linéaire international (ILC), qui projettera les particules en ligne droite, plutôt que dans des anneaux géants.

Selon M. Wormser, «on choisira l'un ou l'autre en fonction de ce que le LHC nous dire du boson de Higgs». Cette particule dite «particule de Dieu» est supposée conférer leur masse aux autres particules mais n'a encore jamais été trouvée.

Remis en route le 30 mars après un arrêt peu après son lancement en novembre 2008, le LHC a déjà dépassé les performances de l'accélérateur de particules américain, le Tevatron du Fermilab de Chicago.

«En quatre mois, nous n'avons pas de découvertes dignes d'un prix Nobel, mais nous avons la certitude que tous les outils mis en place fonctionnent parfaitement. On voit l'autoroute de la découverte dégagée devant nous, sans obstacle», a expliqué Guy Wormser.

«C'est une machine qui explore des domaines d'énergie que l'humanité n'est jamais allée voir. On entre dans une jungle jamais explorée et nous sommes au début de cette aventure», explique Guy Wormser.

Les collisions de protons à grande vitesse dans un tunnel circulaire de 27 km, enfoui à 100 mètres sous terre dans la banlieue de Genève, doivent donner une idée de ce qui s'est passé un milliardième de seconde après le Big Bang il y a quelque 13,7 milliards d'années,

Cette machine géante fonctionne comme un «microscope» pour voir les particules de l'infiniment petit, les «briques Lego» qui constituent l'univers, l'infiniment grand, selon les scientifiques.

«Nous avons un modèle fantastique, le modèle dit «standard», mais qui n'explique que 5% de l'énergie et de la matière de l'univers. Les 95% restants sont à explorer», a expliqué Rolf Heuer.

Le LHC sert à la fois à confirmer ou infirmer cette théorie du modèle standard, mais aussi à explorer ce qu'il n'explique pas: la matière noire et l'énergie noire.