(Washington) Le président américain Joe Biden a affirmé lundi avoir enjoint au premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou d’envoyer une délégation à Washington pour discuter de la manière d’éviter un assaut généralisé dans la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Cette sommation est l’une des plus claires tentatives de M. Biden de tenter de freiner Israël, pays qui envisage une offensive terrestre majeure de son armée à Rafah, où plus d’un million de civils palestiniens sont réfugiés.  

« J’ai demandé au premier ministre d’envoyer une équipe à Washington pour discuter des façons de cibler le Hamas sans mener une vaste offensive terrestre à Rafah », a déclaré M. Biden après un entretien avec M. Nétanyahou, le premier depuis plus d’un mois entre les deux dirigeants, dont la relation s’est nettement refroidie.

M. Biden a « réitéré la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat dans le cadre d’un accord sur la libération des otages, d’une durée de plusieurs semaines, afin que les otages puissent rentrer chez eux et que l’aide aux civils de Gaza puisse être acheminée ».

Une offensive sur Rafah serait « une erreur », a déclaré le conseiller à la sécurité nationale américain Jake Sullivan, elle « conduirait à plus de victimes innocentes, aggraverait la situation humanitaire déjà grave, renforcerait l’anarchie à Gaza et isolerait encore plus Israël » sur la scène internationale.

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Des membres de la famille Al-Rabaya rompent leur jeûne du ramadan devant leur maison détruite par les frappes aériennes israéliennes à Rafah, le 18 mars.

Lors de son échange téléphonique, le président américain a demandé l’envoi aux États-Unis d’une délégation israélienne pour discuter de ce projet d’offensive, et le chef du gouvernement israélien a accepté, a précisé le conseiller lors d’une conférence de presse.

Cette discussion doit aussi porter sur la possibilité d’une « autre approche » visant à frapper le Hamas à Rafah sans une offensive terrestre majeure, selon lui.

M. Sullivan a indiqué s’attendre à ce qu’Israël s’abstienne de lancer une opération à Rafah, à la frontière avec l’Égypte, avant que cette discussion à Washington n’ait lieu.

« Nous partageons l’objectif de battre le Hamas, mais nous pensons qu’il faut une stratégie cohérente et durable pour y arriver », a-t-il encore dit.

Il a toutefois estimé qu’Israël avait « fait des progrès importants » contre le groupe palestinien.

La Maison-Blanche a confirmé lundi la mort, la semaine dernière à Gaza, du chef adjoint de la branche armée du Hamas, Marwan Issa, qui devient le responsable le plus haut placé tué sur ce territoire par l’armée israélienne depuis le début de la guerre.

L’armée israélienne avait fait état d’une frappe aérienne « dans le centre de la bande de Gaza, près de Nuseirat », contre une « base souterraine », qui était « utilisée par deux hauts dirigeants de l’organisation (dont) Marwan Issa ».

Israël n’avait toutefois pas confirmé la mort de l’homme, né en 1965, qui était l’adjoint de Mohammed Deif, le chef des brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas.

Le président américain soutient Israël depuis l’attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien mais s’éloigne de plus en plus ostensiblement de M. Nétanyahou.

M. Biden est également confronté à une pression politique de plus en plus grande émanant de la population musulmane et arabe américaine ainsi que des jeunes électeurs, à quelques mois de la présidentielle de novembre.

M. Nétanyahou a déclaré dans un communiqué, à l’issue de sa conversation avec M. Biden, qu’il avait réitéré « l’engagement d’Israël à atteindre tous les objectifs de la guerre ».

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Explosion au centre de la ville de Gaza, le 18 mars

Il a cité comme objectifs l’élimination du Hamas, la libération de tous les otages détenus par le groupe et « l’assurance que Gaza ne représentera jamais une menace pour Israël ».

Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque sans précédent dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort d’au moins 1160 personnes, la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de sources officielles israéliennes.

D’après Israël, environ 250 personnes ont été enlevées et 130 d’entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 33 seraient mortes.