L’armée israélienne a resserré l’étau sur le sud de la bande de Gaza, où des dizaines de chars sont entrés lundi dans le cadre de son offensive contre le Hamas palestinien, rendant la situation plus périlleuse encore pour une population prise au piège des bombardements.  

Ce qu’il faut savoir

  • Des dizaines de chars israéliens sont entrés lundi dans le sud de la bande de Gaza.
  • Une frappe israélienne a visé une entrée de l’hôpital Kamal Adwan, dans le nord de Gaza, faisant plusieurs morts, selon des sources palestiniennes.
  • Le mouvement libanais Hezbollah a revendiqué des attaques lundi contre des positions militaires israéliennes dans le nord d’Israël, frontalier du sud du Liban.
  • Plus de 17 000 personnes — Israéliens et Palestiniens — ont perdu la vie depuis le début du conflit.
  • Le procès pour corruption du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a repris lundi à Jérusalem.
  • 137 otages restent détenus après des vagues de libérations lors de la trêve qui s’est terminée le 1er décembre.

Engagée depuis le 27 octobre dans une campagne terrestre dans le nord du territoire palestinien assiégé, l’armée israélienne a élargi ses opérations au sol à l’ensemble de la bande de Gaza, presque deux mois après le début de la guerre déclenchée le 7 octobre par une attaque sanglante du mouvement islamiste en Israël.

Depuis la reprise des combats le 1er décembre à l’expiration d’une trêve de sept jours, l’armée israélienne pilonne le sud du petit territoire surpeuplé de 2,4 millions d’habitants, faisant de très nombreux morts et blessés parmi les habitants et les centaines de milliers de civils venus s’y réfugier, confinés dans un périmètre de plus en plus réduit.

Ajoutant au chaos, la compagnie palestinienne des télécommunications Paltel a affirmé lundi soir que « tous les services de télécommunications de la bande de Gaza » étaient à l’arrêt, invoquant « une coupure des principaux réseaux de fibre du côté israélien ».

Plus tôt, le directeur de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) à Gaza, Thomas White, avait déploré que « même à Rafah, vers où les gens sont contraints de fuir, le bruit des frappes aériennes rythme la journée ».

PHOTO MAHMUD HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des Palestiniens déplacés qui ont fui Khan Younès sont assis devant des abris de fortune dans un camp à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 4 décembre.

« Les gens nous demandent conseil pour savoir où se mettre en sécurité. Nous ne savons que leur dire », a-t-il écrit sur X.

Le porte-parole du département d’État américain a toutefois jugé positif que l’armée ordonne désormais aux civils d’évacuer de manière « plus ciblée », plutôt « que de demander à une ville ou à une région tout entière d’évacuer », comme elle l’a fait lors de la première phase du conflit dans le nord de bande de Gaza.

PHOTO SAID KHATIB, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des tracts ont été largués par les forces israéliennes au-dessus de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, tôt le 4 décembre.

« Attaque imminente »

Lundi, l’armée israélienne a dit agir « avec force » à Khan Younès, grande ville du sud de la bande de Gaza déjà visée massivement par des frappes depuis la reprise des combats vendredi, et où chaque jour désormais l’armée avertit dans des tracts largués sur certains quartiers qu’« une terrible attaque est imminente », ordonnant aux habitants d’en partir.  

Des dizaines de chars, de transports de troupes et de bulldozers israéliens sont entrés dans le sud du territoire palestinien à proximité de Khan Younès, où s’entassent une partie des civils sommés par Israël de fuir le nord de Gaza durant la première phase de l’offensive, ont indiqué des témoins à l’AFP.

Amine Abou Hola, 59 ans, a raconté que ces véhicules étaient entrés « sur une profondeur de deux kilomètres », dans le village d’al-Qarara, au nord de Khan Younès.

De la fumée s’élevait pendant ce temps dans le ciel au-dessus de Rafah, ville du sud frontalière de l’Égypte et voisine de Khan Younès, selon des images tournées par l’AFP.

PHOTO SAID KHATIB, AGENCE FRANCE-PRESSE

Cette photo prise depuis Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, montre des fusées éclairantes larguées lors des bombardements israéliens le 4 décembre.

Le ministère de la Santé du Hamas a affirmé lundi que 15 899 personnes, à 70 % des femmes et enfants et adolescents, ont été tuées depuis le début des bombardements israéliens sur la bande de Gaza le 7 octobre.

En Israël, l’attaque menée par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza a fait 1200 morts, en majorité des civils, selon les autorités. En représailles, Israël a déclaré la guerre au Hamas et promis de détruire le mouvement islamiste, au pouvoir dans la bande de Gaza.

« Comme un tremblement de terre »

Les hostilités à Gaza suscitent de plus en plus de violences dans le territoire palestinien de Cisjordanie occupée – où cinq Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne lundi selon l’Autorité palestinienne – mais aussi des échanges de feu qui s’intensifient à la frontière entre Israël et le Liban tandis que de nouveaux incidents ont eu lieu dimanche en mer Rouge et en Irak.

L’armée israélienne a annoncé lundi que trois soldats avaient été tués la veille dans le nord de Gaza, portant le total à 75 soldats morts depuis le début de l’offensive terrestre.

En outre, d’après l’armée, 137 otages sont toujours retenus à Gaza, 105 ayant été relâchés pendant la trêve, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël.

L’armée a dit dimanche avoir mené « environ 10 000 frappes aériennes » sur Gaza depuis le début de la guerre, affirmant que 11 500 roquettes avaient été tirées en parallèle depuis le territoire palestinien vers Israël.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

Vue sur une maison de Khan Younès détruite par une frappe israélienne, le 4 décembre

Les frappes israéliennes ont détruit ou endommagé plus de la moitié des habitations, selon l’ONU.

Dans un quartier dévasté de Rafah, des survivants fouillaient lundi les décombres.

« Nous étions à la maison, nous avons entendu un énorme bruit et des choses ont commencé à nous tomber dessus, c’était comme un tremblement de terre. Nous n’avions jamais vu cela auparavant, la terre a tremblé et le son était si fort », a témoigné un rescapé, Abou Jahar al-Hajj.

À Deir al-Balah, plus au nord, des blessés allongés sur le sol de l’hôpital al-Aqsa attendaient d’être soignés.

« Ma fille de quatre ans est sous les décombres, je ne sais pas si elle est morte ou vivante. Arrêtez la guerre, assez avec la guerre », s’est écriée une femme, Walaa Abu Libda.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

Des membres du Croissant-Rouge palestinien aident un enfant palestinien transporté d’urgence à l’hôpital Nasser de Khan Younès, le 4 décembre.

Des déplacés qui s’entassent

Les combats faisaient également rage lundi dans la ville de Gaza (Nord), visée par de nombreuses frappes aériennes.

Selon des témoins, des chars israéliens ont ouvert le feu et sont entrés pour la première fois dans le marché de la vieille ville, où ils ont détruit des dizaines d’échoppes.

La nuit précédente, une frappe sur une entrée de l’hôpital Kamal Adwan, dans le nord de Gaza, a fait plusieurs morts, selon l’agence de presse palestinienne Wafa. L’armée n’a pas confirmé.

Israël accuse le Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël, d’avoir installé des infrastructures dans ou sous des hôpitaux de la bande de Gaza et d’utiliser les civils comme des boucliers humains, ce que le mouvement palestinien dément.

Les besoins sont immenses dans le territoire soumis à un siège total par Israël depuis le 9 octobre, où d’après l’ONU 1,8 million de personnes, soit les trois quarts environ de la population, ont été déplacées par la guerre.

PHOTO MOHAMMED SALEM, REUTERS

Un garçon palestinien portant un bébé se tient sur un site de frappes israéliennes, le 4 décembre à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Les déplacés survivent entassés dans des abris de fortune, des écoles, des tentes, dormant parfois dehors ou dans leur voiture.

Alors que la plupart des hôpitaux du nord sont hors service, ceux du sud sont plongés dans le chaos, débordés par l’arrivée massive de blessés, sans électricité, leurs réserves de carburant pour faire tourner les générateurs presque à sec.

Pour tenter d’atténuer la crise humanitaire, les États-Unis ont appelé lundi Israël à laisser entrer davantage de carburant dans la bande de Gaza.

À l’exception des sept jours de trêve qui ont permis l’entrée depuis l’Égypte de centaines de camions d’aide humanitaire, le poste-frontière de Rafah ne s’ouvre que très partiellement pour laisser passer quelques camions ou permettre l’évacuation d’étrangers, en nombre très limité.