Une trentaine de camions d’aide humanitaire ont pu entrer dimanche dans la bande de Gaza, où la situation est critique après une panne du réseau cellulaire près de 36 heures et le pillage d’un entrepôt où étaient stockés des biens de première nécessité. En première ligne : les enfants – de jour en jour, le nombre d’entre eux tués sous les bombes continue de grimper.

Ce qu’il faut savoir

L’armée israélienne a déclaré avoir frappé 450 cibles dans la bande de Gaza et continue de déployer des troupes sur le terrain.

Une trentaine de camions d’aide humanitaire ont pu entrer à Gaza, où un entrepôt de l’ONU contenant des denrées de base a été pillé par des gens en détresse samedi.

Environ 1400 Israéliens ont été tués dans l’attaque-surprise du Hamas du 7 octobre dernier et plus de 8000 Gazaouis ont perdu la vie dans les bombardements de la bande de Gaza depuis, pour la plupart des femmes et des mineurs.

Dimanche, les communications ont été rétablies pour la plupart des 2,3 millions d’habitants de Gaza, après qu’un bombardement israélien décrit par les habitants comme le plus intense de la guerre a mis hors service le réseau de téléphonie et l’internet, vendredi soir.

Selon deux responsables américains cités par The New York Times, les États-Unis soupçonnent Israël d’être derrière cette coupure des communications dans la bande de Gaza.

La situation sur le terrain demeure « inimaginable » et frôle le « désastre humanitaire », affirme la directrice générale de Médecins du monde (MdM) Canada, Nadja Pollaert.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

Enfants palestiniens déplacés dans un campement des Nations unies dans le sud de la bande de Gaza

Malgré l’arrivée de quelques camions d’aide humanitaire, ceux-ci sont loin d’être suffisants, trois semaines après le début de la guerre.

Oui, plusieurs gouvernements ont annoncé de l’aide humanitaire, mais comment voulez-vous qu’on fasse [pour qu’elle se rende] si on n’est pas capable d’entrer ou de communiquer avec les centres de santé ?

Nadja Pollaert, directrice générale de Médecins du monde Canada

Depuis vendredi, Médecins du monde n’arrivait plus à communiquer avec son équipe sur place, faute de réseau cellulaire, ajoute Nadja Pollaert. L’organisation réclame un cessez-le-feu immédiat et s’inquiète d’une détérioration rapide de l’état de santé des Gazaouis sans un apport rapide et constant de médicaments, d’eau et de nourriture.

Boire de l’eau salée

Les services de secours du Croissant-Rouge palestinien ont déclaré que des frappes aériennes israéliennes à proximité avaient endommagé des parties d’un hôpital qu’il gère à Gaza après avoir reçu dimanche deux appels des autorités israéliennes lui ordonnant d’évacuer. Mais « s’ils évacuent, on ne sera pas capable de venir en aide » aux habitants de Gaza, s’inquiète Nadja Pollaert.

PHOTO JACK GUEZ, AGENCE FRANCE-PRESSE

Frappes israéliennes sur le nord de la bande de Gaza, dimanche

Pendant ce temps, certains habitants de l’enclave ont commencé à boire de l’eau salée, faute de mieux, relate-t-elle, d’après des informations obtenues auprès de collègues sur le terrain.

« On estime qu’il y a environ 50 000 femmes enceintes à Gaza en ce moment. Or, une femme enceinte qui a des enjeux nutritionnels, ça veut dire des grossesses à risque, des bébés à petit poids et des accouchements précoces. » 

On sait qu’il y a des bébés qui vont mourir dans les prochains jours parce qu’on n’est pas capable de les sauver.

Nadja Pollaert, directrice générale de Médecins du monde Canada

Le conflit est particulièrement cruel pour les mineurs : 40 % des habitants de la bande de Gaza seraient âgés de 15 ans et moins, affirme Nadja Pollaert.

Le nombre d’enfants qui ont été tués dans la bande de Gaza au cours des trois dernières semaines dépasse le nombre annuel d’enfants tués chaque année dans les zones de guerre depuis 2019, a déclaré l’organisme Save the Children, dimanche.

Plus de 3100 enfants seraient morts dans la bande de Gaza, sans compter les 33 morts en Cisjordanie et les 29 en Israël, selon les ministères de la Santé des deux territoires.

PHOTO HATEM MOUSSA, ASSOCIATED PRESS

Un enfant palestinien blessé dans une frappe israélienne est soigné à l’hôpital de Deir el-Balah, dans la bande de Gaza.

« Avec 1000 autres enfants portés disparus à Gaza et que l’on présume enterrés sous les décombres, le nombre de morts est probablement beaucoup plus élevé », a ajouté l’organisation.

Un entrepôt pillé

Autre signe de la détérioration des conditions de vie dans l’enclave, l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a rapporté dimanche que certains de ses entrepôts avaient été cambriolés par des gens désespérés la veille.

Selon un membre de l’agence, Thomas White, ces cambriolages sont « un signe inquiétant que l’ordre civil commence à s’effondrer après trois semaines de guerre à Gaza ».

Dimanche, le patron de la Cour pénale internationale, Karim Khan, s’est rendu au poste frontalier de Rafah, entre l’Égypte et la bande de Gaza, où s’entasse l’aide internationale à destination des civils palestiniens.

PHOTO RONEN ZVULUN, REUTERS

Manna Torpiashvili pleure la disparition de sa fille Tamar, 9 ans, morte à la suite d’une crise cardiaque survenue quand les sirènes alertant d’une frappe imminente sur Israël ont retenti.

« Empêcher l’accès de l’aide humanitaire » pourrait constituer un « crime », a-t-il déclaré aux journalistes sur place. « À Rafah, j’ai vu des camions bloqués, remplis de biens et d’aide humanitaire, loin des bouches affamées et des blessures » des habitants de Gaza, a-t-il ajouté.

Dissensions dans le camp israélien

En parallèle, les dissensions au sein du camp israélien ont éclaté au grand jour dimanche après la publication d’un message du premier ministre, Benyamin Nétanyahou, sur le réseau social X, dans lequel il jetait le blâme sur les responsables de l’armée pour l’attaque du 7 octobre dernier.

Appelé à revenir sur sa déclaration par ses adversaires politiques, le premier ministre a retiré sa publication avant de s’excuser et de déclarer qu’il avait « tort », avant d’ajouter que « tous ensemble, nous gagnerons ».

Pendant ce temps, les chars et l’infanterie israéliens poursuivaient ce que le premier ministre Nétanyahou a qualifié de « deuxième étape » de la guerre déclenchée par l’attaque initiale du Hamas le 7 octobre dernier.

Bien que le nombre de soldats israéliens déployés dans Gaza reste inconnu pour le moment, The New York Times affirme avoir identifié au moins trois endroits par lesquels ils seraient entrés, et ce, grâce à des vidéos publiées par l’armée israélienne, notamment.

Avec l’Agence France-Presse, The New York Times, NBC, Haaretz et The Guardian