Israël, qui a juré d’en finir avec le Hamas après son attaque sanglante le 7 octobre, voit les mises en garde se multiplier quant aux conséquences de ses opérations militaires pour les populations civiles à Gaza.

Ce qu’il faut savoir

Engager une offensive terrestre « massive » dans la bande de Gaza, déjà assiégée et pilonnée sans répit par l’armée israélienne, serait une « erreur », a ainsi jugé mercredi au Caire le président français Emmanuel Macron.

Et si le président américain Joe Biden n’est pas favorable, en l’état, à un cessez-le-feu, comme le réclament les Nations Unies et de nombreux pays, il a lui aussi mis en garde mercredi son allié.

Israël doit faire « tout son possible pour épargner les civils », a-t-il affirmé mercredi depuis la Maison-Blanche.

De nombreux pays réclament une pause humanitaire dans les bombardements incessants menés par Israël, qui s’est juré d’« anéantir » le Hamas palestinien après son attaque sans précédent perpétrée le 7 octobre sur son sol, et prépare son armée à une offensive terrestre pour y parvenir.

« Nous préparons une entrée au sol » dans la bande de Gaza, a confirmé mercredi le chef du gouvernement israélien Benjamin Netanyahou.

« Quand, comment, combien, et les considérations que nous prenons en compte, je ne peux pas rentrer dans le détail », a-t-il ajouté.

« Une erreur »

Tout en affirmant le droit d’Israël à se défendre, le président français a souligné, à l’issue d’une rencontre avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qu’une telle opération, si elle devait être massive, serait alors une erreur parce qu’incompatible avec le droit des populations civiles et aussi parce qu’Israël n’en serait pas mieux protégé.

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L’aide internationale qui commence à arriver dans le territoire palestinien ne représente qu’« une goutte dans un océan de besoins », a lancé mardi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

Lors de déclarations communes devant la presse, le président Sissi a lui appelé Israël à éviter une « invasion terrestre de Gaza » car elle fera « un grand nombre de victimes civiles ».

Une offensive terrestre serait extrêmement périlleuse dans ce territoire très densément peuplé, truffé de tunnels où le Hamas cache armes et combattants, et en présence d’otages.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait déjà appelé mardi à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat » et condamné les « violations claires du droit humanitaire » dans le territoire palestinien, provoquant la colère d’Israël.

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La ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 octobre 2023

700 morts en une journée

L’attaque du Hamas et les représailles de l’armée israélienne dans la bande de Gaza ont fait plus de 1400 morts en Israël, selon les autorités, et plus de 6500 dans le territoire palestinien, selon le mouvement islamiste, majoritairement des civils des deux côtés.

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Un homme porte un enfant alors que les Palestiniens cherchent des victimes sur le site d’une frappe israélienne sur un immeuble résidentiel dans la ville de Gaza.

Le Hamas au pouvoir à Gaza depuis 2007 a affirmé mercredi qu’au moins 700 personnes avaient été tuées en une seule journée.  

L’armée israélienne a affirmé avoir mené « des frappes de grande ampleur », qui ont touché  plusieurs infrastructures terroristes du Hamas «», dont des tunnels.

En outre, 13 personnes ont été tuées en Israël par des tirs de roquettes depuis le 7 octobre, a déclaré mercredi à l’AFP le porte-parole du Magen David Adom, équivalent israélien de la Croix-Rouge.

Le Hamas retient en otage depuis le 7 octobre plus de 220 otages, dont la libération pour « raisons de santé » a été demandée mercredi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

La situation humanitaire dramatique dans le petit territoire de 362 km2 préoccupe également la communauté internationale.

Selon l’OMS, six hôpitaux ont déjà fermé, faute de carburant, dans la bande de Gaza où s’entassent 2,4 millions de Palestiniens dans des conditions désastreuses.  

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La ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 octobre 2023

Organisation « terroriste »

L’ONU réclame d’urgence la livraison de carburant pour faire fonctionner les générateurs dans les hôpitaux où affluent des milliers de blessés, pomper et purifier l’eau et faire circuler les camions.  

Mais Israël s’y refuse, affirmant que cela profiterait au Hamas qu’il considère avec les États-Unis et l’Union européenne comme une organisation « terroriste ».

Le président français a annoncé l’envoi par la France d’un navire militaire pour « soutenir les hôpitaux ». Ce dernier, un navire-hôpital, a appareillé mercredi pour Gaza.

 « Nous avons opéré plusieurs blessés sans anesthésie », a raconté à l’AFP Ahmad Abdul Hadi, un chirurgien orthopédique de l’hôpital Nasser à Khan Younès, une ville du sud de la bande de Gaza.

Selon Mohammed Abu Selmeya, le directeur de l’hôpital Shifa dans la ville de Gaza, le plus grand du territoire, « dix hôpitaux sont déjà hors service » et « plus de 90 % des médicaments et des produits sont épuisés ».  

Pour Washington, un cessez-le-feu « à ce stade ne bénéficierait qu’au Hamas ». La Maison-Blanche a suggéré plutôt des « pauses » pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, une position que devrait rallier les pays de l’Union européenne, réunis jeudi et vendredi en sommet, selon des sources diplomatiques.

La bande de Gaza, petit territoire pauvre s’étendant sur 40 kilomètres le long de la Méditerranée, est soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis 2007. Le 9 octobre, Israël l’a placé en état de « siège complet » et y a coupé l’eau, l’électricité et l’approvisionnement en nourriture.

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Un Palestinien pleure après une frappe israélienne sur la ville de Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 octobre 2023.

 « Rendre des comptes »

Ce siège s’accompagne de bombardements sans relâche par Israël, qui a massé des dizaines de milliers de soldats aux abords de la bande de Gaza et intensifié ses frappes ces derniers jours.

PHOTO MAHMUD HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Distribution de nourriture dans un camp de fortune pour personnes déplacées à Khan Yunès

Le 7 octobre, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré Israël depuis la bande de Gaza, semant la terreur lors de cette attaque d’une violence et d’une ampleur sans précédent depuis la création de l’État d’Israël en 1948.  

Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a reconnu mercredi qu’il devrait lui aussi « rendre des comptes » après cette attaque qui a sidéré le pays.

Au total, quelques dizaines de camions chargés d’aide humanitaire sont arrivés depuis le 21 octobre alors que, selon l’ONU, au moins cent camions par jour seraient nécessaires.

 « Le temps presse. Nous avons un besoin urgent de carburant », a déclaré à l’AFP Juliette Touma, directrice de la communication de l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, qui craint de devoir arrêter ses opérations dès mercredi soir.

Depuis le 15 octobre, l’armée israélienne appelle la population du nord de la bande de Gaza, où les bombardements sont les plus intenses, à évacuer vers le sud.

Mais les frappes continuent aussi de toucher cette partie du territoire, proche de la frontière égyptienne, où sont massés plusieurs centaines de milliers de civils. Mercredi, l’une d’entre elles a touché un supermarché de Rafah dans le sud de la bande de Gaza.

Une autre frappe a tué la famille du principal correspondant à Gaza d’Al-Jazeera, Wael al-Dahdhou, a indiqué mercredi la chaîne qatarie.

Au moins 1,4 million de Palestiniens ont fui leur foyer depuis le début de la guerre, selon l’ONU.   

Frappes contre la Syrie

Après une visite de soutien à Israël puis au président palestinien Mahmoud Abbas en Cisjordanie occupée, M. Macron a rencontré mercredi à Amman le roi Abdallah II de Jordanie, avant de se rendre au Caire.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui annulé mercredi tout projet de visite en Israël, dont il a accusé l’armée de se conduire avec « inhumanité ».  

L’armée israélienne a annoncé mercredi avoir frappé des infrastructures militaires en Syrie en réponse à des tirs vers son territoire. Huit soldats syriens ont été tués, selon les médias officiels syriens.

La tension est très vive aussi en Cisjordanie où plus de cent Palestiniens ont été tués dans des violences depuis le 7 octobre, selon le ministère palestinien de la Santé, ainsi qu’à la frontière d’Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais.  

Le point sur la situation au 19e jour de guerre

La guerre déclenchée par l’attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre en Israël, dont l’armée bombarde depuis en représailles la bande de Gaza, contrôlée par le mouvement islamiste palestinien, est entrée mercredi dans son 19e jour. Voici les derniers développements.

6546 morts à Gaza, 102 en Cisjordanie

Depuis le début de la guerre, les frappes israéliennes ont fait 6546 morts, dont 2704 enfants, et 17 439 blessés dans la bande de Gaza, selon le ministère de Santé du gouvernement du Hamas. L’armée israélienne a affirmé avoir mené dans la nuit « des frappes de grande ampleur » touchant plusieurs infrastructures, dont des tunnels.

En Cisjordanie occupée, plus de cent Palestiniens ont été tués depuis le début le 7 octobre, selon le ministère de la Santé de l’Autorité palestinienne.

Aide à Gaza

L’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens pourrait cesser ses activités mercredi faute de carburant dans la bande de Gaza.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, six hôpitaux ont fermé, par manque de combustible à Gaza où s’entassent 2,4 millions de Palestiniens dans des conditions humanitaires désastreuses.

Quelques dizaines de camions sont arrivés depuis le 21 octobre alors que, selon l’ONU, au moins cent par jour seraient nécessaires.

Cessez-le-feu humanitaire

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé mardi à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat ». Pour Washington un cessez-le-feu « à ce stade-ci ne bénéficierait qu’au Hamas », suggérant plutôt des « pauses » pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.

Macron au Caire après Amman

Le président français Emmanuel Macron poursuit mercredi un déplacement au Proche-Orient visant à prévenir une escalade militaire et à relancer le « processus de paix » pour la création d’un État palestinien.

Après un entretien à Amman avec le roi de Jordanie, il a atterri au Caire pour y rencontrer le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. Ce dernier a appelé à éviter une « invasion terrestre de Gaza » lors d’une conférence de presse commune avec le président Macron.

L’Égypte est un médiateur incontournable pour la libération des plus de 220 otages enlevés en Israël par le Hamas. Elle tient également l’unique ouverture sur le monde de Gaza qui ne soit pas contrôlée par Israël.

Selon les autorités israéliennes, l’attaque du Hamas a tué 1400 personnes en Israël depuis le 7 octobre, dont une majorité de civils.

Erdogan n’ira pas en Israël

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a dit renoncer à tous ses projets de déplacement en Israël et stigmatisé l’incapacité des Occidentaux à arrêter la guerre à Gaza. Il a aussi estimé que le Hamas n’était pas une organisation terroriste et que ses membres constituaient un « groupe de libérateurs ».

Israël a rétorqué en accusant la Turquie de défende « l’organisation terroriste » du Hamas.

Réunion Hezbollah-Hamas-Djihad islamique

Au Liban, le chef du Hezbollah libanais s’est réuni avec des dirigeants du Hamas et du Djihad islamique pour évoquer les moyens de soutenir ces mouvements palestiniens dans leur guerre avec Israël, a indiqué mercredi le mouvement pro-iranien.

Frappes israéliennes en Syrie

Huit soldats syriens ont été tués dans des frappes israéliennes dans le sud du pays, selon les médias officiels syriens. Selon l’armée israélienne, les frappes répondent à des tirs en direction d’Israël mardi.

Israël a mené par ailleurs mercredi un raid contre l’aéroport d’Alep, le 4e depuis le 7 octobre, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) et un responsable syrien.

Le « développement a reculé » à Gaza depuis 2007

Le développement « a reculé » dans la bande de Gaza depuis le début en 2007 du blocus israélien, a affirmé mercredi la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED).