(Jérusalem) Au lendemain des législatives en Israël ayant placé son parti en tête, Benyamin Nétanyahou semblait mercredi en passe de revenir au pouvoir grâce à l’extrême droite, même si les résultats définitifs pourraient changer la donne.

« Nétanyahou cherche une victoire décisive, Lapid espère l’égalité, Ben Gvir fête la victoire », titrait le Yediot Aharonot, le journal israélien le plus vendu.

Après le dépouillement de 87 % des bulletins, selon la commission électorale, le Likoud (droite) de M. Nétanyahou obtient 32 sièges, devant la formation centriste Yesh Atid (« Il y a un futur ») du premier ministre sortant Yaïr Lapid qui récolte 24 sièges, sur les 120 du Parlement.

Les alliés d’extrême droite de M. Nétanyahou, Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir, sont eux arrivés en troisième position avec 14 sièges, soit le double des sièges dont ils disposaient jusqu’alors.

PHOTO GIL COHEN-MAGEN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les alliés d’extrême droite de M. Nétanyahou, Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir, sont eux arrivés en troisième position avec 14 sièges, soit le double des sièges dont ils disposaient jusqu’alors.

Suit le parti de centre droit de l’ex-chef de l’armée Benny Gantz (12 sièges), membre de la coalition sortante.

Avec ses alliés, le bloc de M. Nétanyahou compterait au total 65 sièges, soit quatre de plus que la majorité absolue (61 sièges).  

Mais ces scores pourraient changer à l’annonce des résultats définitifs, notamment en fonction des sièges remportés par les petits partis. Deux listes – un parti arabe israélien et la formation de gauche Meretz – flirtent avec le seuil d’éligibilité.

Les votes des soldats, des diplomates, des prisonniers et autres groupes spéciaux seront dépouillés dans les prochaines heures et les résultats définitifs sont attendus en principe tôt jeudi.

Sans vouloir « spéculer sur un gouvernement qui n’a pas encore été présenté », le département d’État américain a néanmoins dit espérer que « tous les responsables israéliens continueront de partager les valeurs d’une société ouverte, démocratique et porteuse de tolérance et de respect pour toute la société civile, en particulier les groupes minoritaires ».

« Le temps est venu »

Le scrutin s’est déroulé sur fond d’un regain de violences en Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël. Mercredi, l’armée israélienne a tué un Palestinien qui avait grièvement blessé un soldat dans une attaque.

Jugé pour corruption, M. Nétanyahou, 73 ans, le plus pérenne des chefs de gouvernement de l’histoire d’Israël, avait perdu les élections en juin 2021 au profit d’une coalition hétéroclite mise sur pied par Yaïr Lapid.

PHOTO GIL COHEN-MAGEN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Yaïr Lapid

« […] Nous devons attendre les résultats définitifs, mais notre chemin, celui du Likoud, a prouvé qu’il était le bon, nous sommes près d’une grande victoire », a lancé M. Nétanyahou devant ses partisans à Jérusalem.

Son rival, M. Lapid, a lui aussi affirmé que « tant que le dernier bulletin de vote n’est pas compté, rien n’est joué ».

Mais d’emblée, un ancien du Likoud, l’actuel ministre de la Justice Gideon Saar, a prévenu du risque de voir Israël se diriger vers une « coalition d’extrémistes » menée par M. Nétanyahou et ses alliés.

« Le temps est venu pour un gouvernement de droite à part entière. Le temps est venu d’être les maîtres […] dans notre pays ! », a lancé M. Ben Gvir, réitérant son appel à user de la force, notamment contre les Palestiniens.

« Israël est sur le point d’entamer une révolution de droite, religieuse et autoritaire, dont le but est de détruire l’infrastructure démocratique sur laquelle le pays a été construit », s’est alarmé le grand quotidien de gauche Haaretz.

« Absurde »

Pour Lauren Vaturi Moses, 24 ans, restauratrice à Tel-Aviv, « c’est absurde que (Benyamin Nétanyahou) puisse être élu alors qu’il est inculpé et que son procès est en cours ».

Pour ces cinquièmes législatives en trois ans et demi, la classe politique craignait une « fatigue » des 6,8 millions d’électeurs inscrits. Mais le taux de participation a été de 71,3 %, soit le plus élevé depuis 2015.

Dans le système proportionnel israélien, une liste doit obtenir au moins 3,25 % des voix pour entrer au Parlement.

La situation est particulièrement critique pour les partis de la minorité arabe israélienne, hostiles au bloc de droite de M. Nétanyahou.

En 2020, ils avaient obtenu un record de 15 sièges sous une seule bannière. Mais ils se sont cette fois présentés sous trois listes : Raam (islamiste), Hadash-Taal (laïc) et Balad (nationaliste). Si certains n’atteignent pas le seuil d’éligibilité, cela augmentera les chances d’une victoire de M. Nétanyahou.

« Les résultats montrent que Nétanyahou a le plus de chance de former un gouvernement, avec des fascistes à ses côtés », s’est inquiétée Aïda Touma-Suleiman, députée de Hadash-Taal. « Nous sommes profondément préoccupés, car cela témoigne de la direction que prend ce pays et ce qui attend les Palestiniens. »