(Washington) Les États-Unis ont annoncé vendredi annuler des discussions avec les talibans à Doha, au Qatar, en raison de leur décision d’interdire aux filles afghanes d’être scolarisées dans le secondaire.

« Nous avons annulé certains de nos engagements, et notamment des rencontres prévues à Doha à l’occasion du Forum de Doha, et avons clairement dit que nous voyons cette décision comme un potentiel tournant dans notre engagement », a déclaré Jalina Porter, une porte-parole du département d’État américain.

Le Forum de Doha a lieu samedi et dimanche dans la capitale du Qatar.

Les talibans, au pouvoir en Afghanistan depuis août 2021, sont revenus mercredi sur leur décision de permettre aux filles d’étudier dans les collèges et lycées, quelques heures à peine après la réouverture de ces établissements, qui avait été annoncée de longue date et sans fournir d’explication claire, alors que de nombreuses élèves étaient en cours.

« Cette décision des talibans, si elle n’est pas rapidement annulée, nuira profondément au peuple afghan, aux perspectives de croissance économique du pays et à l’ambition des talibans d’améliorer leurs relations avec la communauté internationale », a ajouté la porte-parole.

« Dans l’intérêt de l’avenir de l’Afghanistan et des relations entre les talibans et la communauté internationale, nous exhortons les talibans à respecter leurs engagements envers leur population », a-t-elle poursuivi.

Les États-Unis se tiennent « aux côtés des filles afghanes et de leurs familles, qui considèrent l’éducation comme un moyen de réaliser le plein potentiel de la société et de l’économie afghanes », a-t-elle affirmé.

« Droit universel »

Au Conseil de sécurité de l’ONU, l’ambassadrice des Émirats arabes unis (EAU) Lana Nusseibeh a dénoncé une « décision arbitraire » du nouveau pouvoir afghan, dans une déclaration au nom de dix pays (EAU, Norvège, Albanie, Brésil, France, Gabon, Irlande, Mexique, Royaume-Uni et États-Unis).

Cette décision est « un revirement des engagements pris par les talibans eux-mêmes ces dernières semaines et mois » et « un recul profondément troublant », a-t-elle ajouté.

« L’éducation est un droit universel pour tous les enfants et cela inclut les filles en Afghanistan », a-t-elle affirmé.

La Haute-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, ainsi que la directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, ont également dénoncé ces derniers jours l’interdiction faite aux jeunes Afghanes de retourner à l’école secondaire.

Jeudi, six pays occidentaux ainsi que l’Union européenne avaient appelé dans une déclaration commune les fondamentalistes islamistes à « revenir de toute urgence » sur leur décision.

La France, l’Italie, la Norvège, les États-Unis, le Canada et la Grande-Bretagne, ainsi que le Haut représentant de l’UE, ont prévenu que ce choix aurait des « conséquences bien au-delà de son préjudice pour les filles afghanes », et pourrait nuire à l’ambition de l’Afghanistan « de devenir un membre respecté de la communauté des nations ».  

La Norvège avait accueilli en janvier des discussions entre plusieurs pays occidentaux et les talibans, en quête de reconnaissance internationale et de fonds alors que le pays est plongé dans une grave crise humanitaire.

Depuis leur prise du pouvoir, les talibans ont fortement restreint les droits des femmes à l’éducation et au travail.

La décision d’interdire le retour des filles dans l’enseignement secondaire serait intervenue après une réunion mardi soir de hauts responsables à Kandahar (Sud), berceau et centre de pouvoir de fait du mouvement islamiste fondamentaliste.

Les observateurs craignent que les nouveaux maîtres du pays n’interdisent à nouveau l’école pour les filles, comme ils l’avaient fait lors de leur premier règne, de 1996 à 2001.

Seuls les cours de primaire sont désormais autorisés pour les filles.