(Washington) Joe Biden a confirmé mardi la date du 31 août pour le retrait des forces américaines d’Afghanistan. Une date butoir qui soulève beaucoup de questions.

Pourquoi cette date ?

La date du 31 août a été fixée par le président américain lui-même, avant l’offensive éclair des talibans qui leur a permis de prendre le pouvoir le 15 août.

L’accord conclu entre les fondamentalistes et l’administration de Donald Trump en février 2020 prévoyait un retrait total des forces étrangères au 1er mai.

Lorsqu’il décide à la mi-avril de poursuivre le retrait entamé par son prédécesseur, Joe Biden annonce que toutes les forces étrangères devront avoir quitté le pays « avant que nous ne marquions le 20e anniversaire des attentats haineux du 11-Septembre ».

L’objectif est de retirer les 2500 militaires américains encore sur le sol afghan, plusieurs milliers de militaires de l’OTAN et quelque 16 000 sous-traitants civils avant le 20e anniversaire des attentats ayant conduit les États-Unis à renverser le régime des talibans pour leur soutien à Al-Qaïda.

Mais le choix de cette date symbolique est alors vertement critiqué et Joe Biden avance début juillet la date butoir au 31 août.

Pourquoi est-elle devenue un problème ?

Le report de quatre mois donne le temps aux militaires, qui attendaient depuis janvier la décision de M. Biden, de se retirer de façon ordonnée et aux civils américains ainsi qu’aux Afghans en attente d’un visa d’immigration de s’organiser pour quitter le pays.

Si les militaires mènent alors leurs opérations de retrait tambour battant, ni le département d’État ni la Maison-Blanche ne jugent urgent d’accélérer le processus de délivrance des visas, comptant sur une résistance du gouvernement de plusieurs mois face à l’avancée des talibans.

L’offensive-éclair des insurgés, facilitée par la déroute de l’armée afghane, prend Washington par surprise. Le 14 août, Joe Biden annonce l’envoi de renforts à l’aéroport de Kaboul pour sécuriser l’évacuation de civils.

Le lendemain, le président afghan Ashraf Ghani abandonne le pouvoir aux talibans. Soudain, l’évacuation de milliers de diplomates et civils américains, ainsi que de dizaines de milliers d’Afghans craignant pour leur vie pour avoir coopéré avec les Occidentaux, devient urgente.

Quels problèmes logistiques entraîne-t-elle ?

Les États-Unis annoncent l’envoi de 6000 soldats pour sécuriser l’aéroport et organiser un gigantesque pont aérien, et sont obligés de composer avec les talibans pour tenter de canaliser les foules d’étrangers et d’Afghans qui se précipitent vers l’aéroport pour fuir le pays.

L’opération commence lentement, les militaires américains donnant la priorité à la sécurisation des lieux. Des scènes de panique conduisent l’armée américaine à fermer l’aéroport. Les contrôles d’identité prennent des heures, la foule s’agglutine aux abords de l’aéroport et des milliers de personnes se retrouvent coincées pendant parfois plusieurs jours entre les postes de contrôle des talibans et ceux de l’armée américaine.

Mais l’organisation se met en place peu à peu et les opérations s’accélèrent, avec des rotations aériennes continues, d’avions militaires américains d’abord, puis des armées d’autres pays.

Mardi, 21 600 personnes ont été évacuées en 24 heures. Au total, depuis le début du pont aérien le 14 août, 70 700 personnes ont été évacuées, dont environ 4000 Américains, des ressortissants des pays de l’OTAN et des milliers d’Afghans craignant pour leur vie sous un nouveau régime des talibans.

Quels sont les risques ?

Le président Joe Biden a invoqué mardi le « risque grave et croissant d’une attaque » du groupe djihadiste État islamique pour justifier son refus de repousser la date butoir du 31 août, imposant ainsi une fin de non-recevoir aux Européens qui souhaitaient davantage de temps pour évacuer.

Les talibans eux-mêmes ont menacé les États-Unis de « conséquences » s’ils décidaient de poursuivre les évacuations au-delà du 31 août, qualifiant toute extension du calendrier de « ligne rouge ».

L’armée américaine doit maintenant organiser l’évacuation de ses propres troupes envoyées en renfort tout en protégeant les militaires sur place ainsi que les rotations aériennes, une opération logistique délicate et dangereuse. Le processus prendra « plusieurs jours », a indiqué le porte-parole du Pentagone John Kirby, laissant entendre que les évacuations pourraient s’arrêter avant le 31.  

Washington doit aussi évacuer le millier de soldats américains qui se trouvaient encore à Kaboul le 14 août, ainsi que les quelque 600 soldats afghans qui ont refusé de rendre les armes et qui ont aidé à sécuriser l’aéroport.

M. Biden a cependant souligné que le respect de la date butoir « dépend » de la coopération des talibans pour « permettre l’accès à l’aéroport » des candidats au départ, mettant le nouveau régime de Kaboul en garde contre toute « entrave » à ces opérations.

Il a aussi demandé au Pentagone et au département d’État « des plans d’urgence pour ajuster le calendrier si cela devait être nécessaire ».