En route mardi pour Washington où il doit s’entretenir avec le président Joe Biden, le premier ministre israélien, Naftali Bennett, entend donner un nouvel élan aux relations avec les États-Unis, grand allié de l’État hébreu qui partage la même aversion pour l’Iran.

M. Bennett a quitté Israël dans l’après-midi pour sa première visite d’État depuis sa prise de fonction en juin, durant laquelle il doit renouer avec le camp démocrate au pouvoir à Washington des liens qui s’étaient distendus sous Benyamin Nétanyahou, ouvertement aligné avec les républicains.

Son prédécesseur avait affiché un soutien indéfectible à l’ex-président Donald Trump et sans cesse critiqué l’accord sur le nucléaire iranien, négocié par l’administration Obama lorsque M. Biden était vice-président.

Sur le tarmac de l’aéroport de Tel-Aviv, M. Bennett a déclaré à des journalistes vouloir partager « un nouvel esprit de coopération » avec le président démocrate, qu’il doit rencontrer jeudi.

En juin, lorsqu’il a rencontré son homologue américain Antony Blinken, le chef de la diplomatie israélienne, Yaïr Lapid, avait estimé que « des erreurs avaient été commises ces dernières années » et que « la position bipartisane d’Israël avait été mise à mal ». 

« Nous corrigerons ces erreurs ensemble », avait-il assuré.

Mais certaines questions comme l’Iran restent des sujets de discorde.

Point d’interrogation

« Je dirai au président Biden qu’il est temps d’arrêter les Iraniens, […] de ne pas leur lancer une bouée de sauvetage en réintégrant un accord dépassé sur le nucléaire », a affirmé dimanche M. Bennett, alors que les grandes puissances discutent avec l’Iran pour tenter de sauver ce pacte conclu en 2015.

L’accord, censé encadrer le programme nucléaire iranien, est moribond depuis le retrait unilatéral en 2018 des États-Unis qui ont rétabli de sévères sanctions visant Téhéran. En représailles, l’Iran s’est affranchi de la plupart de ses engagements clés.

Le pacte, auquel sont toujours parties le Royaume-Uni, la Chine, la France, l’Allemagne et la Russie, « n’est plus pertinent », selon M. Bennett.

« Nous présenterons (à Washington) un plan ordonné que nous avons préparé ces deux derniers mois pour freiner les Iraniens », a-t-il ajouté, sans épiloguer.

Israël veut une nouvelle stratégie face au rythme « effréné et inquiétant » auquel Téhéran enrichit de l’uranium ainsi que ses « agressions » dans la région, a affirmé sous le couvert de l’anonymat un haut responsable israélien.

Pour l’heure à Washington, le retour à l’accord « n’est qu’un gros point d’interrogation », a récemment résumé l’émissaire américain pour l’Iran, Robert Malley, au média Politico, alors que les pourparlers pour tenter de relancer le pacte semblent dans l’impasse depuis fin juin.

Le nouveau président iranien, l’ultraconservateur Ebrahim Raïssi, s’est dit ouvert à « tout plan diplomatique » pour une levée des sanctions imposées à son pays, prévenant néanmoins qu’il ne cèderait pas devant une « politique de pression et de sanctions ».

Statut de Jérusalem

Sur la question israélo-palestinienne, il est peu probable que le président Biden ambitionne de raviver un quelconque processus de paix, au point mort depuis 2014, d’après des analystes.

« Si jamais ils parlent des Palestiniens, ils parleront de la façon d’améliorer leurs vies sous l’occupation (israélienne, NDLR), donc rien ne change », estime Ali Jarbawi, professeur de science politique à l’université de Bir Zeit en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 : « Biden ne va pas résoudre le conflit ».

Selon Shira Efron, chercheuse à l’Institut national d’études sécuritaires (INSS) à Tel Aviv, l’administration Biden devrait se contenter de revenir sur certaines décisions pro-israéliennes de M. Trump, comme elle l’a déjà fait en rétablissant des millions de dollars d’aides aux Palestiniens.

Un point de friction pourrait être la volonté de Joe Biden de rouvrir à Jérusalem le consulat général chargé des affaires palestiniennes, fermé par M. Trump malgré la réprobation internationale.

Une réouverture du consulat se heurtera à la vive opposition de Naftali Bennett, « idéologiquement et fondamentalement » engagé en faveur de l’indivisibilité de Jérusalem, estime Eugene Kontorovich, qui a conseillé l’administration Trump sur les questions israéliennes.

Le statut de la Ville sainte est l’un des problèmes les plus épineux du conflit, les Palestiniens souhaitant faire de Jérusalem-Est, occupée depuis 1967 par Israël puis annexée, la capitale de l’État auquel ils aspirent.