(Paris) Les pays au centre des révélations sur le logiciel d’espionnage Pegasus ont réagi en ordre dispersé, du Maroc qui va porter plainte pour diffamation, à la Hongrie et au Mexique qui ont ouvert une enquête, en passant par l’Arabie saoudite qui a rejeté les accusations la visant.   

De son côté, Emmanuel Macron a demandé, au cours d’un Conseil de défense exceptionnel, « un renforcement » de la sécurité des moyens de communication sensibles, tandis que les investigations se poursuivaient en France après les révélations sur la présence de téléphones du président français parmi les cibles potentielles de ce système conçu par la société israélienne NSO.

Quant à la chancelière allemande Angela Merkel, elle a appelé à davantage de restrictions sur la vente de logiciels espions.

Les organisations Forbidden Stories et Amnistie internationale ont obtenu une liste de 50 000 numéros de téléphone, sélectionnés par les clients de NSO depuis 2016 pour être potentiellement surveillés, et l’ont partagée avec un consortium de 17 médias qui ont révélé son existence dimanche.

Le Parlement israélien a mis en place une commission pour enquêter sur des allégations selon lesquelles Pegasus a été utilisé à « mauvais escient » par certains États pour espionner des personnalités, a révélé jeudi un député.

Recours à la justice

Accusé d’avoir utilisé Pegasus, le Maroc a décidé d’attaquer Amnistie et Forbidden Stories devant le tribunal correctionnel de Paris, a annoncé jeudi son avocat.

Le royaume chérifien a « mandaté Me Olivier Baratelli pour délivrer, dès aujourd’hui, deux citations directes en diffamation » à leur encontre.

Le procès ne devrait toutefois pas avoir lieu avant environ deux ans.

« L’État marocain entend immédiatement saisir la justice française car il souhaite que toute la lumière soit faite sur les allégations mensongères de ces deux organisations qui avancent des éléments sans la moindre preuve concrète et démontrée », a souligné Me Baratelli.

Dès lundi, le gouvernement marocain s’était défendu en démentant avoir acquis des « logiciels informatiques pour infiltrer des appareils de communication ».  

Enquêtes

Parallèlement, le parquet général du Maroc a fait part mercredi de « l’ouverture d’une enquête judiciaire sur ces fausses allégations et accusations ».

En Hongrie, « à la suite de plusieurs plaintes, le bureau du procureur (de Budapest, NDLR) a ordonné qu’il soit procédé à une enquête sur la collecte potentielle non autorisée d’informations confidentielles », a déclaré jeudi le parquet.  

Les investigations visent à établir les faits et à déterminer si un crime et, le cas échéant, lequel, a été commis, a-t-il ajouté.

Le consortium de médias internationaux à l’origine des révélations sur Pegasus a accusé les autorités de ce pays d’utiliser cette technologie d’espionnage contre la société civile hongroise.

300 téléphones intelligents de journalistes, d’avocats, d’élus ou d’hommes d’affaires y ont été ciblés, selon le réseau Forbidden Stories, un cas unique au sein de l’Union européenne.

Au Mexique, « toutes les agences de sécurité fédérales et étatiques pouvant disposer d’équipements logiciels pour effectuer des communications ont reçu l’ordre de protéger toutes leurs données en lien avec la passation d’un contrat de licence pour l’équipement Pegasus et d’autres (équipements) similaires », a annoncé mardi le parquet qui a ouvert une enquête à ce sujet.

Selon le site internet d’information Aristegui Noticias, au moins 15 000 numéros de téléphone mexicains ont été enregistrés dans ce système

Démentis officiels

L’Arabie saoudite a rejeté les accusations d’espionnage portées à son encontre dans le cadre de l’affaire Pegasus.

« Un responsable a démenti les allégations parues dans la presse selon lesquelles une entité du royaume (d’Arabie saoudite) aurait utilisé un logiciel pour surveiller les communications », a écrit l’agence de presse officielle saoudienne SPA mercredi, sans préciser le nom du logiciel en question.

Les Émirats arabes unis, qui contrairement à l’Arabie saoudite ont officiellement normalisé leurs relations avec Israël, ont à leur tour rejeté, jeudi, les accusations d’espionnage.

« Les allégations faites récemment par des médias prétendant que les Émirats font partie d’un certain nombre de pays accusés de surveillance ciblant des journalistes et des particuliers sont dénuées de preuves et catégoriquement fausses », a déclaré le ministère émirati des Affaires étrangères.