(Ottawa) Un rapport indépendant canadien sur l’écrasement d’un Boeing ukrainien, abattu en janvier au-dessus de Téhéran, estime mardi que l’Iran ne devrait pas être autorisé à « enquêter sur lui-même » et appelle à changer les règles de l’aviation civile en la matière.

« La partie responsable enquête sur elle-même, principalement en secret, ce qui n’inspire pas confiance », relève ce rapport de plus de 70 pages rédigé par un ancien ministre de Justin Trudeau, Ralph Goodale, conseiller spécial du gouvernement sur ce drame.

Le vol PS 752 d’Ukraine International Airlines à destination de Kiev s’était écrasé peu après son décollage de la capitale iranienne le 8 janvier, tuant les 176 personnes à bord, dont 85 citoyens ou résidents permanents canadiens.

Après trois jours de démentis, les forces armées iraniennes avaient reconnu avoir abattu l’avion par « erreur », en pleine montée des tensions entre Washington et l’Iran.

« Un grand nombre de renseignements importants sur cet horrible évènement demeurent inconnus », note le rapport, citant notamment les raisons pour lesquelles l’espace aérien iranien est resté ouvert le soir du drame.

« Cet état de fait est imputable à l’Iran, qui n’a pas encore prouvé – jusqu’à présent, à tout le moins – que ses enquêtes (sécurité, violations au droit pénal ou autres) sont véritablement indépendantes, objectives et transparentes », poursuit le document.

Début novembre, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) avait appelé l’Iran à « accélérer son enquête » et à publier son rapport final sur l’écrasement. Le Canada avait annoncé début octobre la mise en place de sa propre équipe d’enquêteurs pour « collecter et analyser » les informations disponibles sur le drame.

M. Goodale appelle à une remise en cause des normes internationales actuelles qui confient la direction de l’enquête sur un accident d’avion au pays où survient l’écrasement.

« Dans le cas d’un avion abattu par l’armée, ça signifie que le même gouvernement associé à la survenance de la catastrophe (l’Iran en l’occurrence) a la pleine maîtrise de l’enquête sur la sécurité, malgré les conflits d’intérêts évidents, avec peu de garanties d’assurer l’indépendance, l’impartialité ou légitimité », déplore le document.

« Cette situation mine la crédibilité de l’enquête et crée un sentiment d’impunité en ne répondant pas aux questions essentielles », écrivent les auteurs du rapport. « L’aptitude de la communauté internationale à appliquer des mesures efficaces pour empêcher des catastrophes semblables est donc compromise ».

Le premier ministre Justin Trudeau a salué ce rapport et appelé l’Iran à « répondre de manière approfondie, avec des preuves à l’appui » aux questions qu’il soulève.