(Ramallah) « Il n’y a pas un Palestinien ou un Arabe qui va accepter que Jérusalem soit à Israël », lance dans un café Firas Ladadwa, un jeune Palestinien aux yeux rivés sur la télévision retransmettant à Ramallah la présentation du plan de paix américain pour le Moyen-Orient.

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Dans le centre de cette ville, siège de l’Autorité palestinienne, comme dans la bande de Gaza, des centaines de Palestiniens ont conspué Trump et son plan. Des heurts avec les forces israéliennes ont fait au moins 13 blessés en Cisjordanie occupée.

Qualifié de « meilleur ami qu’Israël n’ait jamais eu » par le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, le président américain Donald Trump a invité mardi les Palestiniens à une « vie meilleure », à réduire le chômage chez les jeunes et à créer un État palestinien démilitarisé, dans son plan annoncé depuis Washington et sans leader palestinien à ses côtés.

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Le président américain Donald Trump et le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou

Mais un point particulièrement sensible a rapidement fait sourciller Firas Ladadwa : le statut de Jérusalem, « al-Quds » en arabe.

Le président Trump, qui avait déjà infléchi la position américaine en décembre 2017 en reconnaissant Jérusalem comme capitale de l’État israélien, a affirmé mardi que la ville allait « rester la capitale indivisible d’Israël ».

D’un même souffle, il a appelé à la création d’un État palestinien avec une capitale à « Eastern Jerusalem », ce qui peut être compris comme Jérusalem-Est. Mais cela peut aussi être compris comme l’est de Jérusalem, soit des localités, comme Abou Dis, techniquement situées à Jérusalem, mais du côté oriental de la barrière de sécurité séparant Israël des Territoires palestiniens.

Bref, hors de ce que nombre de Palestiniens considèrent vraiment comme Jérusalem.  

« Quiconque acceptera ce plan est un traître », tranche M. Ladadwa, 23 ans.  

« Ce plan ne passera pas, comme ceux d’avant, il ne peut réussir tant qu’il n’est pas au diapason des aspirations du peuple palestinien », juge de son côté Mohammed al-Najjar, 69 ans.

« Ce que Trump a annoncé n’a été accepté par aucun Palestinien, il s’agit de mots vides qu’aucune partie arabe ou palestinienne ne peut accepter, en particulier en ce qui concerne Jérusalem », ajoute cet homme qui a un brin sursauté à l’annonce qu’« al-Quds » serait entièrement israélienne selon le plan américain.

Et Mohammed était, lui, en accord avec son président Mahmoud Abbas qui a affirmé que le plan américain ne « passera pas ».   

« Il est impossible pour n’importe quel enfant, arabe ou palestinien, d’accepter de ne pas avoir Jérusalem », comme capitale d’un État palestinien, a déclaré M. Abbas.  

Les milliards ?

Le président américain a promis des milliards en investissements dans le futur État palestinien, qui serait notamment amputé de la vallée stratégique du Jourdain.

Dans le centre de Ramallah, environ 200 personnes sont réunies mardi soir pour brûler un faux billet vert géant.  D’autres étaient réunis à la sortie de la ville, brûlant des photos de Donald Trump et de Benyamin Nétanyahou et d’autres lançant des pierres en direction de soldats israéliens qui ont répliqué avec des tirs de gaz lacrymogènes.

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Ces heurts ont fait une dizaine de blessés.  

Des manifestations ont aussi repris dans d’autres secteurs de la Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza, contrôlée par le mouvement islamiste Hamas, qui a aussi rejeté le plan de Trump.

« Aujourd’hui nous disons que nous rejetons ce plan. Nous n’accepterons pas de substitut à Jérusalem comme la capitale de l’État de Palestine », a déclaré à l’AFP Khalil al-Hayya, un haut responsable du Hamas.

Selon des responsables à Ramallah et Gaza, le chef du Hamas a discuté au téléphone en soirée avec Mahmoud Abbas d’une réaction concertée au projet américain.    

Fait rare, le Hamas, pourtant hostile à l’Autorité palestinienne, a participé à une rencontre du leadership palestinien à Ramallah.  Les Palestiniens ont appelé à une réponse unie au projet américain.

D’autres manifestations sont prévues mercredi contre le plan américain qui pourrait raviver un conflit israélo-palestinien resté à l’ombre des « printemps arabes », du conflit en Syrie et de la crise avec l’Iran ces dernières années.