La situation demeurait confuse mardi soir dans le nord de l'Afghanistan, théâtre d'un massacre de civils chiites et d'une prise d'otages massive dont les autorités rendent responsable une coalition des talibans et du groupe État islamique.

Les responsables de la province excentrée de Sare-Pul ont annoncé mardi soir la libération de 235 otages, sur un nombre inconnu de personnes disparues au sein d'un village chiite attaqué samedi, dans lequel une cinquantaine de personnes ont été massacrées.

«Ce soir 235 personnes ont été libérées dont des femmes et des enfants du village de Mirza Olong, après médiation des anciens et des responsables» de la province de Sare-Pul, a indiqué à l'AFP le porte-parole du gouverneur, Zabihullah Amani.

«Ils ont été évacués sains et saufs vers Sare-Pul City (la capitale provinciale, NDLR), mais il reste un nombre inconnu d'otages dans le village», a ajouté ce porte-parole.

Une source de sécurité, refusant d'être identifiée, a indiqué à l'AFP qu'il pourrait y avoir «encore au moins une centaine de civils» coincés dans ce village.

M. Amani avait évoqué précédemment «au moins 150 familles emmenées» samedi en otages par les assaillants.

«235 otages ont été libérés. Ils sont tellement choqués qu'ils ne peuvent parler», a confirmé pour sa part le gouverneur de la province à la chaîne Tolo News, Mohammad Zaher Wahdat.

En revanche, a-t-il ajouté, «malgré les efforts des anciens, les corps des victimes n'ont pu être retrouvés».

Les autorités provinciales ont avancé lundi le chiffre de 50 civils massacrés, dont des femmes et des enfants, certains décapités, ou forcés de se jeter dans le vide.

Les informations sont rares et difficiles, le village est totalement coupé du monde après que les assaillants ont raflé tous les téléphones, selon les responsables locaux.

«Les autorités de Sare-Pul City nous ont indiqué que les terroristes avaient emporté tous les téléphones, personne n'est plus en mesure de joindre» ce district, a également indiqué à l'AFP Sediq Sediqqi, porte-parole du gouvernement.

«Tuer des innocents»

Les autorités afghanes ont dénoncé lundi une opération menée conjointement par les talibans, qui ont pris le district de Sayad au terme de 48 heures de combats samedi, et le groupe État islamique qui s'en serait pris aux civils du village chiite de Mirza Olong.

Les talibans qui ont revendiqué dimanche la prise de contrôle du district de Sayad, verrou stratégique à une quinzaine de km de la capitale provinciale, ont démenti «fermement» toute coopération avec l'EI.

Mais pour le gouverneur, «dans les autres provinces, les talibans et Daech (acronyme arabe de l'EI) ne coopèrent pas, mais ici à Sare-Pul, ils se sont mis ensemble pour tuer des innocents».

L'armée afghane a affirmé avoir dépêché mardi des renforts de troupes et des commandos des forces spéciales vers la province, mais les autorités locales démentent avoir vu la moindre contre-offensive. Et sur les réseaux sociaux, la communauté chiite hazara se déchaîne et crie au «génocide», estimant être abandonnée par le gouvernement de Kaboul.

«Les commandos (des forces spéciales) ont été déployés, des frappes aériennes sont actuellement conduites, et les commandants sur le terrain font tout pour reprendre la zone», a affirmé mardi soir à l'AFP le porte-parole du ministère de la Défense, le général Dawlat Waziri.

«Malheureusement nous n'avons aucun signe d'une contre-offensive pour reprendre Mirza Olong» l'a contredit M. Amani depuis Sare-Pul.

Les rares récits parvenus du village martyr font état d'atrocités visant les civils chiites, femmes, enfants et vieillards compris.

«Selon les bilans reçus du terrain environ 50 personnes, en majorité des civils, ont été massacrées (...) elles ont été exécutées, abattues par balle et pour certaines, décapitées».

«Certains ont été forcés à se jeter dans le vide» depuis des falaises dans cette région montagneuse, avait rapporté M. Amani, évoquant des méthodes employées notamment en Syrie par l'EI.