Vingt-cinq personnes ont péri samedi en Afghanistan dans deux attentats perpétrés dans l'est du pays et la capitale, de nouvelles attaques sanglantes qui surviennent au moment où Kaboul tente de ramener les talibans à la table des négociations.

Comme souvent, les talibans, qui ont endossé la responsabilité de l'attentat de Kaboul, se sont attaqué à un symbole du pouvoir central en envoyant un kamikaze se faire exploser face au ministère de la Défense, dans le centre-ville.

«Douze personnes, dont deux soldats afghans, ont été tuées et 8 autres blessées», a indiqué le ministère de la Défense dans un communiqué. «Des femmes et des enfants figurent parmi les blessés», a précisé Abdul Rahman Rahimi, le chef de la police de Kaboul.

«J'ai vu des civils et des soldats blessés. Ils nous appelaient à l'aide, mais les forces de sécurité ne nous ont pas laissés nous approcher», a indiqué à l'AFP Sardar Mohammed, un témoin de l'attaque. «La plupart des victimes étaient des civils qui sortaient du travail», a ajouté Saleh Mohammed, un autre passant.

D'après les analystes, les talibans multiplient les attentats au coeur de la capitale afghane pour pouvoir peser lors de chimériques négociations de paix avec Kaboul, leur ennemi juré qu'ils combattent depuis la chute de leur régime en 2001.

Ils n'ont en revanche pas revendiqué un premier attentat qui a secoué dans la matinée Asadabad, chef-lieu de la province de Kunar, dans l'est du pays. Treize civils ont été tués et 40 autres blessés dans cette attaque qui visait un chef tribal farouchement opposé aux insurgés, selon un porte-parole du gouverneur et le chef adjoint de la police provinciale. Le chef tribal, Haji Khan Jan, a péri dans l'attentat commis par un kamikaze à moto devant un marché.

Les talibans ne revendiquent généralement pas les attentats qui font de nombreuses victimes civiles, car ils prétendent ne s'attaquer qu'aux soldats afghans, des «larbins» des puissances étrangères, et aux troupes de l'OTAN, considérées comme des «envahisseurs», ainsi qu'aux symboles du pouvoir central.

Mais les civils payent un très lourd tribut aux violences qui déchirent leur pays. L'année 2015 a été la plus sanglante pour eux depuis que l'ONU a commencé en 2009 à compter le nombre d'Afghans tués ou blessés dans le conflit. La guerre a fait au total 11 002 victimes civiles, dont 3545 morts, l'an dernier, selon son rapport annuel.

Désunion des talibans

Les deux attaques de samedi font encore vaciller un peu plus les espoirs d'une reprise du processus de paix avec les talibans, laborieusement mis en branle depuis le début de l'année avec l'appui de la Chine, le Pakistan et les États-Unis.

Les quatre pays s'attendent à un dialogue direct entre les talibans et Kaboul d'ici à la semaine prochaine. Mais «l'échéance est totalement irréaliste, d'autant que les talibans disent ne pas avoir été contactés» par le quartette, explique à l'AFP Thomas Ruttig, spécialiste de la rébellion au Réseau des analystes sur l'Afghanistan (AAN) basé à Kaboul.

Kaboul ne cesse d'appeler «tous les groupes talibans» à s'asseoir à la table des négociations, mais le président Ashraf Ghani a aussi dit que son gouvernement «ne fera pas la paix avec ceux qui tuent des civils».

Un premier round de négociations directes avait eu lieu l'été dernier au Pakistan, mais une seconde édition avait été reportée sine die à l'annonce de la mort du mollah Omar, le fondateur du mouvement.

Son successeur, le mollah Akhtar Mansour, ne fait pas l'unanimité. Un contingent non négligeable de cadres et de combattants ont fait sécession en décembre dernier. Au même moment, le mollah Mansour était blessé dans une fusillade déclenchée par une querelle entre cadres au Pakistan.

En dépit de ces guerres intestines, les talibans sont loin d'avoir rendu les armes. Depuis la fin de la mission de combat de l'OTAN en Afghanistan fin 2014, ils ont au contraire multiplié les attentats et les offensives sur le terrain.