Le sort de Raif Badawi est toujours entre les mains de la Cour suprême d'Arabie saoudite, même si le plus haut tribunal du pays a réitéré récemment la sentence imposée au jeune blogueur. Amnistie internationale a confirmé hier que le dossier n'avait toujours pas été renvoyé en première instance, ainsi qu'il aurait dû l'être.

C'est un appel téléphonique qui a ravivé l'espoir d'Ensaf Haidar, la femme de Raif Badawi, il y a quelques jours. Au bout du fil, un homme déclarant être le représentant du gouvernement saoudien l'a informée que la Cour suprême étudiait toujours le cas de son mari.

La jeune femme, qui a trouvé refuge à Sherbrooke avec les trois enfants qu'elle a eus avec le désormais célèbre blogueur, souhaite que cela ouvre enfin la porte à une réduction de la peine de son mari.

Pourtant, le 7 juin dernier, le plus haut tribunal du pays avait maintenu la sentence imposée à Raif Badawi par la cour pénale de Djedda, près de La Mecque, et confirmée par la cour d'appel de la capitale, Riyad: 10 ans de prison et 1000 coups de fouet.

«Le dossier n'a jamais quitté la Cour suprême depuis qu'il a été confirmé en juin, explique Colette Lelièvre, d'Amnistie internationale. Normalement, le dossier de Raif, après la décision de la Cour suprême, aurait dû être transféré à la cour de première instance pour l'application de la peine, mais manifestement, le dossier n'a pas été envoyé à cette cour-là et ils l'ont toujours en main.»

Maintenant, que cela signifie-t-il? «Ça, c'est une autre question!», s'exclame Mme Lelièvre, ajoutant qu'il est «impossible d'y répondre».

«C'est une nouvelle occasion d'essayer de présenter des arguments pour obtenir sa libération», se réjouit pour sa part Édouard Delaplace, directeur des affaires juridiques d'Avocats sans frontières Canada (ASFC).

L'organisme fournit, avec le Barreau du Québec, un soutien à la représentante légale de Raif Badawi, en Arabie saoudite. Au cours des prochains jours, il mettra d'ailleurs la touche finale à un mémoire destiné aux autorités saoudiennes.

Silence diplomatique

Joint par téléphone, un représentant de l'ambassade d'Arabie saoudite à Ottawa a raccroché après que le représentant de La Presse s'est identifié.

Ottawa a pour sa part indiqué n'avoir «aucun détail supplémentaire» sur ce nouveau rebondissement, a écrit dans un courriel à La Presse un porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

«Il importe que le gouvernement canadien intervienne directement», a déclaré hier à Sherbrooke le chef bloquiste Gilles Duceppe, lors d'une rencontre avec Ensaf Haidar.

«C'est une période cruciale, a-t-il ajouté. Nous ne sommes pas là pour tenter d'attaquer le gouvernement. C'est plutôt le temps de lui demander d'intervenir dans le cadre de la révision pour que M. Badawi soit libéré.»

De passage en Allemagne, lundi, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel Al-Jubeir avait déclaré que Riyad «ne tolérerait aucune interférence extérieure» dans le dossier de Raif Badawi, considérant qu'il s'agit d'affaires intérieures.

- Avec Jonathan Custeau, La Tribune