L'avocate iranienne Nasrin Sotoudeh, emprisonnée pour son action en faveur des droits de l'Homme, a été libérée mercredi avec d'autres opposants politiques, une semaine avant un discours très attendu devant l'ONU du nouveau président Hassan Rohani.

M. Rohani, un religieux modéré élu en juin, a promis plus de liberté dans son pays, où plusieurs milliers de personnes ont été arrêtées pendant la contestation ayant suivi la réélection de l'ex-président Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009.

Interrogée par l'AFP peu après sa sortie de prison, Mme Sotoudeh a confirmé qu'elle était «libérée définitivement». Elle a la «permission» de reprendre son métier d'avocate et continuera à défendre les droits de l'Homme, a-t-elle assuré.

Elle s'est dit en «bonne» forme physique et psychologique malgré des conditions de détention difficiles en raison notamment de «la pression psychologique, l'atmosphère sécuritaire pesante et le fait de ne pas pouvoir passer des appels téléphoniques».

Le chef de la diplomatie britannique, William Hague, s'est félicité de sa libération, disant «espérer voir d'autres améliorations dans le domaine des droits de l'Homme en Iran sous le gouvernement du président Rohani».

Le président du Parlement européen, Martin Schulz, a salué le «signal positif important» des autorités après la libération de Mme Sotoudeh, lauréate en 2012 du prestigieux prix Sakharov décerné par les eurodéputés.

La Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et Amnesty International ont pour leur part appelé le gouvernement iranien à libérer «tous les prisonniers de conscience».

D'abord spécialisée dans la défense des jeunes condamnés à mort pour des faits commis alors qu'ils étaient mineurs, Nasrin Sotoudeh, née en 1963, a défendu de nombreux opposants politiques à partir de 2009.

En janvier 2011, cette mère de famille a été condamnée à 11 ans de prison et 20 ans d'interdiction d'exercer son métier pour «actions contre la sécurité nationale et propagande contre le régime», deux chefs d'accusation utilisés fréquemment par la justice iranienne pour condamner des opposants.

Elle a également été condamnée pour son appartenance au Centre des défenseurs des droits de l'Homme (CDDH) de la prix Nobel de la Paix Shirin Ebadi, bête noire du régime iranien et qui vit désormais en exil.

Sa peine a été ramenée en appel à six ans de prison en septembre 2011, selon Amnesty International.

Grèves de la faim

Incarcérée à la prison d'Evine, dans le nord de Téhéran, où sont regroupés de nombreux prisonniers politiques, l'avocate a mené plusieurs grèves de la faim pour protester contre ses conditions de détention et contre une interdiction de voyager visant sa famille.

La dégradation de son état de santé avait suscité l'inquiétude de nombreuses organisations humanitaires, de l'ONU et de l'UE.

Selon l'agence Isna, treize autres personnalités arrêtées pendant le mouvement de contestation de 2009 ont été libérées.

Isna cite notamment Mohsen Aminzadeh, vice-ministre des Affaires étrangères de l'ex-président réformateur Mohammed Khatami (1997-2005), condamné pour sa participation à des rassemblements et pour avoir donné des interviews à des médias étrangers, le responsable réformateur Fayzollah Arabsorkhi, ainsi que le journaliste réformateur Mahsa Amirabadi.

Ces libérations ne sont pas «sans lien avec le discours que doit prononcer le président Hassan Rohani à l'Assemblée générale des Nations unies» le 24 septembre à New York, a indiqué à l'AFP une source au sein du courant réformateur, ajoutant que «d'autres libérations pourraient suivre».

Le nouveau président a prôné plus d'ouverture en Iran, une politique de rapprochement avec l'Occident et des «négociations sérieuses» avec les grandes puissances sur le programme nucléaire controversé de Téhéran.

M. Rohani a été élu le 14 juin grâce au soutien des réformateurs, qui avaient appelé à la libération des opposants à M. Ahmadinejad. Les deux principaux dirigeants de l'opposition, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, sont en résidence surveillée depuis février 2011.

Fin politicien, M. Rohani a soigneusement évité le sujet pendant la campagne, même si des portraits de M. Moussavi étaient apparus dans une de ses réunions politiques.

MM. Karoubi et Moussavi, candidats malheureux de 2009, avaient dénoncé des fraudes massives et appelé leurs partisans à descendre dans la rue. Les manifestations avaient été durement réprimées, faisant plusieurs dizaines de morts.