Des opposants bahreïnis, inspirés par les manifestations ayant abouti à la chute du président égyptien Mohamed Morsi, prévoient de manifester mercredi à Manama malgré les mises en garde du pouvoir.

En prévision de ce rassemblement prévu près de l'ambassade des États-Unis, le roi Hamad ben Issa Al-Khalifa a interdit les manifestations dans la capitale de Bahreïn, pays secoué depuis 2011 par un mouvement de contestation chiite.

Le groupe Tamarrod («rébellion» en arabe), du même nom que celui qui a mobilisé en Égypte, continue d'appeler à manifester. Début août, il avait écrit à l'ambassade américaine lui demandant de garantir la sécurité des manifestants qui ont l'intention de se rassembler devant ses portes.

Pour Tamarrod, «cela relève de la responsabilité morale des États-Unis», qui utilisent Bahreïn comme base pour leur Ve Flotte et sont de proches alliés des Al-Khalifa, la dynastie sunnite au pouvoir dans ce petit royaume à majorité chiite.

Le groupe dit vouloir instaurer «une démocratie réelle à l'instar de celles qui existent aux États-Unis et au Royaume-Uni». Depuis le début de la contestation, l'opposition réclame l'instauration d'une réelle monarchie parlementaire.

Le département d'État n'a pas voulu «spéculer sur ce qui pourrait ou sur ce qui ne pourrait pas se dérouler» mercredi, mais sa porte-parole adjointe Marie Harf a rappelé que les États-Unis «soutenaient le droit de se rassembler pacifiquement et le droit à la liberté d'expression, y compris à Bahreïn».

«Nous restons très préoccupés par la poursuite d'incidents violents à Bahreïn et nous exhortons toutes les parties à (...) contribuer à créer un climat de dialogue et de réconciliation», a-t-elle plaidé.

Selon des experts, l'instauration d'une monarchie parlementaire à Bahreïn conduirait à un gouvernement dominé par les chiites, ce que n'accepterait pas l'Arabie saoudite, puissant voisin sunnite qui redoute de voir l'influence de l'Iran chiite s'étendre dans la région.

«Préserver notre pays du chaos»

Les sunnites bahreïnis craignent pour leur part de connaître le sort des sunnites irakiens, qui sont eux aussi restés longtemps au pouvoir - bien que minoritaires dans la population - et accusent aujourd'hui les chiites qui dominent le gouvernement de les marginaliser.

Les actes de violence se sont récemment multipliés, en particulier contre les forces de police. Et le 18 juillet, un attentat à la voiture piégée avait eu lieu dans le stationnement d'une mosquée d'une localité sunnite, non loin du palais royal.

«Nous devons vaincre le terrorisme», a clamé samedi le premier ministre Khalifa ben Salmane Al-Khalifa, oncle du roi et en poste depuis plus de 40 ans. «Nous devons préserver notre pays du chaos et des destructions qui affectent tant d'autres.»

Le roi Hamad vient de durcir les sanctions contre les auteurs d'«actes terroristes» et ceux qui y incitent, qui pourront désormais être déchus de la nationalité bahreïnie. Les peines de prison ont été alourdies pour ceux qui participent à des manifestations non autorisées et même pour les parents qui laisseraient leurs enfants mineurs s'y rendre.

Amnesty International a dit craindre que ces nouvelles lois soient «utilisées pour légitimer l'usage de la force afin de réprimer des protestations pacifiques» et exhorté les autorités à éviter tout recours à la force. L'ONG Reporters sans frontières s'est pour sa part inquiétée de ce qu'elle a décrit comme une «recrudescence des traitements abusifs contre les journalistes», disant aussi craindre un «blackout» des autorités sur la manifestation.

L'ONU a également appelé Bahreïn à «respecter ses obligations internationales en matière de droits de l'homme, y compris celles concernant la liberté d'expression et de rassemblement pacifique».

Selon la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), au moins 80 personnes ont été tuées depuis le début de la contestation en 2011.

Opposition et pouvoir sont engagés dans un dialogue national qui doit reprendre le 24 août, sans réelle perspective de progrès.