La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a fait pression jeudi à Kaboul sur les talibans, sommés de négocier sous peine «d'être attaqués sans répit» et sur le Pakistan, où elle devait se rendre dans la soirée pour lui demander d'en faire plus contre les rebelles chez lui.

Mme Clinton s'est exprimée dans l'après-midi à l'issue d'un entretien avec le président afghan Hamid Karzaï dans la capitale afghane, où elle était arrivée mercredi soir pour une visite-surprise.

«Ensemble (Afghanistan et États-Unis) nous renforçons notre pression sur les talibans pour rendre plus net le choix qu'ils ont à faire: prendre part à l'avenir pacifié de l'Afghanistan et mettre fin à 30 ans de guerre, ou être attaqués sans répit», a-t-elle déclaré.

«Nous irons vous chercher dans vos sanctuaires», du côté afghan comme du côté pakistanais de la frontière, a-t-elle averti, alors que Washington a admis officiellement pour la première fois à la mi-octobre être en «guerre» au Pakistan, où il multiplie les tirs de drones contre les talibans et Al-Qaïda.

La secrétaire d'État est arrivée dans la soirée à Islamabad, disant espérer que le gouvernement pakistanais «prenne la tête de la guerre contre le terrorisme», alors que Washington a haussé le ton ces derniers mois contre son allié pakistanais, l'accusant de ne pas en faire assez contre les réseaux islamistes, et notamment les talibans afghans établis côté pakistanais de la frontière.

Fait exceptionnel, Mme Clinton est accompagnée du nouveau chef de la CIA, le général David Petraeus, ancien commandant des forces internationales en Afghanistan, et du nouveau chef d'état-major de l'armée américaine, le général Martin Dempsey. Ils doivent rencontrer jeudi soir et vendredi les principaux responsables politiques et militaires pakistanais.

Depuis des mois, les États-Unis pressent en vain Islamabad d'attaquer les sanctuaires du réseau taliban Haqqani, sa bête noire et cible numéro un en Afghanistan, dans le district tribal pakistanais du Waziristan du Nord.

Mme Clinton a confirmé jeudi qu'une «vaste opération militaire» était en cours dans l'Est afghan, le long de la frontière, contre ce groupe insurgé afghan, considéré par les Américains comme le maître d'oeuvre de plusieurs attaques spectaculaires récentes, dont une contre l'ambassade des États-Unis à Kaboul à la mi-septembre.

Kaboul avait annoncé mardi le lancement de cette offensive menée par l'OTAN et les forces afghanes.

Des mesures sont également en train d'être prises contre les circuits de financement du groupe, selon Mme Clinton.

«Mais nous savons qu'il opère depuis un sanctuaire au Pakistan», a-t-elle souligné. «La question est désormais de savoir quelle coopération les Pakistanais fourniront pour s'attaquer à ces sanctuaires», a-t-elle ajouté.

Le chef de la diplomatie américaine attend également «des Pakistanais qu'ils soutiennent les efforts de pourparlers». Le Pakistan «peut jouer un rôle constructif ou destructeur» pour convaincre les insurgés talibans de négocier, a-t-elle poursuivi.

Islamabad, parrain historique des talibans lorsqu'ils étaient au pouvoir (1996-2001), est accusé de continuer à les soutenir pour défendre ses intérêts en Afghanistan, et y lutter notamment contre l'influence de l'Inde, son ennemi héréditaire, allié des États-Unis et du gouvernement afghan.

M. Karzaï a de son côté répété penser que la «véritable autorité dirigeant et contrôlant les talibans» se trouvait au Pakistan et a appelé à «refocaliser» les efforts de paix, non plus sur les talibans, mais sur le Pakistan.

De nombreux experts de la rébellion estiment que le commandement taliban, en fuite depuis la chute de son régime à la fin 2001, se cache au Pakistan.

«Si nous ne prêtons pas attention aux sanctuaires et à moins que nous ne nous adressions à la véritable autorité qui dirige et contrôle tout cela, nous ne pourrons avoir un processus de paix réussi ou une campagne contre le terrorisme réussie», a souligné le président afghan.