Samedi matin, 20 000 de ses partisans se sont massés dans le centre de la ville sainte chiite de Najaf, au sud de Bagdad, pour ne pas perdre une miette de la rhétorique populiste du jeune chef radical, qui donnait son premier discours depuis son retour surprise mercredi.

Toujours coiffé du turban noir des descendants du Prophète, il a réaffiché le même nationalisme, la même opposition inébranlable à «l'occupation américaine», tout en appelant les Irakiens à faire bloc derrière le gouvernement d'union nationale auquel son courant participe.

Né dans les années 1970 à Koufa, au sud de Bagdad, Moqtada est le fils de Mohammed Sadek Sadr, héraut d'un chiisme militant devenu une doctrine populiste et socialisante, que Saddam Hussein a fait assassiner avec deux de ses fils, en 1999. Le cousin de son père, Mohammad Baker, était un grand penseur chiite, lui-même éliminé en 1980 par le dictateur.

Et c'est grâce à son nom qu'il a été propulsé, à partir de 2003, à la tête de la «résistance» chiite à l'occupation de son pays par les forces de la coalition emmenée par les États-Unis.

Peu après l'invasion, il crée son Armée du Mahdi, rapidement devenue la plus puissante des milices irakiennes avec 60 000 combattants.

Les stratèges américains, qui avaient mésestimé son influence dès le début de leur occupation, ont dû prendre rapidement la mesure de sa puissance.

En 2004, de violents combats ont opposé les troupes américaines à l'armée du Mahdi à Najaf. Les miliciens ont été défaits mais ont établi leur réputation de combattants prêts à l'ultime sacrifice.

Et en décembre 2006, les généraux américains considéraient encore que Moqtada Sadr était la plus grave menace à la stabilité de l'Irak.

C'est à peu près à cette période que Sadr part en Iran, pour se consacrer notamment à des études religieuses dans la ville sainte de Qom.

Mais il conserve la main sur ses partisans en Irak. Après plusieurs semaines de combat contre les forces américaines et irakiennes dans son bastion de Sadr City, à Bagdad, au printemps 2008, il met fin aux opérations de sa milice.

Mais son exil volontaire et la démobilisation de ses forces paramilitaires ne marquent pas la fin de son influence.

Aux législatives de mars 2010, son courant renforce son poids parlementaire avec 39 sièges contre 30 auparavant. Et Moqtada Sadr va jouer un rôle crucial pour sortir de la crise politique liée à l'incapacité des partis à forger une coalition de gouvernement.

La première expérience gouvernementale des sadristes avait été avortée au bout de quelques mois en 2007 quand ils s'étaient retirés du premier gouvernement de Nouri al-Maliki, accusant ce dernier de «collaboration».

Mais malgré sa rancune tenace à l'égard de Nouri al-Maliki, pour la répression menée en 2008 contre l'Armée du Mahdi, Moqtada Sadr choisit en septembre de soutenir le sortant, lui donnant un avantage décisif sur ses rivaux.

Aujourd'hui, six ministres sont issus des rangs sadristes, de même qu'un des deux vice-présidents du Parlement.

Moqtada Sadr est en outre à la tête d'une vaste organisation sociale.