Hans Olsson s’excuse de son retard en avalant un repas léger, attrapé sur le pouce.

Une réunion de dernière minute s’est ajoutée à son horaire, explique-t-il par-dessus le brouhaha de la cafétéria.

C’est une semaine occupée pour le conseiller principal à l’Association suédoise pour l’éducation sexuelle, qui nous reçoit un après-midi gris dans ses bureaux de Stockholm.

C’est « Sex Week ».

Tous les mois de février, l’organisation anime pendant cinq jours des séminaires sur divers thèmes de l’éducation sexuelle.

Cette année, plus de 800 personnes – en majorité des enseignants – se sont inscrites.

Au programme : comment adapter l’éducation sexuelle aux jeunes vivant avec une déficience intellectuelle ? Et aux nouveaux arrivants ? Comment déconstruire les normes de masculinité ? Expliquer le consentement ?

En Suède, l’organisation est la référence en matière d’éducation sexuelle. Le gouvernement la consulte, les écoles la sollicitent, les élèves la connaissent.

Chaque année, elle rencontre en moyenne 20 000 d’entre eux dans le cadre de ses activités. Il arrive d’ailleurs régulièrement qu’elle reçoive la visite de délégués étrangers venus se renseigner sur ses pratiques.

« Des gens du Japon, de la Corée du Sud, de la France… », énumère Hans Olsson.

Une ressource pour les nouveaux arrivants

Depuis une quinzaine d’années, son équipe travaille notamment à rendre l’éducation sexuelle accessible aux nouveaux arrivants.

C’est une réalité avec laquelle doivent composer de plus en plus les enseignants – et pas seulement en Suède : comment parler de sexualité à un jeune migrant qui parle à peine la langue d’accueil ?

On ne peut pas présumer qu’il comprend tout ou qu’il vient d’un pays où l’éducation sexuelle est obligatoire depuis les années 1950.

Sonja Ghaderi, cheffe de projet à l’Association suédoise pour l’éducation sexuelle

Étalés devant elle, une pile de livres colorés destinés aux jeunes immigrants. « L’éducation sexuelle en suédois facile », titre l’un d’entre eux.

La Suède est le pays européen qui a accueilli le plus de migrants par habitant pendant la crise migratoire de 2015. Des dizaines de milliers de jeunes réfugiés avaient intégré les écoles.

« Heureusement, la majorité de notre matériel avait été produit avant la crise. Nous avions une bonne fondation », note Sonja Ghaderi.

Aux écoles avec des classes d’accueil, l’Association suédoise pour l’éducation sexuelle offre un programme d’éducation sexuelle de neuf heures divisé en trois séances.

Elle propose également des formations pour les enseignants qui travaillent régulièrement avec cette population.

Ce n’est pas tout : un glossaire exhaustif traduit en 16 langues est également disponible sur son site.

Il est possible d’y trouver des expressions comme « histoire d’un soir », « fétiche » ou « euphorie de genre » traduits en arabe, en somali ou en russe.

« Vous ne devriez pas avoir à attendre d’apprendre le suédois pour accéder à ces informations », estime Sonja Ghaderi.

La division en hausse

Récemment, l’Alberta a adopté un projet de loi rendant le consentement parental obligatoire en ce qui concerne l’éducation sexuelle.

La même tendance s’observe ailleurs : plusieurs pays occidentaux sont confrontés à une opposition de plus en plus forte à l’éducation sexuelle.

Et, à plus petite échelle, la Suède n’y échappe pas.

« Il y a quelques groupes très vocaux. Ils proviennent de groupes religieux, mais aussi d’une certaine droite très nationaliste. C’est nouveau », observe Hans Olsson.

« Je ne dirais pas que c’est un gros problème, mais nous craignons qu’il ne le devienne davantage dans l’avenir », dit-il.

Même son de cloche du côté de l’Agence nationale pour l’éducation.

« Certains groupes sont plus critiques. De la désinformation circule en ligne sur le contenu du curriculum. Pour l’instant, cela n’affecte pas notre travail. Mais c’est un signe des temps », conclut Teresa Fernández Long.