(Landrecies, France) À Landrecies, dans le nord de la France, la commune a eu une idée inédite pour faire se rencontrer enfants et personnes âgées. Ceux qui le souhaitent peuvent venir dîner à la cantine scolaire chaque mardi. C’est déjà un succès.

C’est à celui qui courra le plus vite et qui, un peu timide tout de même, leur demandera en premier de s’installer à leur table. En ce matin de septembre, les élèves de la commune de Landrecies, dans le nord de la France, retrouvent leurs habitudes à l’heure du midi après les vacances d’été. Et leurs amis… de tous âges.

Guy Bellavoine, Roland Pruvot et Andrée Goutin sont à l’entrée de la cantine scolaire. « Ça va, Gabin ? », lance Roland Pruvot à l’attention d’un élève de 10 ans, qu’il connaît déjà. Un autre tente de remémorer à Andrée Goutin, les cheveux blancs bien coiffés, comment faire un « check » (geste de salutation qui s’apparente au fist bump, ou poing contre poing). Le trio d’aînés a le sourire aux lèvres.

Faire dîner, une fois par semaine, les aînés volontaires de la commune parmi les 130 élèves de 3 à 10 ans dans le restaurant scolaire. L’idée s’est imposée l’année dernière. « On l’avait en tête depuis l’élection, en 2020, mais la COVID-19 l’a empêché », explique Fanny Richard, mairesse adjointe chargée des écoles. Pour l’instant, et depuis janvier 2023, cinq places sont réservées chaque mardi pour les plus de 65 ans de la commune. Une initiative portée par le Conseil des aînés, auquel sont élus les trois visiteurs du jour.

Avec mon épouse, on a toujours fait partie des parents d’élèves. Même en retraite, je voulais continuer et prolonger ce contact avec les enfants.

Roland Pruvot, qui fêtera bientôt ses 70 ans

Même constat pour « monsieur Guy », comme l’appellent les enfants. L’ancien cheminot a passé sa carrière à organiser des voyages pour enfants et pour personnes âgées. Sa retraite est donc dans la continuité. Tous continuent d’en apprendre un tas sur les enfants de la nouvelle génération, et à leur enseigner tout autant.

« On a parfois droit à des questions indiscrètes », rit Guy Bellavoine. Du genre de celles auxquelles il vaut mieux laisser les parents répondre. Le décalage générationnel – qui a pu faire dire aux enfants que « si t’avais pas assez de cadeaux à Noël quand tu étais petit, Guy, il fallait les commander sur l’internet ! » – fait « suivre les faits de société » avec les enfants, estime Roland Pruvot.

À l’heure de passer à table, les estomacs sont souvent plus affamés du côté des élèves. Quand Roland cède volontiers une moitié de son dessert, Andrée conseille à tous de bien s’hydrater et sert toute la tablée d’un grand verre d’eau. Autour d’elle, Lily trouve cela « incroyable » d’avoir l’occasion de dîner avec de « vieilles personnes ». La jeune fille de 9 ans explique ne plus voir autant sa grand-mère. « Ça fait du bien d’être avec des personnes âgées », résume-t-elle. Du côté de Guy Bellavoine, les garçons fans de sport ont « cru [qu’ils] ne [pourraient] pas manger avec monsieur Guy aujourd’hui ». Trop convoité, tout comme la « cantine de Landrecies qui doit être la plus connue du monde », blague Hugo.

C’est vrai que depuis le lancement du dispositif, le restaurant scolaire ne cesse de recevoir du monde. Les médias, mais aussi les villages alentour qui ont décidé de suivre l’exemple de Landrecies. « C’est super simple à mettre en place, assure Fanny Richard. Une régie – pour encaisser les 8 euros dus pour le repas afin d’être équitable et de ne pas concurrencer les restaurants locaux –, un système de réservation et la volonté, c’est pas compliqué ! » La commune ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Prochaine étape : inviter les aînés directement dans les salles de classe pour les faire participer au cours de mathématiques et d’orthographe. Ils devront être à la hauteur pour rivaliser avec les écoliers. À leurs cahiers !