(Moscou) L’Occident cherche à « diviser pour mieux régner », a dénoncé dimanche Vladimir Poutine, justifiant l’offensive militaire du Kremlin contre l’Ukraine qui dure depuis plus de 10 mois pour permettre, selon lui, « l’union du peuple russe ».

Cependant à Kyiv, au lendemain de bombardements meurtriers dans le sud du pays, les orthodoxes ukrainiens fêtaient Noël, un signe fort de défiance envers les autorités religieuses russes, qui célébreront elles la naissance de Jésus-Christ dans deux semaines.

PHOTO RENATA BRITO, ASSOCIATED PRESS

Des artistes du Théâtre de l’Opéra de Kyiv ont offert le concert Christmas in Shelter sur une scène sous terre, le 24 décembre.

« Tout est basé sur la politique de nos adversaires géopolitiques, qui visent à diviser la Russie, la Russie historique », a dénoncé Vladimir Poutine dans un entretien dont un court extrait a été diffusé dimanche à la télévision russe.

Le président russe utilise régulièrement le concept de « Russie historique » pour justifier l’intervention militaire en Ukraine par le besoin de rassembler Ukrainiens et Russes, qui ne formeraient qu’un seul et même peuple.

« “Diviser pour mieux régner” : ils ont toujours essayé de le faire, ils essaient de le faire maintenant, mais notre objectif est tout autre : unir le peuple russe », a-t-il affirmé.

Selon Vladimir Poutine, l’armée russe « agit dans la bonne direction » en Ukraine.

Et il a promis que les troupes russes élimineraient le système de défense antiaérienne Patriot, que Kyiv a obtenu cette semaine des Américains après l’avoir réclamé pendant plusieurs semaines.

« Bien sûr, nous allons le détruire, à 100 % ! », a lancé Vladimir Poutine, trois jours après avoir affirmé que son armée trouverait « un antidote » pour contrer « ce système assez vieux ».

Outre le système Patriot, le président ukrainien Volodymyr Zelensky est reparti de sa visite aux États-Unis avec une promesse d’enveloppe de 45 milliards de dollars d’aide prévue dans le prochain budget fédéral américain.

Si l’état-major russe a confirmé viser la conquête de la totalité de la région industrielle de Donetsk, Volodymyr Zelensky a lui juré vouloir reprendre les quatre régions ukrainiennes annexées fin septembre par la Russie – Donetsk, Louhansk, Zaporijjia, Kherson –, ainsi que la péninsule de Crimée, annexée en 2014.

Fin d’année « sombre »

Dans sa prise de parole quotidienne, Volodymyr Zelensky a fustigé les « terroristes » russes qui ont mené des bombardements samedi contre le centre-ville de Kherson, ville du Sud de l’Ukraine reprise le 11 novembre après huit mois d’occupation par les troupes de Moscou.

Le marché central et des rues adjacentes ont été bombardés, faisant au moins 10 morts et 55 blessés, un acte de « terreur » selon M. Zelensky.

Le président ukrainien a remercié « tous ceux venus à Kherson pour aider » à « sauver les blessés » et plus globalement tous ceux qui font fonctionner le pays malgré le conflit.

PHOTO FOURNIE PAR LA RÉGION ADMINISTRATIVE DE KHERSON VIA ASSOCIATED PRESS

Des voitures ont pris feu lorsqu’une frappe russe a touché le centre de Kherson, le 24 décembre.

Il a aussi appelé les Ukrainiens à se préparer à de nouvelles attaques d’ici la fin de l’année. « Nous devons être conscients que notre ennemi va essayer de rendre ce moment sombre et difficile ».

Sur l’ensemble de la journée, la Russie a tiré 41 missiles sur la ville, selon un bulletin matinal de l’armée ukrainienne.

Vladimir Saldo, le chef de l’administration prorusse de Kherson, a, lui, imputé l’attaque à l’armée ukrainienne, fustigeant « une provocation écœurante visant bien sûr à faire accuser les forces armées de la Fédération de Russie ».

Rejet de « l’influence russe »

Dimanche à Kyiv, des orthodoxes ont fêté Noël, aux côtés des catholiques.

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Un service orthodoxe à Kyiv, le 24 décembre

« La guerre nous a amené tellement de chagrin », a confié à l’AFP dans une église du centre-ville une fidèle, Olga Stanko. « On ne peut pas rester sous l’influence russe », a-t-elle ajouté, alors que le conflit militaire s’est déplacé ces dernières semaines sur le terrain religieux.

L’Ukraine, un pays dont la population est en majorité orthodoxe, est en effet divisée entre une Église dépendant du Patriarcat de Moscou – qui a annoncé rompre ses liens avec la Russie fin mai du fait de l’offensive russe – et une Église indépendante de la tutelle russe.

Créée fin 2018, cette dernière a prêté allégeance au Patriarcat œcuménique de Constantinople, qui a son siège à Istanbul.

Selon un sondage Interfax-Ukraine réalisé en novembre, 44 % des Ukrainiens disaient approuver l’idée de fêter Noël le 25 décembre plutôt que le 7 janvier, date du Noël orthodoxe.

Lors de son traditionnel message de Noël place Saint-Pierre à Rome, le pape François a lui appelé à « faire taire les armes » sur le sol ukrainien.

« Que le Seigneur nous rende prêts à des gestes concrets de solidarité pour aider ceux qui souffrent, et qu’il éclaire l’esprit de ceux qui ont le pouvoir de faire taire les armes et de mettre fin immédiatement à cette guerre insensée ! », a déclaré le souverain pontife.