(Madrid) La vague de chaleur en Europe occidentale continue dimanche de provoquer des incendies de forêt dévastateurs et devait se poursuivre en début de semaine, où elle pourrait faire tomber plusieurs records de température en France et en Grande-Bretagne.

Cette vague de chaleur est la deuxième en à peine un mois en Europe. La multiplication de ces phénomènes est une conséquence directe du réchauffement climatique selon les scientifiques, les émissions de gaz à effet de serre augmentant à la fois leur intensité, leur durée et leur fréquence.

En France, en Grèce, au Portugal et en Espagne, des incendies ont brûlé des milliers d’hectares, forçant des milliers d’habitants et de touristes à fuir leurs résidences, et ont tué la semaine dernière plusieurs membres des services de secours et de lutte contre les incendies.

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Un incendie de forêt près de Landiras, dans le sud-ouest de la France

Le feu regagnait en intensité dimanche soir en Gironde dans une France écrasée de chaleur, où une « apocalypse de chaleur » est attendue lundi sur la façade ouest, avec 15 départements en « vigilance rouge » canicule.

Le pic de cette 45e vague de chaleur recensée en France depuis 1947 est attendu lundi, avec des « ribambelles de records », notamment en Bretagne et dans les Landes, a indiqué Météo France lors d’un point de presse.

En Gironde, les feux regagnaient du terrain dans la soirée : au total, 13 000 hectares de végétation ont brûlé depuis mardi et 2100 personnes ont été évacuées dans la commune de Cabanac-et-Villagrains, dans le secteur de Landiras, a indiqué la préfecture.

Selon les pompiers, ces nouvelles évacuations préventives portent à 16 200 le nombre de vacanciers qui ont dû plier bagage en urgence depuis mardi.

À la Teste-de-Buch, « la situation se dégrade. Le feu est arrivé à la mer et se dirige vers le sud. », selon un tweet la préfecture, qui appelle à être « extrêmement prudent ».

Sur les réseaux sociaux, des internautes ont publié des photos et vidéos, prises depuis la mer, de cet immense brasier « haut de 30 mètres » dévorant la plage de la Lagune, au sud de la dune du Pilat.

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Un incendie de forêt près de Landiras, dans le sud-ouest de la France

Trois avions supplémentaires

« De gros moyens sont en train d’être déployés sur le secteur. Le feu ne devrait toutefois pas atteindre le département des Landes, car le vent devrait tourner vers l’ouest et le nord », signale à l’AFP le lieutenant-colonel Arnaud Mendousse.

Dans un communiqué, le ministère de l’Intérieur annonce des renforts, avec « dès ce soir, trois avions supplémentaires » pour appuyer les six bombardiers déjà engagés, ainsi que « 200 sapeurs-pompiers supplémentaires […] avec 11 camions lourds ».

Dans l’après-midi, un syndicat de pilotes de l’aviation civile avait demandé plus d’avions et de personnel disponibles : « À l’heure où je vous parle, on n’a pas les avions qu’on devrait avoir », avait affirmé à l’AFP Christophe Govillot, porte-parole du Syndicat national du personnel navigant de l’aéronautique civile (SNPNAC).

L’enfer n’est pas terminé sur la façade ouest, qui sera frappée lundi à la mi-journée par le pic caniculaire.

L’alerte « rouge » émise dimanche, qui recommande aux habitants des zones concernées d’observer une « vigilance absolue » face à des « phénomènes dangereux d’intensité exceptionnelle », concerne les départements suivants : Charente, Charente-Maritime, Côtes-d’Armor, Dordogne, Finistère, Gers, Gironde, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Morbihan, Deux-Sèvres et Vendée.

51 départements sont par ailleurs en vigilance orange (ce qui signifie « soyez très vigilants ») et le reste de la France — à l’exception de la Corse-du-Sud — est en jaune (« soyez attentifs »).

La journée de lundi pourrait être l’une des plus chaudes jamais enregistrées en France. « Dans certaines zones du Sud-Ouest, ce sera une apocalypse de chaleur », a déclaré à l’AFP François Gourand, prévisionniste à Météo France.

« Il y a énormément de records attendus demain : en Bretagne, avec peut-être jusqu’à 40 °C à Brest », ce qui serait un record absolu, mais aussi dans les Landes, où « la forêt landaise sera au-dessus des 42 °C et peut-être jusqu’à 44 °C », a déclaré le prévisionniste Olivier Proust lors du point presse.

PHOTO PATRICIA DE MELO MOREIRA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un avion déverse de l’eau sur un incendie près de Bustelo, dans le nord du Portugal.

« Nuit vraiment torride »

La nuit de lundi à mardi sera brûlante dans tous les départements en rouge : « On va avoir une nuit vraiment torride », avec des minimales ne descendant pas en dessous de 25 ou 26 °C au plus frais de la nuit, a-t-il ajouté.

Dès mardi à 6 h, la vigilance rouge devrait être levée, alors que la chaleur refluera depuis l’Atlantique vers l’Est. Mais de fortes chaleurs devraient perdurer dans le sud-est.

Sous l’effet de la chaleur, des pics de pollution sont à attendre, notamment de la Bretagne à la Provence-Alpes-Côte d’Azur, selon Prev’air, plateforme nationale de prévision de la qualité de l’air.

Partout, la chaleur aggrave les risques d’incendie : en Loire-Atlantique, un « violent feu de végétation » a débuté dimanche à Montrelais : « Le feu a brûlé 35 hectares de pinède entre l’autoroute A11 et la Loire » et « devrait être circonscrit dans la soirée », selon la préfecture. Par précaution, « quelques habitants vivant dans des hameaux proches de la zone incendiée ont été évacués ».

Jusqu’à 43,4 °C en Espagne

En Espagne, une vingtaine d’incendies de forêt font toujours rage et restent hors de contrôle dans différentes parties du pays, du sud jusqu’à l’extrême nord-ouest en Galice, où les incendies ont jusqu’à présent détruit environ 4400 hectares de végétation cette semaine, selon les autorités.

PHOTO ISABEL INFANTES, REUTERS

De la fumée couvre le ciel au-dessus de la réserve naturelle de Garganta de los Infiernos, en Espagne.

Dans l’extrême sud, un feu qui s’était déclaré vendredi dans les montagnes des Mijas, près de la ville côtière de Malaga, était sous contrôle dimanche soir, a annoncé le président d’Andalousie, Juan Manuel Moreno.

L’incendie a détruit près de 2000 hectares, selon les autorités locales, et provoqué l’évacuation de plus de 3000 habitants, mais 2000 ont pu depuis regagner leurs maisons et d’autres devraient suivre, selon M. Moreno.

Dimanche, le thermomètre a atteint 39° à Madrid, 39,7° à Séville (sud), et un maximum de 43,4° à Don Benito près de Badajoz (est).  

Un homme de 50 ans est mort dimanche, victime d’un coup de chaleur, alors qu’il marchait dans la rue à Torrejon de Ardoz, près de Madrid, selon les services d’urgence. Quand les secours sont arrivés, l’homme était en « arrêt cardiorespiratoire » avec une température corporelle de 40 °C. Un employé de la voirie de 60 ans est mort la veille à Madrid après un coup de chaleur également.  

Le Portugal connaissait lui une accalmie : dimanche, pour la première fois depuis le 8 juillet, les températures n’y ont pas dépassé les 40 degrés, selon le service national météorologique (IPMA), après avoir atteint jeudi un record historique pour juillet de 47 °C.

Accalmie également sur le front des incendies : un seul foyer important, près de Chaves à l’extrême nord du pays, était considéré comme actif et « pratiquement maîtrisé » sur 90 % de son périmètre selon la protection civile portugaise.  

Néanmoins, la quasi-totalité du territoire portugais présentait dimanche un risque « maximal », « très élevé » ou « élevé » aux incendies, en particulier les régions centre et nord.

Selon le dernier bilan connu des autorités portugaises, les incendies de la dernière semaine ont fait deux morts et une soixantaine de blessés. Ils ont ravagé entre 12 000 et 15 000 hectares de forêt et broussailles depuis le début de la canicule.

Alerte rouge au Royaume-Uni

Plus au nord de l’Europe, au Royaume-Uni, l’agence météorologique nationale a émis la toute première alerte « rouge » pour chaleur extrême, mettant en garde contre un « risque pour la vie ». Le Met Office a déclaré que dans le sud de l’Angleterre, les températures pourraient dépasser les 40 degrés pour la première fois lundi ou mardi.

Le gouvernement britannique a été accusé dimanche de ne pas prendre au sérieux cette vague de chaleur, après que le premier ministre démissionnaire Boris Johnson a raté une réunion de crise sur le sujet à Downing Street, et que son adjoint Dominic Raab a semblé se réjouir d’avoir pour la première fois plus de 40 degrés en Angleterre.

Aux Pays-Bas, l’Institut néerlandais pour la Santé publique et l’Environnement (RIVM) a annoncé dimanche un Plan National Chaleur et une alerte au smog en vigueur à partir de lundi sur l’ensemble du pays, prévoyant une hausse des températures dans les prochains jours, jusque 35 degrés lundi dans le sud et jusqu’à 38 degrés à certains endroits mardi.

Ailleurs dans le monde, les températures extrêmes ont aussi provoqué des incendies de forêt, notamment dans le nord du Maroc où une personne est décédée et où la moitié des quelque 4660  hectares touchés est partie en fumée, et dans l’ouest du Canada.