Un ancien interprète afghan de l’armée canadienne qui avait fui les talibans cet été, mais qui s’était ensuite retrouvé coincé en Ukraine avec sa famille au début de l’invasion russe, a finalement réussi à fuir la zone des combats et à se réfugier en Pologne cette semaine.

Jawed Haqmal faisait partie du groupe d’anciens interprètes qui avait fui l’Afghanistan cet été parce que son travail auprès de l’armée canadienne le mettait en danger. Lorsque les talibans avaient pris Kaboul, il avait eu du mal à se rendre jusqu’à l’aéroport, en raison des barrages dressés par des hommes armés et des mouvements de foules en proie à la panique.

Des militaires des forces spéciales canadiennes se trouvaient à l’aéroport de Kaboul à ce moment, mais leurs supérieurs avaient refusé qu’ils sortent en ville pour aller chercher les anciens interprètes. Grâce à l’intervention d’un journaliste du Globe and Mail qui s’était donné pour mission d’aider les anciens interprètes, Jawed Haqmal et sa famille ont pu être secourus par des militaires ukrainiens qui les ont conduits à Kyiv, en attendant qu’ils poursuivent leur chemin vers le Canada.

Mais la bureaucratie canadienne a mis plus de six mois à traiter son dossier, si bien que Jawad Haqmal s’est retrouvé coincé avec sa femme enceinte et une dizaine d’autres membres de sa famille dans la capitale ukrainienne au début de l’attaque russe.

« J’ai fui une guerre, et maintenant, je suis pris dans une nouvelle guerre », laissait-il tomber lors d’une entrevue téléphonique avec La Presse en direct de l’Ukraine, vendredi dernier.

C’est la même situation qu’en Afghanistan, avec des explosions, des sirènes, des routes bloquées, des gens qui pleurent et qui courent dans la rue.

Jawed Haqmal

Mercredi, l’ancien interprète a confirmé à La Presse qu’il avait réussi à fuir avec ses proches en Pologne. En entrevue avec le Globe and Mail, il a expliqué avoir donné les bagues en or de sa femme et de sa mère en gage à une autre famille qui lui a prêté de l’argent pour faire le voyage. Il a aussi affirmé avoir dû payer des gardes à l’approche de la frontière, mais avoir pu ensuite entrer sans mal en Pologne, où sa famille a été accueillie dans un centre d’accueil pour réfugiés.

Il a aussi expliqué que son intention était maintenant de demander l’asile en Allemagne, puisqu’après six mois d’attente, il n’espère plus que les autorités canadiennes lui permettront de venir s’établir au Canada. Après avoir porté l’uniforme canadien et risqué sa vie aux côtés des soldats du Royal 22e Régiment de Valcartier pendant des années à Kandahar, il est déçu d’avoir cru aux promesses du gouvernement canadien, qui disait vouloir aider ses anciens collaborateurs à fuir les talibans. Sa décision de quitter son pays était basée sur cette promesse, mais elle ne s’est jamais concrétisée et l’avenir de sa famille demeure flou.

« Malheureusement, je n’ai plus aucune confiance en ce gouvernement qui m’a mis dans la pire situation », a-t-il laissé tomber dans un message envoyé à La Presse.