(Marín) Drapeaux en berne, rubans noirs et familles éplorées, le port espagnol de Marín affichait sa douleur après la mort ou la disparition de 21 marins pêchant au large du Canada dans l’un de ses chalutiers.

Sur l’avenue principale bordant le port de cette ville de 24 000 habitants, située dans la région de Galice (nord-ouest), un grand panneau lumineux affiche en noir et blanc : « Tout notre soutien au Villa de Pitanxo ».

Ce chalutier de 50 mètres de long, dont Marín est le port d’attache, a sombré mardi à 450 kilomètres des côtes de l’île de Terre-Neuve, dans les eaux glacées de l’Atlantique, avec 24 marins à bord, 16 Espagnols, 5 Péruviens et 3 Ghanéens.  

PHOTO GOUVERNEMENT ESPAGNOL, VIA ASSOCIATED PRESS

Le chalutier espagnol Villa de Pitanxo.

Seuls trois d’entre eux ont pu être secourus, neuf corps ont été repêchés et douze sont toujours portés disparus. Ce naufrage est la pire tragédie pour la pêche espagnole depuis près de 40 ans.  

« Il faut continuer à chercher »

À Marín, les familles des disparus réclament que la zone du naufrage continue à être ratissée jusqu’à ce que tous les corps soient repêchés alors que les autorités canadiennes ont stoppé mercredi les recherches, faute de résultats et en raison d’une météo extrêmement difficile.

PHOTO AVIATION ROYALE CANADIENNE, VIA AGENCE FRANCE-PRESSE

Cette photo obtenue du Centre conjoint de coordination de sauvetage à Halifax, montre en membre de l’équipage d’un hélicoptère de recherche et sauvetage canadien, à la recherche de survivants d’un chalutier de pêche espagnol qui a coulé au large de Terre-Neuve.

« Il faut continuer à rechercher les corps, on ne peut pas laisser 12 personnes tombées à l’eau », a dénoncé John Okutu, oncle d’Edemon Okutu, l’un des marins ghanéens du chalutier, porté disparu.

« Si le Canada ne peut pas poursuivre les recherches, les Espagnols doivent continuer à chercher les corps, c’est ce que nous demandons en tant que familles », a-t-il insisté, devant le siège de la société Nores, propriétaire du chalutier, où plusieurs proches des marins tentaient d’obtenir des informations et étaient pris en charge par des psychologues de la Croix-Rouge.  

« Qu’ils continuent à le chercher, je vous en prie », a également imploré Kevin Franco, père de Rogelio Franco, l’un des marins péruviens du « Villa Pitanxo ». « Nous voulons avoir des informations […] Depuis l’accident, nous ne savons rien ».

Une demande relayée par le président régional de la Galice, Alberto Núñez Feijóo, qui a appelé les autorités espagnoles et canadiennes à reprendre les recherches, au moins pendant 24 heures.

« Il y a beaucoup de disparus et ils méritent un dernier effort », a-t-il dit.  

En visite à Marín, le ministre de la Pêche, Luis Planas, a assuré être en « contact étroit avec les autorités canadiennes en vue de profiter de toute opportunité pouvant exister » pour continuer les recherches.

« En état de choc »

« Mes enfants sont effondrés », a confié à l’AFP Carolina, épouse de Jonathan Calderón, un autre pêcheur péruvien de 39 ans porté disparu, en disant espérer « qu’ils trouvent tous les corps car c’est très important pour les familles ».

Jonathan, avec qui elle avait parlé lundi et qui n’avait pas fait mention du mauvais temps, « connaissait bien (la mer), il avait travaillé en Uruguay, puis dans les Maldives, et appartenait depuis 12 ans à l’équipage du Pitanxo ».

« Mon petit-fils est en état de choc, il croit que son père va venir, mais ma petite-fille semble l’avoir accepté car elle dit “Papa est mort” », a ajouté, en larmes à ses côtés, la mère de Carolina.

L’ADN des « gens de la mer »

Marchant le long du port sous une pluie battante, María Dolores Polo, conseillère juridique de 52 ans, dit, le visage grave, « ressentir une très grande tristesse pour ces gens qui sont partis en mer et ne reviennent pas… » et dont les corps ne seront probablement pas récupérés.  

En face du port, la mairie de Marín a mis ses drapeaux en berne et observé une minute de silence pour les victimes mercredi soir.

« Nous, les gens de la mer, savons ce que c’est que de vivre dans l’incertitude, cela fait partie de notre ADN, comme l’eau salée, la pêche ou la culture maritime », a écrit la mairie dans un communiqué.