Il y a 70 ans jour pour jour, Élisabeth II devenait reine. Elle ne détient pas (encore) le monopole du plus long règne, mais ça n’empêchera pas les Britanniques de célébrer son « jubilé de platine » en juin prochain. Une foule d’activités et un concours de pudding sont au programme. Mais des questions se posent : Harry et Meghan seront-ils là ? Les déboires d’Andrew vont-ils faire de l’ombre aux festivités ? La reine sera-t-elle en état d’y prendre part, après une année difficile ? Pudding, célébrations, malaises, Thibodeau Rinfret… Voici tout ce que vous devez savoir. Ou pas.

Célébrations

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Anita Atkinson travaille dans un musée consacré à la famille royale à Harperley, dans le comté de Durham, au Royaume-Uni.

Le 70e anniversaire de son accession au trône est bien le 6 février. Mais c’est au début de juin qu’auront lieu les festivités du jubilé de platine.

Les organisateurs parlent du « plus gros » évènement royal jamais organisé. Selon ce qu’on sait, des spectacles historiques (pageants) doivent avoir lieu le 5 juin dans les rues avoisinant le palais de Buckingham. Une fête sera aussi organisée dans les jardins du palais, il y aura d’inévitables défilés militaires et une série d’expositions mettant en vedette portraits, bijoux et robes de la reine. On annonce en prime quelque 200 000 fêtes de rue dans tout le pays, lors d’un long week-end de quatre jours de congé. Bref, le Royaume-Uni vivra à l’heure monarchique. Des activités sont aussi prévues au Canada, quoique beaucoup plus discrètes.

Pudding

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Pudding traditionnel anglais

À vos fourneaux ! Un concours de pudding vient d’être lancé pour souligner le jubilé de platine. Le pudding sera consommé pendant les célébrations, un peu partout au Royaume-Uni. Selon les organisateurs, les participants devront créer un dessert « classique » qui cadre bien avec les goûts « simples et sans chichi » de Sa Majesté.

Cette compétition fait écho à celle de 1953, où l’on avait inventé le « Coronation chicken » (poulet du couronnement), à savoir du poulet froid dans une sauce curry crémeuse servi avec une salade de riz et des petits pois. Selon ce qu’on sait, ce mélange affriolant est aujourd’hui régulièrement servi en sandwich.

Gros bémol : le concours de pudding s’adresse seulement aux Britanniques de 8 ans et plus. La Presse s’insurge contre cette injustice. Après tout, Élisabeth est aussi la reine du Canada...

Record

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Élisabeth II à son arrivée aux funérailles du prince Philip, le 17 avril dernier

Après 70 ans sur le trône, Elisabeth est sans conteste le monarque britannique ayant régné le plus longtemps. Imaginez : l’année de son accession au trône, Winston Churchill est premier ministre du Royaume-Uni, Maurice Richard joue encore au hockey et la télévision vient d’être mise en marché.

Sa plus proche rivale, la reine Victoria, ne revendique pour sa part « que » 63 ans et 216 jours de règne (1837-1901).

Sur le plan niveau international, en revanche, Élisabeth n’est pas même pas sur le podium. Elle est devancée par le roi Johann du Lichtenstein, qui revendique 70 ans et 91 jours (1858-1929), Bhumibol Adulyadej de Thaïlande, qui compte 70 ans et 126 jours (de 1946 à 2016), et Louis XIV, qui a régné 72 ans et 110 jours (1643-1715) ! La reine battra-t-elle un jour ces records ?

Consultez la page Wikipédia sur Bhumibol Adulyadej (en anglais)

Le prince Andrew

PHOTO JOHN THYS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le prince Andrew en septembre 2019

Les déboires judiciaires du prince Andrew feront-ils de l’ombre aux festivités ? C’est l’inévitable question, alors que le deuxième fils d’Élisabeth s’apprête à être jugé à New York pour agression sexuelle et détournement de mineures, pour des faits remontant à 2001. Le duc d’York était alors un habitué des soirées « immondaines » organisées par Jeffrey Epstein et sa complice, Ghislaine Maxwell, récemment jugée coupable de complicité de trafic sexuel, qui encourt 65 ans de prison.

Jusqu’ici, l’affaire n’avait pas trop éclaboussé la famille royale. Mais en dépouillant Andrew de tous ses titres militaires au mois de janvier, Élisabeth a fait un geste lourd de symbolique. « À ce stade, je crois que ça a commencé à nuire à la monarchie », estime Penny Junor, qui a signé plusieurs livres sur la famille royale. Cette spécialiste de la monarchie espère que les hasards du calendrier ne feront pas coïncider le procès d’Andrew et les fêtes du jubilé. « Ce serait catastrophique », dit-elle en rappelant le côté impitoyable des tabloïds britanniques.

Harry

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Le prince Harry et sa femme, Meghan Markle, discutent avec Oprah Winfrey dans le cadre d’une interview à la télé en mars 2021.

C’est l’autre épine dans le pied de la famille royale. Que fera Harry ? Viendra-t-il aux cérémonies ? Avec Meghan et leurs enfants ? S’estimant insuffisamment protégé, le duc de Sussex, qui vit désormais aux États-Unis, s’est dit prêt à payer pour la protection de la police métropolitaine de Londres lors de son prochain déplacement au Royaume-Uni. La « Met » lui a répondu par un No retentissant, arguant que cela créerait un précédent, tout prince soit-il. Au-delà des questions de principe, cette réponse traduit bien le ras-le-bol des Britanniques à l’endroit du couple, dont les caprices et les écarts passent de moins en moins bien dans l’opinion. « Il a tourné le dos à ses fonctions. Il est devenu impopulaire au Royaume-Uni », confirme Karim Al-Dahdah, porte-parole de la Ligue monarchiste du Canada.

La santé

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Souvenirs de la famille royale vendus dans un kiosque en mai 2012, pour le 60e anniversaire de règne d’Élisabeth

On le sait, ce fut une mauvaise année pour la reine. La mort du prince Philip, complice et mari depuis 1947, a porté un dur coup à la monarque, qui ne rajeunit pas, loin de là, avec ses 96 ans. Depuis, les pépins de santé se sont succédé, et Sa Majesté a dû reporter un certain nombre d’apparitions publiques, en plus d’être hospitalisée pour des problèmes à l’estomac. Dans ce contexte, nul ne peut prédire son état de santé au cours des prochains mois. Selon Penny Junor, rien n’exclut que sa participation en personne aux cérémonies soit limitée. « Ils vont garder ses apparitions au minimum. Je pense que Charles, Camilla et William prendront une part du fardeau. Ils ne sont pas la reine, certes, mais en même temps, il faut préparer le pays pour l’avenir... »

Thibodeau Rinfret

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Quelques souvenirs soulignant le règne d’Élisabeth II

Le 6 février 1952, le roi George VI meurt d’un cancer du poumon à l’âge de 56 ans. La reine, qui se trouve alors en voyage au Kenya, accède automatiquement au trône. Insolite : selon Wikipédia, le Canada aurait été le premier pays au monde à officialiser la nouvelle, et ce, quelques heures avant le Royaume-Uni (pour cause de décalage horaire ?). L’annonce sera faite par l’honorable Thibodeau Rinfret (1879-1962), qui est alors gouverneur général par intérim. Son texte, lyrique, proclame « de bouche et de cœur » que la « Haute et Puissante Princesse » est maintenant devenue « notre seule et légitime Dame lige Elizabeth Deux, par la grâce de Dieu, reine de Grande-Bretagne, d’Irlande et des possessions britanniques au-delà des mers ». Puis il demande à Dieu, « de qui tous les rois et les reines tiennent leur puissance », de lui accorder un « long et heureux règne ». Globalement, ses souhaits seront exaucés.

Consultez la page Wikipédia sur l’histoire de la monarchie au Canada (en anglais)