(Madrid) Il aura fallu 85 jours au volcan Cumbre Vieja pour se rendormir : l’éruption sur l’île espagnole de La Palma, qui a provoqué des dégâts considérables, a été déclarée « terminée » samedi, les autorités estimant qu’elle s’est arrêtée le 13 décembre.

« Aujourd’hui le comité scientifique peut le dire […] l’éruption est terminée », a annoncé Julio Pérez le directeur du plan d’urgence volcanique des Canaries (Pevolca) lors d’une conférence de presse samedi.

« Il n’y a pas de lave, pas d’émission de gaz significative, pas de secousses sismiques significatives », a énuméré le responsable, rappelant que cette éruption a duré « 85 jours et 8 heures » entre le 19 septembre jusqu’au 13 décembre.

PHOTO RAMON DE LA ROCHA, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le volcan Cumbre Vieja en éruption, le 23 septembre

Il fallait 10 jours consécutifs sans signe marquant d’activité volcanique, délai requis selon les experts scientifiques, pour pouvoir affirmer que l’épisode était terminé, alors que la fin de l’éruption a été pressentie à plusieurs reprises, avant de reprendre chaque fois quelques jours plus tard, au grand désarroi des habitants de l’île.

Il s’agit, a tweeté le premier ministre espagnol Pedro Sanchez, « du plus beau cadeau de Noël […] nous continuerons à travailler ensemble, avec toutes les institutions pour relancer la merveilleuse île de La Palma et réparer les dégâts occasionnés ».

Désormais, le Cumbre Vieja est en léthargie, ses torrents de lave sont noirs, figés, durcis, et une couche de sable noir — de la cendre — s’est déposée comme un voile sur l’endroit.  

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Vue aérienne sur des maisons de Las Manchas ensevelies sous la lave, le 14 décembre

Il faudra des années, voire une décennie pour nettoyer, déblayer, reconstruire et se réapproprier ce terrain défiguré.

« La fin de l’éruption ne veut pas dire qu’il n’y a plus de danger », a averti Julio Pérez, ajoutant que « les risques et les dangers subsistent ». Il va encore y avoir des émissions de gaz toxiques et la lave mettra beaucoup de temps à refroidir. Sans compter les risques d’effondrement de terrain.

L’activité volcanique est inscrite dans l’histoire de La Palma, qui, comme les six autres îles de l’archipel des Canaries — situé dans l’Océan Atlantique, au large des côtes nord-ouest de l’Afrique — est d’origine volcanique.

Aucun mort

Il s’agissait toutefois de l’éruption la plus longue que l’île ait connue et la première depuis 50 ans, après celles du volcan San Juan en 1949 et du Teneguia en 1971.

Malgré sa durée et les images impressionnantes des coulées de lave en fusion, elle n’a fait aucun mort, mais a provoqué d’énormes dégâts : plus de 7000 personnes ont été évacuées, parmi lesquelles environ 500 vivent encore dans des hôtels, et près de 3000 bâtiments ont été détruits.

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Le volcan Cumbre Vieja en éruption, le 19 septembre

La lave a recouvert 1219 hectares de la superficie de l’île et l’a même… agrandie : les coulées qui ont atteint la mer se sont solidifiées et ont donné naissance à deux péninsules, ajoutant à la superficie de l’île 43,5 hectares au sud et 5 ha au nord, selon les données fournies samedi par les autorités locales.

Au plus fort de l’épisode, le volcan a craché des milliers de litres de lave, produisant des coulées bouillonnantes et fluorescentes qui descendaient le long de la montagne, le tout dans un vrombissement constant.

Les 83 000 habitants de La Palma n’oublieront ni les secousses sismiques, ni les pluies de cendres, ni les gaz toxiques ou la fumée s’échappant du cône du volcan qui les obligeaient à se calfeutrer parfois pendant plusieurs jours.

Il a fallu évacuer à la hâte les domiciles, parfois revenir chercher quelques jours plus tard les animaux et les effets personnels.

Villas ou bâtiments engloutis, routes disparaissant sous les coulées de lave et spectaculaires jets d’eau salée lorsque la lave est entrée dans la mer : l’activité du volcan a rythmé les journaux télévisés espagnols des semaines entières.

Reconstruire ou partir

Trois mois de paralysie, avec de régulières interruptions du trafic aérien et la fermeture de l’aéroport de La Palma, sur cette petite île fortement dépendante du tourisme.

La lave a également fait beaucoup de mal aux plantations de banane, l’autre secteur clé de l’économie locale, puisqu’il représente 50 % de son PIB.  

Sur les 70 000 hectares de l’île, 10 % sont consacrés à l’agriculture, principalement à la culture de la banane (43 %), selon la fondation Réserve mondiale de la biosphère de La Palma.

Les dommages pourraient s’élever jusqu’à 900 millions d’euros, ont estimé samedi les autorités locales.

Le gouvernement espagnol, dont le chef Pedro Sánchez s’est rendu à de multiples reprises sur place, a promis 225 millions d’euros d’aides destinées notamment à construire des logements et à acheter des biens de première nécessité, ainsi qu’à des subventions directes aux agriculteurs et aux pêcheurs.

Madrid a également sollicité la Commission européenne pour qu’elle active le fonds de solidarité de l’Union européenne.