Corridor marin interdit, plage publique fermée, travaux illégaux sur le littoral: les vacances du roi Salmane d'Arabie saoudite et son millier d'invités sur la Côte d'Azur font des remous jusqu'à l'Élysée.

Le roi Salmane d'Arabie saoudite est en vacances sur la Côte d'Azur, et ses nouveaux voisins n'apprécient pas son style autoritaire.

«C'est deux poids, deux mesures, laisse tomber Blandine Ackermann, présidente de l'Association de défense de l'environnement de Golfe-Juan et Vallauris, en entrevue téléphonique avec La Presse. Vous et moi, si nous nous comportions comme le roi Salmane, on nous jetterait en prison. Lui, il est reçu avec la bénédiction de l'Élysée.»

Quand il est arrivé à 18h à l'aéroport Nice Côte d'Azur avec son millier d'invités, samedi, le roi Salmane ben Abdelaziz Al-Saoud, 79 ans, a provoqué une petite commotion dans la région glamour: plus de 400 voitures luxueuses avaient été retenues pour transporter la famille royale et ses proches.

Pour les trois prochaines semaines, la richissime famille logera dans sa villa de 7000 m2 dans la petite localité de Vallauris. Les invités sont hébergés dans plusieurs hôtels de la Croisette, à Cannes.

Or, les autorités semblent avoir suspendu l'application des lois pour les vacances de la famille royale. Corridor marin interdit d'accès, plage publique fermée, travaux illégaux sur le littoral... Plus de 120 000 résidants ont signé une pétition dénonçant le traitement de faveur accordé au monarque saoudien.

Pour le sous-préfet de l'arrondissement, Philippe Castanet, ces mesures sont nécessaires afin «d'éviter la mise en danger du roi d'un pays en guerre». «Évitons que celui-ci décide d'aller finalement en vacances chez le roi du Maroc, où on ne lui fera pas tant de misères», a-t-il déclaré au Monde.

Les problèmes ont commencé ces dernières semaines, quand les autorités ont dit que la plage publique La Mirandole, jouxtant la villa, serait interdite d'accès durant le séjour du roi. Début juillet, des riverains ont aussi sursauté quand des travailleurs ont coulé une dalle en béton sur la plage, pour y accommoder un ascenseur utilisé exclusivement par le roi et ses invités. Une zone de 300 m autour de la villa est interdite à la circulation, même sur la mer, où les plaisanciers ne peuvent désormais plus se rendre à la petite île Sainte-Marguerite.

Mme Ackermann et son groupe ont même contacté le ministère des Affaires étrangères. «On nous a répondu que c'est le président Hollande lui-même qui avait accordé l'autorisation au roi de faire les travaux sur la plage», dit-elle. La municipalité de Vallauris a depuis fait arrêter les travaux.

Enthousiasme des commerçants

Plusieurs hôteliers et commerçants ont confié à la presse française être emballés par la visite royale saoudienne. Mme Ackermann note que leur enthousiasme doit être pris avec un grain de sel.

«La dernière fois que la famille royale saoudienne est venue dans sa villa de la Côte d'Azur, c'était en 2005. Les commerces de luxe de Cannes ont donc trouvé le moyen de survivre pendant 10 ans sans la famille saoudienne... Et puis, si la famille respectait les lois, il n'y aurait pas toute cette opposition que l'on voit aujourd'hui.»

Mme Ackermann explique que c'est feu le roi Fahd d'Arabie saoudite qui a acheté la villa, il y a plusieurs années. «De tout temps, nous avons eu des problèmes. Il a fait démolir la villa d'origine pour construire cette forteresse, alors qu'il n'avait pas les permis pour le faire. Il avait même fait installer un fusil mitrailleur face à la mer, que nous avons réussi à faire enlever, Dieu merci», dit-elle.

Même si les vacances du roi ont débuté, les citoyens n'ont pas baissé les bras. «On envisage un recours en justice. Peut-être aussi une manifestation, on va réfléchir. On ne va pas accepter ça, c'est ouvrir la porte à ce que ça recommence.»