La Grèce souhaite un «New Deal paneuropéen» pour aider l'Europe «à la reprise», a indiqué mercredi le nouveau ministre grec des Finances Yanis Varoufakis.

Le nouveau gouvernement d'Alexis Tsipras, chef de la gauche radicale Syriza qui a remporté les législatives dimanche, souhaite «un New Deal paneuropéen pour la reprise», a indiqué M. Varoufakis lors de la passation des pouvoirs avec son prédécesseur Guikas Hardouvelis. Il a réitéré que le pays va «tourner la page de la politique d'austérité».

Prêt à «verser son sang»

Un gouvernement de «salut national», prêt à «verser son sang» pour les Grecs sans toutefois aller à «une rupture désastreuse» avec l'UE : le premier ministre grec Alexis Tsipras a fixé à son équipe mercredi une ligne de conduite double qui a suscité l'inquiétude des marchés.

Toujours sans cravate, comme la majorité des ministres de ce gouvernement issu de la gauche radicale, mais très grave, M. Tsipras a affirmé dans une déclaration liminaire d'une vingtaine de minutes qu'il était à la tête d'un gouvernement «de salut national», prêt à «verser son sang» pour rétablir «la dignité des Grecs».

Cette perte de «dignité» a régulièrement été imputée par Syriza aux contraintes auxquelles la Grèce a dû se plier depuis l'entrée en vigueur des programmes d'aide, en 2010, et dont le nouveau gouvernement prétend s'affranchir, tout comme il exige une renégociation de la dette du pays.

«Parmi nos priorités, a réitéré M. Tsipras, figure une nouvelle renégociation avec nos partenaires pour trouver une solution juste, viable et mutuellement utile». Il a assuré vouloir à la fois éviter «une rupture désastreuse réciproque» avec les partenaires de la Grèce et mettre fin à «la politique de soumission» du pays.

Cette juxtaposition d'un fond raisonnable et d'une forme emphatique a complètement désarçonné les marchés. L'obligation à dix ans de la Grèce repartait très nettement au-dessus de 10 %, comme cela a été le cas début janvier, à des niveaux plus vus depuis septembre 2013.

Au-delà des mondanités

D'autant que le gouvernement a commencé tambour battant à mettre en oeuvre les engagements de Syriza : l'arrêt de la privatisation du port du Pirée a ainsi été confirmé mercredi matin par le ministre concerné, ainsi que l'arrêt de celle de la compagnie nationale d'électricité, DEI.

Le gouvernement Tsipras a également l'intention de faire passer très vite une loi destinée à améliorer le niveau de vie des Grecs, notamment en relevant le salaire minimum et en mettant fin à l'obligation de mobilité dans les services publics imposée par la troïka des créanciers du pays (UE, BCE, FMI).

Autant de décisions qui devraient faire froncer les sourcils à la troïka, avant même que le gouvernement n'évoque le grand point de confrontation avec l'UE, son exigence de réduction de l'énorme dette grecque.

Tout cela arrive de surcroît au moment où l'UE a prévu de verser fin février à la Grèce les 7 derniers milliards d'euros (près de 10 milliards de dollars) prévus par son plan d'aide, mais à la condition expresse que les réformes en cours aient abouti et que la Grèce observe un strict régime budgétaire.

Martin Schulz, le président du Parlement européen, devait être le premier dignitaire étranger à venir rencontrer M. Tsipras, jeudi. Mais toute l'attention se porte désormais sur la visite qu'effectuera vendredi Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe (ministre des Finances de la zone euro).

Sa porte-parole a indiqué mardi que cette visite avait surtout pour but d'«apprendre à se connaître». Mais visiblement, Alexis Tsipras souhaite aller très vite au-delà des mondanités. Il a prédit mercredi que les discussions de vendredi seraient «très cruciales et productives».

Devant le risque d'emballement, le commissaire européen aux Finances Pierre Moscovici a exclu mardi toute rupture à venir avec la Grèce. «La Commission aide et veut continuer à aider la Grèce. Il n'est pas question que, de ce point de vue là, il y ait une rupture», a-t-il souligné.

-Avec Odile Duperry