Au moins 17 immigrés ont trouvé la mort dans le naufrage lundi d'une embarcation entre l'île de Lampedusa et les côtes libyennes, selon un nouveau bilan officiel diffusé mardi. L'Italie s'en est prise à l'Union européenne accusée de manquer de solidarité.

«206 personnes ont été sauvées hier par les embarcations militaires et civiles qui ont opéré sur les lieux pendant le naufrage au large des côtes libyennes tandis que 17 corps sans vie ont été récupérés jusqu'à présent», a indiqué la marine italienne dans un communiqué.

Les rescapés et les corps des victimes se trouvent sur la frégate Grecale qui se dirige vers Catane, dans l'est de la Sicile, où elle devait arriver au plus tôt vers 12h00 (heure de Montréal).

Un porte-parole de la marine a précisé à l'AFP que les recherches de victimes ont cessé sur le site du naufrage, à plus de 150 km au sud de Lampedusa, et à 80 km de la Libye.

À Catane, où de nombreux cameramen sont déjà présents, des agents de la capitainerie du port ont indiqué à l'AFP que le navire était bien attendu, sans donner plus de précisions.

Selon la marine italienne, ces dernières heures, un autre navire, le Sirio, a été engagé dans le secours à des «embarcations en difficulté, sauvant 295 immigrés qui seront transférés dans le port d'Augusta».

Le ministre de l'Intérieur Angelino Alfano a menacé mardi de «laisser partir» d'Italie tous les réfugiés demandeurs d'asile si l'Union européenne ne venait pas en aide à une Italie submergée par un nouvel afflux de migrants depuis le début de l'année.

«L'Europe a deux options: soit elle vient ici et met le drapeau européen sur l'opération Mare Nostrum, ou alors, une fois défini le statut des immigrés et vérifié qu'ils ont droit à la protection internationale (préalable à l'obtention du droit d'asile) et veulent aller dans d'autres pays, nous les laisserons partir», a déclaré M. Alfano sur la chaîne publique Rai 3.

«Le droit à l'asile est sacro-saint, mais il ne peut pas s'exercer qu'en Italie», a-t-il ajouté. La législation européenne prévoit que les demandes d'asile sont traitées par le premier pays où arrivent les migrants qui ne peuvent normalement pas en bouger tant que la procédure n'est pas arrivée à son terme.

Depuis l'automne dernier, après deux naufrages ayant fait plus de 400 morts près de Lampedusa et l'île de Malte, l'Italie a engagé la vaste opération «Mare Nostrum» pour éviter de nouvelles tragédies de ce type près de ses côtes.

Le chef du gouvernement italien Matteo Renzi a lui aussi vivement critiqué l'UE.

«L'Europe nous laisse seuls, il n'est pas possible de sauver des États, des banques, puis de laisser mourir des mères avec leurs enfants», a-t-il dit.

«Il y avait environ 250 immigrés à bord de l'embarcation, provenant principalement d'Érythrée, de Syrie, du Pakistan et du Soudan», a précisé mardi à l'AFP Mauro Casinghini, directeur pour l'Italie des secours à l'Ordre de Malte.

Cet ordre a envoyé plusieurs médecins et infirmières sur les navires italiens qui aident les réfugiés.

«Amina a failli ne pas y parvenir. Elle était transie, pleine de crampes, elle s'agrippait à un bout de bois avec l'eau jusqu'au menton et elle a réussi à tenir en dehors de l'eau son bébé de quatre mois», a raconté Antonella Godino, une jeune femme médecin de l'ordre de Malte, citée par M. Casinghini.

«Quatre heures et trois perfusions plus tard, elle a repris des couleurs et a pu allaiter son enfant», a ajouté la jeune médecin.

Faisant part de sa «profonde tristesse», le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a précisé que les 17 victimes sont «12 femmes, trois enfants et deux hommes».

Plus de 20 000 immigrés sont morts noyés ces 20 dernières années en tentant de traverser la Méditerranée, selon des ONG.

La représentante de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton, a exhorté lundi la Libye et l'Afrique à agir pour parvenir à tarir les flux migratoires irréguliers.

Elle a aussi rappelé avoir soumis en décembre, sans effet à cause d'un manque d'intérêt des États européens, un plan d'action, dont l'ouverture de canaux pour l'immigration légale, des visas humanitaires et la réinstallation de demandeurs d'asile pour éviter qu'ils ne se tournent vers les filières de l'immigration clandestine.