Le maire de Florence Matteo Renzi, venu de l'aile chrétienne démocrate, a été élu triomphalement dimanche à la tête de la première formation de gauche italienne, le Parti démocrate.

Encore peu connu il y a un an, M. Renzi, 38 ans, s'est adjugé environ 68% des suffrages lors d'élections primaires pour lesquelles «le peuple de gauche» s'est fortement mobilisé, avec plus de 2,5 millions de votants.

Il a battu à plate couture Gianni Cuperlo, apparatchik de 52 ans originaire de Trieste (autour de 17%), et «Pippo» Civati (14%), représentant d'une gauche rénovatrice, qui a son âge.

Arrivé au son d'un air à la mode, M. Renzi qui s'inspire ouvertement de Tony Blair et Barack Obama, a reçu une ovation de ses supporteurs au théâtre «Obihall» de Florence.

Dans son discours, il a pris grand soin de saluer ses adversaires, rappelant la bataille commune entamée il y a trois ans avec M. Civati pour «mettre à la casse» la vieille garde du centre gauche. «Merci aussi à Cuperlo car s'il y a quelqu'un au PD avec qui j'ai envie de dialoguer, c'est bien lui», a-t-il affirmé.

Saluant la forte affluence aux urnes, il a estimé que «les Italiens ont montré qu'ils valent bien mieux que leur classe dirigeante».

L'élection de M. Renzi représente une révolution pour le PD compte tenu de son jeune âge et parce qu'il n'est pas un membre de l'appareil de cette formation héritière de l'ancien Parti communiste italien.

Même si Renzi, issu de l'aile gauche de la démocratie chrétienne, a assuré que «ce n'est pas la fin de la gauche: nous changeons les joueurs mais nous n'allons pas sur l'autre partie du terrain».

«Le meilleur doit encore venir, on peut être réformateurs sans être ennuyeux», a-t-il expliqué, en se présentant comme «le capitaine» d'une «nouvelle génération» qui va impulser «un véritable changement».

M. Renzi succède, après un intérim assuré par l'ex-syndicaliste Guglielmo Epifani, à Pierluigi Bersani, qui a démissionné au printemps dernier après avoir échoué à former un gouvernement, en raison de la majorité trop exigüe obtenue par le centre-gauche aux législatives de février.

Ces primaires devraient déclencher une métamorphose du PD et pourraient peser sur l'avenir du gouvernement Letta.

«Plus agile et plus innovateur»

M. Renzi a confirmé dimanche vouloir refonder le PD, le «rendre plus agile et plus innovateur».

Peu connu jusqu'à il y a un an quand il avait défié M. Bersani aux primaires, il caracole en tête des sondages de popularité et son ambition est clairement d'occuper un jour le poste de Premier ministre.

«Le PD veut recommencer à gagner (les élections), il ne se contentera pas du Prix de la critique», assure-t-il.

Tout au long de sa campagne «changer de sens», il a égratigné le gouvernement gauche-droite d'Enrico Letta, lui reprochant de «reporter continuellement les choses à faire».

D'aucuns, dont Silvio Berlusconi récemment déchu de son poste de sénateur, parient sur une rupture entre MM. Letta et Renzi, pourtant membres du même parti, rêvant de nouvelles élections législatives.

Mais Francesco Lo Sardo, éditorialiste d'Europa, organe officiel du PD, pense que M. Letta pourrait opter pour une autre voie: «mettre du Renzi dans le moteur pour transformer le véhicule utilitaire du gouvernement en un bolide qui fasse manger la poussière à Berlusconi et (Beppe) Grillo», l'ex-comique chef d'un mouvement contestataire anti-austérité.

Mercredi M. Letta se présentera au parlement pour confirmer sa majorité après le passage à l'opposition de M. Berlusconi avec une partie de la droite. Le vote devrait être une formalité puisque l'exécutif reste soutenu par une cinquantaine de parlementaires du Nouveau Centre Droit d'Angelino Alfano, ex-bras droit de Berlusconi.

Mais M. Letta pourrait saisir l'occasion pour accélérer les réformes institutionnelles (nouvelle loi électorale, réduction du nombre de parlementaires) et la relance de l'économie alors que le chômage dépasse les 12%.

M. Letta s'est empressé de féliciter M. Renzi, disant vouloir «travailler avec lui dans un esprit d'équipe qui sera fructueux, utile au pays et au centre gauche».

Pour Giacomo Marramao, professeur de philosophie politique, il est très improbable que M. Renzi adopte une stratégie jusqu'au-boutiste de rupture.

«Comme secrétaire du principal parti italien, il peut tout à fait conseiller le gouvernement et en changer l'agenda, au moins partiellement», a-t-il indiqué à l'AFP.