«La santé ne se vend pas, elle se défend»: derrière ce cri inscrit sur une banderole, des milliers de médecins et infirmières en blouse blanche ont défilé dimanche à Madrid, décidés à poursuivre leur mouvement contre l'austérité et «la privatisation» de la santé.

Après une première «marée blanche» le 18 novembre et des occupations d'hôpitaux à Madrid, les 75 000 professionnels de la santé de la région mènent depuis deux semaines des mouvements de grève accompagnés de manifestations.

«Non, non à la privatisation», «San-té Pu-blique», scandent les manifestants venus en famille malgré le froid, sous un doux soleil d'hiver.

Ils agitent des pancartes où est écrit «NO» coupé d'une paire de ciseaux pour dire «non» aux coupes budgétaires pour 2013 décidées par la région de Madrid, dirigée par le Parti populaire (PP) conservateur au pouvoir.

Venus des hôpitaux et de centres de santé de Madrid et de sa région, ils dénoncent la privatisation prévue de six hôpitaux et 27 dispensaires, sur les 270 de la région.

«À VENDRE, la Santé publique», dénoncent les professionnels de santé sur des pancartes aux grosses lettres orange fluorescentes sur fond noir habituellement accrochées aux immeubles pour signaler un appartement à vendre.

«Avec la privatisation, il y aura moins d'argent pour les patients et moins de moyens. Nous allons passer de troisième pays classé selon l'OMS à je ne sais quelle place», regrette Juana Vargas, une médecin de 55 ans, de l'hôpital Puerta de Hierro, dans le nord-ouest de Madrid.

Nombre de médecins, dont certains soufflent à pleins poumons dans des sifflets, affirment battre le pavé pour la première fois de leur carrière, craignant une dégradation de la qualité des soins avec la «privatisation».

Comme Javier Perez, un médecin de 43 ans, qui brandit une pancarte «Avant, nous votions PP» (Parti populaire) et ne cache pas sa colère.

«Je pense que s'attaquer à la santé est une honte. J'ai voté PP aux dernières élections, mais il est clair que je ne le ferai plus aux prochaines», dénonce-t-il.

Selon lui, le gouvernement «devrait plutôt couper dans le nombre d'élus, de politiques et de postes dans l'administration» que dans les postes de santé.

Et pour Maria Luisa Arnal, une infirmière de 52 ans, «c'est un vol». «Ils l'appellent externalisation. Mais la réalité, c'est qu'ils vont vendre à leurs amis qui possèdent des entreprises privées dans le secteur», affirme l'infirmière, comme de nombreux autres manifestants.

Pour elle, «les cas les plus chers seront envoyés au secteur public et les hôpitaux privés ne conserveront que ce qui est rentable».

La région de Madrid défend, elle, son projet dans le cadre d'une réduction nécessaire de son déficit qui prévoit des coupes drastiques dans les secteurs de la santé et de l'éducation, à l'instar des autres régions.

Ces efforts s'inscrivent dans la droite ligne des économies de sept milliards d'euros par an dans le domaine de la santé visées par le gouvernement de Mariano Rajoy, engagé dans une cure historique de rigueur de 150 milliards d'économies sur trois ans, pour sortir les comptes du rouge et tenter d'éviter un sauvetage financier du pays.

Des mesures d'austérité de plus en plus contestées par la population, descendue en masse lors de la manifestation nationale du 14 novembre à Madrid à l'occasion de la deuxième grève générale organisée depuis le retour des conservateurs au pouvoir fin 2011.

Dimanche, les professionnels de santé de la région de Madrid se sont donné rendez-vous pour deux nouvelles manifestations dans la capitale les 16 et 19 décembre.