Le Kirghizstan, ex-république soviétique d'Asie centrale, devrait reporter au pouvoir jeudi le président sortant Kourmanbek Bakiev au cours d'une élection qui paraît jouée d'avance. La validité du scrutin est toutefois déjà remise en cause par l'opposition, qui dénonce des «fraudes massives» et appelle à manifester dès la fermeture des bureaux de vote.

«Nous allons retirer tous nos observateurs des bureaux de vote et demander que les résultats de l'élection soient considérés comme illégitimes (...) Nous refusons de participer à une telle élection», a déclaré le candidat de l'opposition le mieux placé, Almazbek Atambaïev, lors d'une conférence de presse à Bichkek, la capitale. Il a dénoncé des «violations massives et sans précédent», mais il a souligné que, selon la législation en vigueur, il ne pouvait plus retirer sa candidature. Le Parti social-démocrate, qui le soutient, a aussi démenti dans un communiqué des informations de presse faisant état de son retrait.

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui a déployé près de 300 observateurs, doit rendre ses conclusions jeudi sur le déroulement du scrutin.

M. Atambaïev a par ailleurs annoncé que des milliers de partisans de l'opposition se rassembleraient dès la fermeture des bureaux de vote pour aller manifester devant la Commission centrale électorale à Bichkek. Cette dernière a annoncé que le taux de participation s'élevait à plus de 60% à 15h00, soit au-delà du seuil de 50% requis pour que le scrutin soit validé.

Signe des tensions autour de cette élection, M. Bakiev a sévèrement mis en garde l'opposition jeudi, affirmant que l'organisation de manifestations «illégales» ne serait pas tolérée. «Nous allons réprimer, conformément à la législation, toute tentative d'organiser des troubles, et nous ne tolérerons pas de déstabilisation de la situation dans le pays», a indiqué le service de presse de la présidence.

À Balyktchi, dans le centre du pays, l'opposition a affirmé que la police avait dispersé plus de 1000 de ses sympathisants dans la rue en tirant des coups de feu en l'air. Porté au pouvoir en 2005 par des manifestations à l'issue d'élections entachées de fraudes, le président kirghiz, accusé d'avoir renoué depuis avec les vieux démons du passé, dont une corruption endémique, était omniprésent dans la campagne électorale.

Les chefs de l'opposition l'ont accusé d'user de la violence et d'intimider ses opposants politiques ainsi que les rares médias indépendants du pays. «J'ai voté pour Atambaïev. Tout le monde dit en avoir marre de la corruption. Nous devons «nourrir» la grande famille de Bakiev. L'opposition a promis de mettre fin à la corruption. Il faut lui donner une chance», a dit Omor, 39 ans, électeur à Bichkek.

Mais pour de nombreuses personnes, M. Bakiev, qui a instauré une relative stabilité après quasiment une décennie de luttes politiques, reste encore la meilleure option.

«Je vais voter pour Bakiev parce qu'il fait des choses concrètes qui sont bonnes pour l'économie et pour le pays», a confié Anatoli, un retraité de 77 ans.

M. Bakiev est aussi un allié pour les États-Unis, le Kirghizstan ayant décidé fin juin de maintenir sur son territoire une base militaire américaine vitale pour les opérations de la coalition internationale en Afghanistan, après avoir menacé de la fermer.