Les électeurs du Groenland, territoire semi-autonome danois, élisaient mardi leurs représentants au parlement local, à l'issue d'une campagne où les indépendantistes ont fait figure de favoris pour détrôner les sociaux-démocrates au pouvoir depuis 30 ans.

Selon un dernier sondage, réalisé en mai par l'université de Nuuk, le parti indépendantiste d'extrême gauche Inuit Ataqatigiit (IA, dans l'opposition) sortirait grand vainqueur des élections, écartant pour la première fois du pouvoir le parti Siumut (social-démocrate), considéré comme le «père» de l'autonomie interne de l'île obtenue en 1979.

IA remporterait 44% des suffrages, presque le double du pourcentage recueilli au scrutin de 2005 (23%) tandis que Siumut reculerait de près de 3% des voix à 28% et que son allié de la coalition gouvernementale Atassut (libéral) en perdrait plus de la moitié à 9%.

Ces élections anticipées se déroulent à trois semaines de l'entrée en vigueur d'un régime d'autonomie élargie au Groenland, approuvé à l'occasion d'un référendum en novembre dernier par plus de 75% des habitants de cette île stratégique de l'Atlantique-Nord.

Elles ont été convoquées par le chef du gouvernement Hans Enoksen (Siumut) qui jugeait «adéquat» de demander l'avis de la population sur le choix d'une nouvelle équipe pour gérer cette «nouvelle époque», et préparer la dernière étape de l'indépendance totale du territoire qu'il envisage en 2021, au 300e anniversaire du début de la colonisation danoise.

M. Enoksen espérait ainsi «profiter» de l'élan d'enthousiasme des Groenlandais pour ce régime d'autonomie qu'il a durement négocié avec le gouvernement danois, afin de conforter son règne de 8 ans.

Mais dans cette île minée par les problèmes sociaux, l'alcoolisme, où un enfant sur trois souffre de violences familiales, voire de faim, où la liste d'attente dans les hôpitaux s'allonge, où les écarts se creusent entre les riches et les pauvres, et où les cas de corruption se multiplient, le parti Siumut pourrait payer le prix fort de ces scandales.

Car pour les Groenlandais, l'amélioration des conditions de vie constitue la première priorité, suivie de la lutte contre les abus du pouvoir et le népotisme dans la société.

L'indépendance du Groenland, considérée comme étant sur les rails après le «oui» au statut d'autonomie élargie au référendum de novembre dernier, arrive au troisième rang des préoccupations des Inuits.

Le président d'IA, Kuupik Kleist, a déjà averti que son parti «ne ferait en aucun cas une coalition avec Siumut», comme ce fut le cas à intervalles réguliers jusqu'en 2007.

«C'est 100% sûr», a-t-il déclaré sur les ondes de la radio groenlandaise KNR, expliquant son refus, entre autres, «par les promesses irréalistes de Siumut pendant la campagne comme des séjours pour les écoliers au Canada ou des billets d'avion sur les lignes intérieures à 200 couronnes» (27 euros, environ le dixième de leur prix).

Les bureaux de vote, ouverts à 09H00 heure locale (11H00 GMT), doivent fermer à 20H00 (22H00 GMT) dans cette île, la plus grande du monde (2,2 millions de km2), recouverte à plus de 80% par les glaces et habitée par 57.000 personnes, à savoir 50 000 Inuits et environ 7000 Danois de la métropole.