Le Premier ministre français, François Fillon, devait obtenir, lors d'un vote mardi soir, la confiance des députés sur la politique étrangère de la France et son retour dans le commandement militaire intégré de l'Otan, vivement dénoncé par l'opposition socialiste.

Le scrutin est sans surprise, le gouvernement ayant une confortable majorité à l'Assemblée nationale. Reste à savoir combien de parlementaires de la majorité s'abstiendront lors du vote attendu vers 21H30 GMT, la réintégration de militaires français dans une structure dirigée par un général américain suscitant aussi des remous dans le camp présidentiel.

La semaine dernière, Nicolas Sarkozy avait justifié ce retour dans le commandement intégré, 43 ans après la décision du général de Gaulle d'en sortir pour préserver la souveraineté nationale, en estimant que l'Otan n'était plus celle de 1966. Aujourd'hui, des militaires français sont engagés dans de multiples opérations de l'Alliance et il est inconcevable que la France ne participe pas à la planification de leurs missions, a-t-il dit.

Il s'agit de «codiriger» plutôt que de «subir» une stratégie définie par d'autres et l'enjeu pour la France est de «peser de tout son poids» dans une nouvelle réforme de l'Otan, au menu d'un sommet les 3 et 4 avril à Strasbourg (France) et Kehl (Allemagne), a fait valoir le chef de l'Etat.

Les Etats-Unis et plusieurs pays d'Europe ont applaudi le retour sur trois ou quatre ans de quelque 900 militaires français dans la structure alliée.

Pour le gouvernement, la réintégration n'altère pas l'indépendance de la France à l'égard des Etats-Unis et se veut aussi un pari sur le développement d'une Europe de la Défense, plus facile à réaliser, selon lui, une fois la situation française clarifiée.

«Dans l'immédiat, le signal que nous donnons est un renforcement atlantique dont la politique européenne de défense n'est qu'un élément marginal», a rétorqué Dominique de Villepin, ex-Premier ministre de Jacques Chirac.

L'argument principal du gouvernement est que la France va y gagner en influence, un point rejeté par les détracteurs de cette décision, selon lesquels Paris va au contraire perdre son image singulière.

Ce «n'est qu'une foucade. Elle n'améliore pas nos relations avec nos partenaires, mais détériore notre libre arbitre», a ainsi affirmé le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis, spécialiste des questions internationales.

«Alliés exigeants des Etats-Unis, bâtisseurs ambitieux de l'Europe, nous demeurerons fidèles à nous-mêmes, jaloux surtout de notre liberté et fiers d'une identité que nous tenons à préserver», a promis le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, dans un entretien au journal Le Monde.

La gauche française (socialistes, communistes, Verts) a annoncé qu'elle voterait «non», tout comme le centriste François Bayrou et le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan.

Quatre anciens Premiers ministres, deux de gauche, deux de droite, ont exprimé leur opposition, certains députés ont critiqué la rupture d'un vieux consensus politique sur les questions de défense.

Pour nombre d'entre eux, le retour de la France dans le commandement intégré se fait sans contrepartie et ils craignent une mise sous tutelle américaine de la France, l'Otan demeurant, malgré ses évolutions, le vecteur principal d'influence des Etats-Unis en Europe.

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