(Washington) Le président américain Joe Biden a jugé jeudi « scandaleux » que la Cour suprême de l’État conservateur de l’Alabama assimile les embryons congelés à des enfants.

« Une cour de l’Alabama a mis en péril l’accès à certains traitements de l’infertilité », a dénoncé le dirigeant démocrate dans un communiqué.

« Le refus de reconnaître la capacité des femmes à prendre ces décisions pour elles-mêmes et pour leur famille est scandaleux et inacceptable », a-t-il fustigé.

Dans une décision de justice rendue vendredi, la plus haute cour de cet État du sud des États-Unis a considéré les embryons conservés par congélation comme des « enfants ».

Conséquence directe de cette décision : plusieurs cliniques spécialisées dans la procréation médicalement assistée ont annoncé suspendre leurs activités de fécondations in vitro (FIV).

L’Université d’Alabama à Birmingham (UAB) s’est dite, dans un communiqué, « attristée » de l’impact de cette suspension sur les patients de ses établissements médicaux.

« Mais nous devons évaluer la possibilité que nos patients et nos médecins soient poursuivis pénalement ou soient confrontés à des amendes punitives pour avoir suivi les normes de soin pour les FIV », a-t-elle affirmé.

« La décision récente de la Cour suprême de l’Alabama ne nous donne pas d’autre choix que de suspendre nos FIV », a annoncé jeudi Mark Nix, responsable d’une autre clinique, dans la ville de Mobile.

Resolve, la principale association américaine consacrée à l’infertilité, avait déjà prévenu mardi que ce raisonnement pourrait avoir des « conséquences dévastatrices » pour les procédures de fécondation in vitro.

Loi de 1872

« Ne vous y trompez pas », a lancé jeudi Joe Biden, cette décision « est le résultat direct du renversement de Roe c. Wade », l’arrêt instituant le droit à l’avortement que la Cour suprême des États-Unis a annulé il y a près de deux ans.

« L’ironie de l’histoire est que d’un côté, ces personnes suggèrent qu’une femme n’a pas le droit de mettre fin à une grossesse non désirée, et de l’autre, qu’elle n’a pas le droit de tomber enceinte », a dénoncé de son côté la vice-présidente Kamala Harris.

Le jugement dans l’Alabama reflète « exactement le genre de chaos auquel on s’attendait quand la Cour suprême a renversé » cet arrêt, avait déjà dénoncé la porte-parole de la Maison-Blanche Karine Jean-Pierre.

En juin 2022, la Cour suprême des États-Unis avait mis fin à la garantie constitutionnelle du droit à l’IVG, conduisant de nombreux États, dont l’Alabama, à les restreindre ou les interdire.

La défense du droit à l’avortement est devenue depuis un cheval de bataille des démocrates, en amont de l’élection présidentielle de novembre.

À l’origine de la décision de vendredi, une plainte de trois couples contre une clinique pratiquant des fécondations in vitro.

Citant à l’appui une loi de 1872 sur les décès de mineurs imputables à une faute, ils ont porté plainte après qu’un autre patient, en entrant dans un lieu de stockage, eut détruit accidentellement leurs embryons.

Un tribunal avait d’abord écarté la plainte, estimant que les embryons ne pouvaient pas être qualifiés de « personne » ou d’« enfant ».

Mais vendredi, avec une majorité de 7 juges contre 2, tous républicains, la Cour suprême de l’Alabama a au contraire estimé que la loi sur les décès infantiles « s’applique à tous les enfants à naître, sans limite ».

« Cela s’applique à l’ensemble des enfants, nés ou à naître », écrit ainsi le juge Jay Mitchell dans le texte de la décision, parsemé de références bibliques.