(Lewiston ) Un paranoïaque, un conspirationniste qui entendait possiblement des voix : le portrait de l’auteur présumé de la tuerie de Lewiston, Robert Card, se précise.

« L’individu avait l’impression que tout le monde parlait de lui », a expliqué Michael Sauschuck, le commissaire du département de la Sécurité publique du Maine.

« Nous pensons que c’est ce qui l’a poussé à aller vers ces deux endroits spécifiquement », a-t-il ajouté au sujet de salon de quilles et du bar-restaurant où le suspect a ouvert le feu mercredi soir, deux points de rencontre populaires au sein de la communauté. La tragédie a fait 18 morts âgés de 14 à 76 ans et 13 blessés, dont trois sont toujours hospitalisés aux soins intensifs.

Y a-t-il un mobile ? Clairement, il y a un enjeu de santé mentale.

Michael Sauschuck, commissaire du département de la Sécurité publique du Maine

Robert Card, 40 ans, était réserviste de l’armée américaine et instructeur de tir.

Selon l’Associated Press, la police du Maine a été prévenue il y a plusieurs semaines de « menaces voilées » faites par Robert Card. Deux chefs de police locaux ont déclaré à l’agence de presse qu’une alerte avait été lancée dans tout l’État à la mi-septembre pour surveiller le réserviste parce qu’il avait proféré de menaces à l’encontre de sa base. N’ayant trouvé aucune trace de lui, ils seraient passés à autre chose.

Ces témoignages concordent avec ceux de sa famille. Dans une entrevue accordée à la chaîne NBC News, la belle-sœur de Robert Card, Katie Card, a affirmé qu’il entendait des voix. La famille aurait même contacté la police et l’armée pour exprimer leur inquiétude à cet effet.

Malgré cela, le dossier de Robert Card n’a pas été signalé en vertu de la « loi du drapeau jaune » du Maine, qui déclenche une évaluation pour déterminer s’il faut révoquer le permis de port d’arme d’une personne qui souffre d’un problème psychiatrique.

Aux États-Unis, des militants pour le contrôle des armes à feu y voient un exemple d’une loi trop permissive.

« Une chose qu’il est très important pour moi de souligner, c’est que même s’il semble y avoir un élément de santé mentale dans ce scénario, la très, très grande majorité des personnes qui ont un diagnostic de santé mentale ne vont jamais faire de mal ni à eux-mêmes ni aux autres et ne sont pas un danger pour la communauté », a précisé le commissaire Michael Sauschuck.

Armes légales

Le corps de Robert Card a été retrouvé vendredi soir à une vingtaine de kilomètres des lieux du drame après une chasse à l’homme de deux jours qui a forcé le confinement des habitants d’un large secteur. Le suspect se serait donné la mort avec son arme à feu.

La découverte du corps a permis d’avancer la levée du confinement, qui était prévue samedi matin. « Les recherches pour retrouver M. Card sont terminées. La chasse peut reprendre », a indiqué une alerte de la Sécurité publique envoyée sur tous les téléphones cellulaires en toute fin de soirée vendredi.

Les autorités ont révélé samedi matin que Robert Card avait été retrouvé dans une remorque de 18 roues située dans un stationnement adjacent à l’entreprise Maine Recycling, où il avait déjà travaillé. Il avait deux armes avec lui. Une troisième, une arme longue, a été trouvée dans son véhicule, une Subaru blanche qu’il avait abandonnée près d’une rivière. Toutes ses armes à feu avaient été acquises légalement.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Le corps de Robert Card a été retrouvé à l’intérieur d’une remorque d’un centre de recyclage à Lisbon, à plus de 20 km de Lewiston.

C’est le propriétaire de l’entreprise de recyclage, située dans la ville voisine de Lisbon, qui a encouragé les policiers à fouiller les dizaines de remorques remplies de matériaux recyclables.

Le commissaire Michael Sauschuck a précisé que le suspect portait les mêmes vêtements quand il a été retrouvé que sur les images vidéo captées lors de la fusillade.

Impossible, pour l’instant, de savoir depuis combien de temps il était mort. « C’est l’autopsie qui va le révéler », a dit M. Sauschuck.

Les policiers ont aussi révélé le contenu de la lettre que Robert Card avait laissée derrière, dans sa résidence.

« C’était une note de type papier, je ne vais pas vous la lire, mais en gros, il s’agit d’une note adressée à sa famille qui donne le mot de passe de son téléphone et son numéro de compte en banque. Je ne la décrirais pas comme une lettre de suicide explicite, mais le ton et le contenu laissaient entendre que la personne ne serait bientôt plus là », a indiqué M. Sauschuck.

Vers un retour à la normale

Malgré la découverte du corps du suspect, l’enquête se poursuivra plusieurs jours et sur plusieurs scènes de crime. Les policiers ont reçu 821 informations du public qu’ils sont encore en train d’analyser. Douze mandats de perquisition ont été exécutés.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

La ville peut maintenant commencer le processus de deuil collectif après l’annonce de la mort de Robert Card, l’auteur présumé de la tuerie de Lewiston, dans le Maine, qui a fait 18 morts et 13 blessés.

Dans la ville de Lewiston, la vie commençait à reprendre son cours samedi. Plusieurs centaines de journalistes qui avaient pris la région d’assaut ont commencé à plier bagage.

Une veillée à la mémoire des disparus aura lieu ce dimanche soir. Deux centres d’aide psychologique ont été ouverts samedi, l’un pour les gens présents lors des fusillades, l’autre pour l’ensemble de la population.