(Washington) Beaucoup de remerciements, mais aussi un plaidoyer pour que l’aide américaine, massive, perdure : Volodymyr Zelensky est venu défendre sa cause jeudi à Washington, face à un Joe Biden déjà convaincu, et à des élus qui ne le sont pas tous, loin de là.

Le président ukrainien, dans son habituelle tenue kaki, a commencé sa journée au Congrès, et l’a poursuivie à la Maison-Blanche, où il a été reçu par le président américain avec force gestes d’affection et assurances de soutien.

« Nous sommes avec vous, nous restons avec vous », lui a dit le démocrate de 80 ans, en détaillant une nouvelle aide militaire de 325 millions de dollars, mais sans les missiles tactiques à longue portée que Kyiv réclame avec insistance.

Joe Biden a toutefois assuré qu’un autre armement américain emblématique, les chars Abrams, arriverait en Ukraine « la semaine prochaine ».

« Thank you »

Volodymyr Zelensky, lui, a multiplié les « thank you », en particulier pour la « très puissante » assistance annoncée jeudi, qui comprend notamment des équipements de défense antiaérienne.

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Volodymyr Zelensky et Joe Biden, dans le bureau Ovale de la Maison-Blanche

« J’ai assuré au président Biden que l’Ukraine n’abandonnerait pas et il m’a assuré que l’Amérique serait à nos côtés aussi longtemps qu’il le faudrait », a-t-il déclaré dans un discours jeudi soir.

Tout au long de la journée, le président ukrainien a aussi tenu à exprimer sa gratitude envers le Congrès américain, qui débat actuellement sur le vote d’une nouvelle enveloppe d’aide à l’Ukraine, dont certains élus trumpistes ne veulent pas entendre parler.

Joe Biden a lui asséné qu’il n’y avait « pas d’autre voie » et glissé qu’il comptait sur le « discernement » des élus.

Conscient du risque de lassitude de la part du grand allié américain, le président ukrainien avait dans la matinée averti les élus républicains que son pays risquait de perdre la guerre si le flot d’aide s’arrêtait net.

« Le monde libre »

Au Capitole, le chef d’État devenu chef de guerre est arrivé sur une autre sorte de champ de bataille, politique et financier.

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Volodymyr Zelensky au côté de Hakeem Jeffries, chef de la minorité démocrate à la Chambre des représentants des États-Unis

Il y a d’un côté le Sénat, à majorité démocrate, certes, mais où l’opposition républicaine est plutôt favorable à l’aide à l’Ukraine.

Il y a de l’autre la Chambre des représentants, dominée par les conservateurs depuis janvier et où une poignée d’élus de droite appellent à cesser immédiatement l’aide à Kyiv.

Le tout alors que menace, dès le 1er octobre, une paralysie budgétaire si tout ce beau monde n’arrive pas à s’entendre sur une loi de finances au moins provisoire.

« Rendre des comptes »

Autant dire que l’ambiance a bien changé dans la capitale américaine depuis la visite de Volodymyr Zelensky le 21 décembre 2022, et son discours, sous les acclamations, devant le Congrès d’alors.

Il n’a échappé à personne que le patron républicain de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, n’avait pas escorté le leader ukrainien à son arrivée jeudi au Capitole – ce qu’a fait en revanche le chef de file des républicains au Sénat, Mitch McConnell.

Kevin McCarthy, mis sous pression par l’aile droite de son parti, avait dit mardi qu’il demanderait à son visiteur de rendre « des comptes sur l’argent que nous avons déjà dépensé ».

Le républicain Michael McCaul, chef de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, s’est toutefois montré optimiste sur l’approbation d’une nouvelle aide de 24 milliards de dollars.

« Ils en ont besoin et ils vont l’obtenir », a assuré l’élu du Texas.

Pas de missiles ATACMS

PHOTO D’ARCHIVES FOURNIE PAR L’ARMÉE AMÉRICAINE PAR REUTERS

Un ATACMS est lancé lors d’un exercice commun avec l’armée sud-coréenne en Corée du Sud.

La Maison-Blanche, en dépit de toutes les assurances de soutien, n’a toutefois pas accédé à une demande répétée des Ukrainiens.

Le président Biden a « décidé qu’il ne fournirait pas de [missiles] ATACMS », a déclaré le conseiller à la sécurité nationale de l’exécutif américain, Jake Sullivan, lors d’une conférence de presse. « Il n’a pas exclu cette possibilité à l’avenir », a-t-il précisé.

Joe Biden est lui aussi conscient du risque d’essoufflement alors que le conflit se prolonge et que l’hiver approche.

Dans la nuit, une attaque russe nocturne « massive » a visé plusieurs villes en Ukraine, faisant trois morts à Kherson, dans le sud, et sept blessés à Kyiv, la capitale.

« La Russie croit que le monde va se lasser et la laisser brutaliser l’Ukraine sans conséquence », avait averti mardi à la tribune des Nations unies le président américain, qui doit briguer l’an prochain un second mandat.