(New York) C’est le jour dont les partisans et les adversaires de Donald Trump, à quelques exceptions près, craignent ou espèrent l’avènement depuis longtemps.

C’est le jour où la démocratie américaine entreprendra un test dont l’issue pourrait influencer son cours pendant longtemps, pour le meilleur ou pour le pire.

Vers 14 h, mardi, le 45président des États-Unis participera à un rituel auquel les prévenus les plus humbles ou paumés doivent se soumettre chaque jour. Inculpé pour un crime, fait inédit pour un ancien occupant de la Maison-Blanche, il sera présenté à la justice de New York, dont les 35 000 policiers seront prêts à réagir en cas de débordements.

À la veille de cette comparution, le maire de New York, Eric Adams, a d’ailleurs prié les partisans de Donald Trump, y compris Marjorie Taylor Greene, de « se contrôler ». La représentante de Géorgie a promis d’être à New York mardi.

« Pendant que vous êtes en ville, restez tranquilles », a dit le maire Adams lors d’une conférence de presse, en s’adressant à la pasionaria d’extrême droite, qu’il a accusée d’être une source de « désinformation » et d’« incitation à la haine ».

Cela dit, Donald Trump pourrait échapper à certaines indignités de son nouvel état. Il ne sera probablement pas menotté durant sa mise en état d’arrestation. Et s’il devra assurément donner ses empreintes digitales, il pourrait éviter en outre la traditionnelle photo d’identité.

« Il n’y a pas lieu de faire du théâtre », a déclaré sur CNN Alina Habba, une des avocates de Donald Trump. « Il est le visage le plus reconnu du monde, sans parler du pays. »

Le milliardaire de 76 ans devrait également jouir de l’avantage d’attendre dans une salle d’interview plutôt que dans une cellule le moment où il sera escorté, en présence de ses gardes du corps, vers la salle d’audience du juge Juan Merchan. Ce dernier lui demandera comment il entend plaider aux chefs d’accusation retenus contre lui. On s’attend à ce que le prévenu ou son avocat plaide non coupable. Le tout devrait prendre environ 10 minutes.

L’inculpation historique d’un grand jury de New York à l’encontre de Donald Trump découle au moins en partie d’un paiement à une star du porno, à quelques jours de l’élection présidentielle de 2016.

Donald Trump est arrivé à New York un peu avant 15 h 30 lundi. Les chaînes d’information continue ont consacré une partie de la journée à suivre ses déplacements à la minute près, depuis son départ de Mar-a-Lago, son club privé de Palm Beach, en début d’après-midi, jusqu’à son atterrissage à l’aéroport LaGuardia.

PHOTO MATIAS J. OCNER, ASSOCIATED PRESS

Des partisans de Donald Trump étaient rassemblés pour le regarder partir en Floride.

L’ancien président s’est ensuite dirigé en limousine vers sa résidence de la 5Avenue, au sommet de la Trump Tower, où il devait passer la soirée en compagnie d’avocats et de conseillers.

Il entend retourner à Mar-a-Lago tout de suite après sa comparution devant le juge Merchan afin d’y tenir en soirée une conférence de presse. La rumeur veut qu’il ait l’intention de redoubler ses attaques contre le premier procureur noir de Manhattan, qu’il a déjà traité de « raciste », d’« animal » et de « psychopathe ».

Donald Trump a également affirmé sur Truth Social que le juge Merchan le « déteste ».

Une telle stratégie pourrait lui attirer des ennuis, selon Cyrus Vance, prédécesseur d’Alvin Bragg au poste de procureur de Manhattan.

« Je dois dire que j’ai été troublé d’entendre l’ancien président parler comme il l’a fait du procureur Bragg et même du tribunal de première instance la semaine dernière. Et je pense que si j’étais son avocat – et croyez-moi, personne ne m’a appelé pour me demander conseil –, je ferais attention à ne pas commettre une autre infraction pénale, comme l’entrave à l’administration gouvernementale, qui consiste à interférer, par la menace ou autrement, avec le fonctionnement du gouvernement », a déclaré Vance dimanche lors de l’émission de NBC Meet the Press.

Et d’ajouter : « Je pense qu’en ajoutant un tel chef d’accusation devant un jury, on peut prendre un dossier qui n’est peut-être pas le plus solide et changer l’opinion du jury quant à la gravité de l’affaire qu’il examine. »

Jusqu’à présent, Donald Trump et son entourage font valoir que l’inculpation du grand jury de New York est un atout politique pour celui qui tente de retourner à la Maison-Blanche. L’équipe de campagne de l’ancien président affirme avoir récolté plus de 7 millions de dollars depuis l’annonce de l’inculpation.

« Tous les sondages indiquent que cette persécution politique orchestrée par le procureur de Manhattan a suscité un soutien massif pour le président Trump », a déclaré Steven Cheung, porte-parole de l’équipe de campagne de Trump.

À court terme, cela semble être le cas chez les républicains. Il y a deux semaines, Donald Trump récoltait 47 % des intentions de vote au sein de son parti, contre 39 % pour Ron DeSantis, son plus proche rival républicain. Après l’inculpation, l’ancien président devance le gouverneur de Floride par 26 points de pourcentage (57 % contre 31 %).