(New York) Donald Trump ne sera probablement ni inculpé ni « arrêté » cette semaine à New York comme il l’avait annoncé samedi. Le procureur qui enquête sur l’ex-président des États-Unis l’a accusé jeudi d’avoir « créé une fausse attente » médiatique sur une affaire aux conséquences politiques imprévisibles.

Le milliardaire républicain de 76 ans, qui rêve de « reconquérir » la Maison-Blanche en 2024, doit répondre devant la justice de l’État de New York et son procureur pour Manhattan, Alvin Bragg, d’une affaire de paiement de 130 000 dollars à l’actrice de films X Stormy Daniels en 2016, avec qui il aurait eu une liaison.

Donald Trump a réussi un coup d’éclat en assurant samedi sur son réseau Truth Social qu’il serait « arrêté » mardi dans le cadre d’une inculpation au pénal par le procureur Bragg.

Mais il ne s’est rien passé.

Cela n’a pas empêché New York — sa police, sa justice et la presse — d’être suspendue toute la semaine aux hypothétiques comparution, inculpation et même brève « arrestation » du 45e président américain.

Ce qui serait sans précédent aux États-Unis.

Coup de tonnerre

Le procureur Bragg, un élu démocrate à la tête du parquet de Manhattan depuis 2022 et qui a hérité de l’affaire Stormy Daniels, était resté mutique.

Mais dans une lettre datée de jeudi et adressée à trois parlementaires républicains, ses services ont dénoncé le coup de tonnerre médiatique et politique qu’a provoqué M. Trump samedi.

Dans ce courrier consulté par l’AFP, le parquet de Manhattan répond à ces trois élus de la Chambre des représentants qui avaient sommé, dans une lettre du 20 mars, le procureur Bragg de témoigner devant le Congrès.

Ils accusaient le magistrat classé à gauche de mener des « poursuites aux motivations politiques ».

« Votre lettre », rétorque la secrétaire générale de M. Bragg, Leslie Dubeck, « est une ingérence sans précédent dans une enquête locale en cours ».

Et elle « n’est venue qu’après que Donald Trump a créé une fausse attente sur le fait qu’il serait arrêté le jour suivant, et après que ses avocats vous ont apparemment pressé d’intervenir ».

« Aucun fait n’offre de fondement légitime à une enquête du Congrès », balaie-t-elle.

Inculpation repoussée

D’après plusieurs médias comme le Washington Post, la justice new-yorkaise a encore repoussé, jusqu’à la semaine prochaine, l’éventuelle inculpation de Donald Trump.

Cette décision doit être votée par un grand jury, un panel de citoyens aux larges pouvoirs d’enquête qui travaille avec le procureur, lequel doit s’y conformer et formellement inculper.

Ce grand jury ne s’est semble-t-il pas réuni sur ce dossier jeudi, dernier jour de la semaine judiciaire.

Même inculpé, M. Trump ne serait de toute façon pas « arrêté » dans l’immédiat.  

Il faudrait attendre plusieurs jours pour qu’il comparaisse à Manhattan, dans ce qui serait sans doute une indescriptible pagaille.

Toute la semaine, les autorités à New York ont fait installer des barrières devant le palais de justice et la Trump Tower de Manhattan. Pour prévenir tout risque d’affrontements dans une ville à l’histoire émaillée de violences, la police municipale (NYPD) a dopé « la présence de policiers en tenue ».

6 janvier 2021

M. Trump avait appelé samedi ses partisans à « manifester », rappelant ce qu’il avait fait en décembre 2020 et le 6 janvier 2021, jour de l’assaut de ses partisans contre le Capitole à Washington, pour contester sans preuve une présidentielle « volée », selon lui, par le démocrate Joe Biden.  

Mais il n’y a eu cette semaine que quelques dizaines de manifestants devant le palais de justice et la Trump Tower à New York, et devant chez Donald Trump, à Palm Beach en Floride.

Dans une dernière publication jeudi sur Truth Social, l’ancien président a répété qu’il était « 100 % innocent », poursuivi par « les fous de la gauche radicale » et a averti : « Notre pays est en train d’être détruit et ils nous disent de rester pacifiques ».

Sur le fond, l’affaire Stormy Daniels est complexe.

La justice cherche à déterminer si M. Trump s’est rendu coupable de fausses déclarations, une infraction, ou de manquement aux lois sur le financement électoral, un délit pénal, en ayant versé de l’argent à cette actrice de films pornographiques, de son vrai nom Stephanie Clifford, juste avant sa victoire à la présidentielle, en novembre 2016.

Dans quel but ? Pour qu’elle taise une supposée relation extraconjugale dix ans plus tôt, selon l’accusation.

L’homme clé du dossier s’appelle Michael Cohen : ancien avocat et désormais ennemi de M. Trump, il avait payé Stormy Daniels. Il a témoigné devant le grand jury, et l’actrice a aussi coopéré avec la justice.