(Washington) L’administration Biden a annulé une décision vieille de plusieurs décennies de révoquer l’habilitation de sécurité de Robert Oppenheimer, le physicien appelé « le père de la bombe atomique » pour son rôle de premier plan dans le projet Manhattan lors de la Seconde Guerre mondiale.

La secrétaire américaine à l’Énergie, Jennifer Granholm, a déclaré que la décision de 1954 de la Commission de l’énergie atomique avait été prise à l’aide d’un « processus déficient » qui violait les propres règlements de la commission.

« Au fil du temps, de plus en plus de preuves ont été révélées de la partialité et de l’injustice du processus auquel le Dr Oppenheimer a été soumis, tandis que les preuves de sa loyauté et de son amour du pays n’ont fait que s’affirmer », a indiqué Mme Granholm dans un communiqué vendredi.

PHOTO OLIVIER DOULIERY, AGENCE FRANCE-PRESSE

La secrétaire américaine à l’Énergie Jennifer Granholm

Robert Oppenheimer, décédé en 1967, a dirigé le projet Manhattan, qui a mis au point les bombes atomiques larguées sur Hiroshima et Nagasaki pendant la Seconde Guerre mondiale. Le physicien théoricien a ensuite été accusé d’avoir des sympathies communistes et son habilitation de sécurité a été révoquée après une audience à huis clos de quatre semaines.

En dépouillant M. Oppenheimer de son autorisation, la Commission de l’énergie atomique n’a pas allégué qu’il avait révélé ou mal géré des informations classifiées, et sa loyauté envers le pays n’a pas été remise en question, selon l’ordre de Mme Granholm. La commission, cependant, a conclu qu’il y avait des « défauts fondamentaux » dans son caractère.

Des années plus tard, un avocat de la Commission de l’énergie atomique a conclu après un examen interne que « le système a échoué » et qu’une « injustice substantielle a été faite à un Américain loyal », selon l’ordre de la secrétaire.

Mme Granholm a déclaré que la décision de la commission était motivée par le désir de ses dirigeants politiques de « discréditer M. Oppenheimer dans les débats publics sur la politique en matière d’armes nucléaires ».

« De tels motifs politiques ne doivent pas avoir leur place dans notre processus de sécurité du personnel », a-t-elle écrit.

Le sénateur américain Patrick Leahy du Vermont a applaudi le renversement, affirmant que la décision de 1954 faisait suite à une « audience manifestement injuste et contraire à l’éthique qui serait aujourd’hui fermement condamnée ».

« Cette décision réaffirme que les scientifiques du gouvernement, qu’ils soient renommés comme M. Oppenheimer ou qu’ils soient un technicien faisant son travail quotidien — y compris ceux qui souhaitent soulever des problèmes de sécurité ou exprimer des opinions impopulaires sur des questions de sécurité nationale — peuvent le faire librement et que leurs cas seront équitablement examinés sur la base de faits, et non d’animosité personnelle ou de politique », a précisé M. Leahy dans un communiqué.

La décision intervient alors que l’histoire de M. Oppenheimer se dirige vers le grand écran. Le film Oppenheimer de Christopher Nolan devrait sortir en salles en juillet. Il est basé sur la biographie lauréate du prix Pulitzer de Kai Bird et Martin J. Sherwin American Prometheus : The Triumph and Tragedy of J. Robert Oppenheimer, et met en vedette Cillian Murphy dans le rôle principal.